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Que devient Antoine Deltour, le lanceur d'alerte de l'affaire LuxLeaks ?

Le comptable vosgien est à l'origine du scandale LuxLeaks. Antoine Deltour a divulgué des milliers de documents fiscaux confidentiels.

Article rédigé par franceinfo, Sébastien Baer
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
Antoine Deltour, lanceur d'alerte de LuxLeaks, en 2017. (SÉBASTIEN BAER / RADIO FRANCE)

Le 15 mars 2017, le lanceur d'alerte dans l'affaire LuxLeaks, Antoine Deltour, est condamné en appel à six mois de prison avec sursis et 1 500 euros d'amende. Le jeune homme de 31 ans, originaire d'Epinal (Vosges), était poursuivi pour avoir divulgué des milliers de documents fiscaux confidentiels.

Pour Antoine Deltour, la peine prononcée par la justice du Luxembourg est un peu plus clémente qu'en première instance, mais à la sortie du tribunal, le jeune homme ne comprend pourquoi il est condamné alors que le tribunal a reconnu son statut de lanceur d'alerte. "Une décision satisfaisante aurait été un acquittement, réagit-t-il, La cour s'arrête à la moitié du chemin : j'étais un lanceur d'alerte au moment où j'ai transmis les documents, mais pas au moment où je me les suis appropriés. Il y a un paradoxe assez difficilement compréhensible."

Antoine Deltour entouré de ses avocats, le 15 mars 2017 à Luxembourg.  (AURORE BELOT / AFP)

Aller jusqu'au bout des procédures judiciaires

Trois semaines après le jugement, Antoine Deltour qui espérait être relaxé, décide de se pourvoir en cassation. Pendant son affaire, le jeune homme a été récompensé par plusieurs prix et il a reçu le soutien de centaines de députés européens et de personnalités politiques. Le comité de soutien à Antoine Deltour affiche plus de 200 000 signatures.

Le jeune homme qui est retourné vivre à Epinal, attend l'issue de son pourvoi en cassation : "Ce n’est pas une peine qui perturbe mon quotidien, je pourrais très bien vivre avec. Cette décision de poursuivre le recours, c’est plus une question de principe. L’intérêt public de ma démarche a été largement reconnu, et même salué par un certain nombre d’institutions très respectables. Je ne comprends pas pourquoi je devrais être condamné. Je ne vois pas clair, c’est pour ça que je continue."

Un groupe de soutien au lanceur d'alerte Antoine Deltour, devant le palais de justice de Luxembourg, mardi 26 avril 2016. (MAXPPP)

Coup de projecteur sur un "comptable de province"

L'affaire LuxLeaks a bouleversé la vie tranquille d'Antoine Deltour dans les Vosges . "Au départ, j'imaginais mon rôle comme celui d'une source anonyme, explique le lanceur d'alerte. J’ai transmis les documents en pensant que cela pouvait susciter un débat public, avec le maigre espoir que cela fasse bouger les lignes. Cela a été bien au-delà de mes espoirs, ça a permis des avancées concrètes en matière de fiscalité des entreprises. C’est un énorme acquis."

Par contre, Antoine Delcourt n'avait pas anticipé le fait d'être identifié comme une source et le fait de devoir se défendre publiquement devant des tribunaux. "Cela a été un petit choc pour un petit comptable de province d'être au centre d’une attention, et de faire l’objet d’accusations très graves", raconte-t-il.

Aucun regret pour le Vosgien

Antoine Deltour ne regrette pas d'avoir soustrait les documents, même s'il dit avoir eu un moment de faiblesse lors de sa garde à vue : "J'étais seul en cellule, dans des conditions pas très agréables. Je me suis posé la question de savoir si cela valait la peine."

Vu tout ce qui s'est passé par la suite, je pense que c'est un combat qui mérite d'avoir été mené

Antoine Deltour

à franceinfo

Aujourd'hui, Antoine Deltour ressent même une forme de sérénité, procurée par "le fait d’agir selon sa conscience." "On a tendance à ne voir que les conséquences négatives pour les lanceurs d’alerte, les préjudices parfois importants qu’ils subissent. Mais je connais très peu de lanceurs d’alerte qui regrettent. Cela leur procure un bien-être d’avoir été cohérents avec leurs valeurs."

Davantage de protection pour les lanceurs d'alerte

Antoine Deltour rêve maintenant d'un cadre protecteur pour les lanceurs d'alerte "parce qu’ils sont au service de tous". "Si tout le monde se tait, il n’y a aucune chance que les choses changent, se justifie le Vosgien. L’enjeu est de répondre aux dysfonctionnements nombreux de la société. Ce n’est pas par l’opacité qu’on soulèvera ces problèmes." D'après lui, il y a déjà une grande avancée en France avec la loi Sapin 2, et un autre projet en Europe. 

Dans son combat, Antoine Deltour a reçu le soutien d'Edward Snowden, un autre lanceur d'alerte célèbre : "C’est un symbole parmi d’autres, et certainement l’un des plus forts. Edward Snowden est la figure des lanceurs d’alerte qui bénéficie d’une reconnaissance universelle. C’est l’exemple type du lanceur d’alerte qui a su ne pas se laisser griser par la médiatisation. C’est un exemple à suivre."

Antoine Deltour attend à présent l'issue de son pourvoi en cassation. S'il n'est pas relaxé, il déposera un ultime recours devant la Cour européenne des droits de l'Homme, à Strasbourg.

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