La peur du Big Data... dès 1974
Retour en juillet 1974. A cette époque, un débat intense agite la classe politique. Il concerne ce qu’on n'appelle pas encore le Big Data, mais les termes de ce débat résonnent avec une incroyable actualité.
En mars 1974, Le Monde a titré "SAFARI ou la chasse aux Français". SAFARI, c’est le nom d’un vaste projet de centralisation des données des Français, celles de l’INSEE, celles du ministère de l’Intérieur ou encore de la Caisse Nationale de l’assurance vieillesse qui gère les retraites des Français…
En juillet de cette année-là, à l’occasion d’une émission célébrant les 25 ans de l’ordinateur, François de Closets pointe l’urgence d’une régulation:
"Si dans 5 ans, on a rien mis en place, alors oui, j'aurais peur. Il va se passer la même chose qui s'est passé avec le téléphone. A l'époque, personne ne s'est dit, "mais attention, avec les écoutes clandestines, c'est un moyen effroyable pour espionner la vie privée". Résultat, on laissé se développer la plante vénéneuse des écoutes téléphoniques mal contrôlées".
Cette affaire SAFARI va de fait faire bouger la législation, d’autant que le nouveau président, Valery Giscard d’Estaing tient à avancer rapidement dans cette direction. En juillet 1976, Jean Lecanuet, ministre de la Justice pour quelques semaines encore, défend sur France Inter la nécessité d’une grande loi :
"Il ne s'agit pas de combattre l'informatique...Mais il faut lutter contre les abus. Il ne faut pas qu'on puisse connaître en appuyant sur un bouton tout ce qui a composé l'histoire d'un individu, qu'il s'agisse de sa santé, de ses contraventions, de là où il est allé...il s'agit de préserver la vie privée des Français".
Il faudra cependant encore un et demi pour que naisse enfin la loi Informatique et Liberté le 6 janvier 1978, avec à ses côtés la CNIL, Commission nationale de l'informatique et des libertés, qui offre un cadre légal à l’utilisation des données personnelles et qui doit protéger les citoyens et consommateurs contre tout usage abusif de données informatiques les concernant.
Face au Big Data, les lois semblent bien fragiles. Et les Français, comme François de Closets il y a 40 ans, sont inquiets. Une enquête récente menée par Havas révèle que 84% des internautes français se disent inquiets de l’usage qui peut être fait de leurs données. Mais ils sont 50% d’entre eux à accepter l’utilisation de ces données moyennant une contrepartie financière…
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