Cet article date de plus de douze ans.

Sarkozy sans l'étincelle

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Article rédigé par Jean-Christophe Martin
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 12min
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Au sommaire : Sarkozy candidat a-t-il réussi son grand oral hier soir ? Des réponses avec une presse plutôt sceptique, voire sévère. Un Président qui vient d'enfiler les habits du candidat et toute la panoplie qui va avec, du gourou très traditionnel aux outils numériques les plus modernes.

L'invitée de l'hyper revue de presse : Linda Bendali, qui signe le reportage diffusé ce soir dans Envoyé spécial sur France 2 sur le sort des femmes de ménage, ces nouveaux domestiques...

L'actualité du Web

Le président-candidat et Internet

Toujours autour de la déclaration de candidature de
Nicolas Sarkozy, le Web et les réseaux sociaux étaient sur la brèche pour
observer et décortiquer la stratégie de communication digitale du président-candidat.

Discipline prisée sur le
web, le fact checking, comprenez la vérification des faits, a été largement
pratiquée hier par les internautes et nombres de sites spécialisés. Arrêtons-nous
sur 3 exemples. Tout d'abord, ,
tout juste ouvert, il compte à l'heure où s'écrivent ces lignes plus de 70.000 abonnés. Le nombre
d'abonnés, c'est justement ce qui a fait réagir de nombreux usagers de Twitter
hier qui s'étonnaient de voir un certains nombres de comptes à peine ouvert,
sans avatar de profil, et qui n'étaient abonnés eux qu'à une seule personne :
Nicolas Sarkozy. Le site PC Impact s'est donc livré à une analyse précise et
chiffrée avec un échantillon de 21.758 abonnés. 

Un tiers des abonnés de Nicolas Sarkozy ont une vraie vie sur le réseau
social, ce sont des comptes actifs, qui participent à la vie du réseau. A
l'inverse d'autres comptes pointés par PC Impact. 447 comptes ne suivent que
Nicolas Sarkozy, et 347 ont été créés le matin même. Le quart des abonnés n'a
pas publié plus de 5 messages, et ces abonnés ne disposent pas eux-mêmes de plus de 5 followers...

Ce sont des comptes qui ne comportent souvent ni biographie, ni lien
vers un site Internet, ni photo de profil... Remplacé par le célèbre œuf de
Twitter, qui est l'illustration proposée par défaut par le réseau social quand
on ne met pas de photo. Ce qui poussait certains hier à parler "d'avalanche d'œufs"
et de "gonflage de compte" pour affirmer sa présence sur le Web... Le site PC
impact indique qu'il poursuivra son analyse au fur et à mesure de la croissance
du compte de Nicolas Sarkozy.

Deuxième point qui a attiré l'attention des internautes,
le slogan de campagne choisi par
Nicolas Sarkozy

Au-delà de sa ressemblance
maintes fois pointée avec celui utilisé par Valéry Giscard d'Estaing, c'est la
question de la propriété de ce slogan qui a aiguisé la curiosité des
internautes.

Rue89 titre "Au voleur,
Sarkozy utilise un slogan protégé depuis 2002
". L'expression "La France
Forte" a effectivement été déposée par une consultante en management, Laurence
Henriot
, le 14 janvier 2002 dans des classes d'utilisation précises : dont l'impression
de tracts, d'affiches, de teeshirts, de casquettes, publicité en ligne ou à la
télé, etc. Tout est disponible sur le site de l'Institut National de la Propriété Intellectuelle, l'INPI. Rue89 précise avoir contacté Laurence Henriot
qui n'a pas souhaité s'exprimer sur l'utilisation de son slogan par Nicolas
Sarkozy, ni s'il était destiné à un candidat pour l'élection de 2002.

Dernier exemple, avec une vérification des conditions
nécessaires pour être candidat selon les statuts de l'UMP.

Cette fois-ci, c'est sur
le site du Monde : si le président souhaite avoir le soutien de l'UMP, il doit passer
par un congrès du parti et se soumettre au vote des militants. C'est l'article
49 des statuts de l'UMP
très clair sur le sujet. Contacté par le site du
quotidien, le service de presse du parti indique "qu'il n'y a pas de congrès de
prévu", et dit je cite "qu'il va se renseigner". Le Monde qui reprend
la chaîne Itélé précise dans une mise à jour que l'UMP ratifiera son soutien à
Nicolas Sarkozy lors d'un meeting à Villepinte qui devrait se dérouler le 11 mars. D'autre part,
le parti pourrait organiser un vote électronique et se contenter d'un congrès
confidentiel, mais le journal précise qu'un adhérent  pourrait alors se sentir lésé et entamer des
poursuites.

La grenade de la transparence

La découverte du matin sur le Web, c'est la grenade de
la transparence.  L'idée d'un artiste néozélandais
: une réplique d'une grenade soviétique en plexiglas.  Pas d'explosion à attendre, si ce n'est celle
des révélations que cette grenade peut intercepter grâce à son système
informatique embarqué...

"Une arme de
divulgation massive" c'est ainsi que le site ecrans.fr décrit cette
grenade de la transparence. Créé par l'artiste Julian Oliver, son prototype
était présenté lors du festival des cultures numériques Transmédiales à Berlin.

La Transparency Grenade
remplace sa charge explosive par un micro, un ordinateur et une antenne WiFi.
Une fois dégoupillée, cette grenade intercepte les informations qui circulent
sur le réseau : adresses Internet, emails, images, adresses IP des ordinateurs,
etc. Elle peut aussi enregistrer des conversations et les stocker sur un
serveur distant. Le résultat de la collecte est censé alimenter une "carte
des détonations", une carte du monde où les contenus capturés par la
grenade sont mis en ligne, accessibles à tous et géolocalisés.

Objectif, faciliter les
fuites d'informations confidentielles. Comme le précise l'artiste hacktiviste
Julian Oliver : "L'absence de
transparence de la part de l'industrie et du gouvernement a été un sujet de
grande controverse et notre seul outil pour plus d'ouverture est le lent et
fastidieux processus de réforme politique. La Transparency Grenade permet de
surpasser ces frustrations. Divulguer des informations secrètes est aussi
simple que de tirer la goupille".

Les plans et les
informations techniques
sont disponibles sur le site de l'artiste, qui indique
aussi travailler sur une application qui offrirait peu ou prou les mêmes
services que la grenade, mais sur un téléphone fonctionnant sous Androïd. Légalement
impossible à distribuer, ecrans.fr pécise que Julian Oliver devra se contenter
de livrer le code source et les instructions pour créer, si le cœur vous en
dit, cette application.

La revue de presse et du Web

A la Une, le candidat Sarkozy... A-t-il réussi son grand oral hier soir ? La réponse avec la presse plutôt sceptique, voire sévère...

Et pour la plupart, les examinateurs n'ont pas été franchement convaincus. Pour Philippe Waucampt dans le Républicain Lorrain, cette déclaration de candidature était "banale, sans élan, dépourvue du moindre vibrato de nature à faire rêver". Même sévérité de Philippe Reinhard dans l'éclair des Pyrénées : "malheureusement pour Nicolas Sarkozy, son problème avec les Français n'est pas affaire de crédibilité mais d'affection, sur ce terrain, il a déjà perdu la partie, et sa prestation d'hier soir l'enfonce encore un peu plus".

Pour François Martin dans Midi Libre, Nicolas Sarkozy veut "rallumer la mèche de 2007 et mettre le feu aux poudres", mais cette fois, "il lui manque l'étincelle"... Sur le même registre, Jean-Claude Souléry dans la Dépêche du Midi a eu l'impression d'un candidat "appliqué, certes, mais qui a perdu sa force de conviction", et même "l'impression d'une lassitude ponctuée de quelques soupirs",  dans un studio de télé "qui paraissait soudain trop grand pour un Sarkozy qui l'a joué trop petit bras".

Même scepticisme sur le fond : Libération ironise sur l'appel au peuple, l'un des leitmotivs hier soir, avec ce titre à la Une de Libération : "Sarkozy cause du peuple". Pour l'Humanité impitoyable, en étant à nouveau candidat, Sarkozy veut juste "finir son sale boulot". Objectif : "anéantir le modèle social français"...

A propos du référendum, le candidat n'a pas été plus convaincaint : pour Patrick Fluckiger dans l'Alsace, encore une "proposition-gadget" qui fleure bon le "y'à qu'à". Et toujours à propos du recours au référendum, Jacques Camus dans la République du Centre parle aussi d'un "sacré revirement", surtout de la part de l'hyper président qui voulait tout décider tout seul.

C'est encore une fois à la lecture du Figaro que le candidat pourra se consoler, le Figaro qui salue sa volonté de garder le cap des réformes, malgré ou à cause de la crise. Paul-Henri du Limbert résume l'enjeu de la présidentielle pour le Figaro : "ouvrir les yeux sur la réalité, comme le candidat Sarkozy, ou détourner le regard", comme ses adversaires.

Un autre soutien ce matin pour le chef de l'Etat : celui du Times de Londres qui prend position. Un soutien un peu par défaut, puisque le quotidien conservateur britannique voit en Nicolas Sarkozy le meilleur candidat à la présidentielle française mais ajoute quand même le meilleur malgré, "malgré tous ses défauts".

Le président a donc enfilé depuis hier soir les habits du candidat... les habits et toute la panoplie qui va avec...

Un candidat doit avoir son slogan : ce sera donc "la France forte", un slogan qui s'étale à la Une du Figaro, car un candidat doit aussi avoir son journal... Il faut aussi une affiche, elle est à découvrir toujours dans le Figaro, Sarkozy sur fond de lever de soleil sur la mer... Le candidat doit avoir son porte-parole, ce sera Nathalie Kosciusko-Morizet, la ministre de l'Ecologie, dont le Figaro tire le portrait.

Et en 2012, il faut aussi dans la panoplie du candidat les outils numériques, là aussi tout est fin prêt avec une page Facebook toute neuve et depuis hier un compte Twitter tout neuf... et bien sûr le site officiel de la campagne à l'adresse lafranceforte.fr.

Et puis un bon candidat se doit aussi d'avoir son gourou, son homme de l'ombre, si vous ne le connaissez pas, il est à la Une du nouvel Observateur, dans l'ombre comme il se doit derrière Nicolas Sarkozy qui est au premier plan. Le gourou, c'est Patrick Buisson, le conseiller politique dont Nicolas Sarkozy dit que c'est lui qui l'a fait gagner en 2007, qui est toujours là, dans l'ombre, en 2012, et dont le nouvel Observateur raconte le passé sulfureux dans la galaxie de l'extrême-droite.

Voilà tout est en ordre de bataille autour du candidat, avec une curieuse similitude relevée par le Huffington Post avec un discours d'un autre président-candidat, Valéry Giscard d'Estaing en 1981. Même soulagement à annoncer - enfin - sa candidature, même évocation de la crise sans précédent - déjà -, et même slogan, "la France forte", dont Geoffroy Clavel fait remarquer sur le Huffington Post que ce fut l'un des slogans de campagne de VGE. Acte manqué se demande le Huffington Post, à moins que Nicolas Sarkozy espère ainsi conjurer le sort du seul président à n'avoir pas été réélu au terme d'une campagne présidentielle. En attendant, la campagne peut reprendre son cours...

La presse à la Une

Alan Stivell fait son retour sur scène ce soir à l'Olympia à Paris, 40 ans après un concert qui avait fait date, au même endroit... A l'époque, il avait ouvert la voie à d'autres artistes qui allaient porter haut la culture ou plutôt les cultures bretonnes, et pas seulement pour la musique.

Ouest France salue l'événement et l'anniversaire avec un hors-série, "cultures bretonnes"... Un hommage d'abord, comme une évidence, un hommage au maître Alan Stivell... avant d'évoquer bien sûr la relève, tous ces jeunes artistes bretons qui sont au rendez-vous.

 

 

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