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franceinfo seniors. L'été d'un jeune homme en Ehpad

Comment se vit l'Ehpad soumis à des règles sanitaires strictes et raconté par un jeune homme en renfort Covid et canicule ?

Article rédigé par franceinfo, Frédérique Marié
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Un été en Ehpad (FREDERIQUE MARIE / FRANCE INFO)

Comment un jeune homme de 21 ans, Baptiste, qui a passé un mois d'été dans un Ehpad a-t-il vécu cette expérience inédite et ressenti cet univers pour le moins contraint par les mesures de la crise sanitaire liée au coronavirus ? 

Beaucoup de ces résidents en Ehpad sont très vieux, moyenne d'âge quand même 90 à 95 ans, explique Baptiste, l'ouie n'est plus vraiment ce qu'elle était, donc un sourire et lire sur les lèvres, ça aide beaucoup, mais en cette période de crise sanitaire, les choses ne sont pas aussi simples. 

"Donc là c'était compliqué, souligne le jeune homme, quand je parlais (avec le masque) je faisais beaucoup de signes avec mes yeux. C'est vrai que ne pas les toucher, pour les aider etc, c'est compliqué. Après voilà, faut savoir parfois aussi rester humain, quand on me demandait, est-ce que vous pouvez m'aider à mettre mon pull, j'étais le seul disponible, donc je me lavais les mains, je l'aidais à mettre son pull, je me relavais les mains. Il y a un lien qui s'est créé assez naturellement au fil du temps". 

Beaucoup parlaient de la "vie d'avant", d'avant l'Ehpad

Ils disaient qu'ils espéraient  mourir chez eux, de manière naturelle, tranquillement, ajoute Baptiste. 

J'étais face à des phrases, à des mots que j'ai trouvés un peu durs, quand on me dit par exemple : 'ben j'aimerais bien rentrer chez moi et en finir tranquillement', bon, il est 8h10 du matin, et nous, tout ce qu'on peut dire c'est : un jus d'orange ou un jus de pruneau ? Pour moi, j'avais l'impression que c'était ça : de vraiment prendre le présent et de le kiffer ce présent. Beaucoup m'ont parlé d'un peu de sensation d'emprisonnement...

Baptiste, 21 ans

Un mois d'août qui a changé la perception de Baptiste par rapport à cette génération que le monde politique, les médias et les plateaux télé, en général, ne mettent pas sur le devant de la scène.

Je suis tombé quand même face à des gens malheureux, qui attendent la mort...Ces personnes-là ont peur de déranger, faut leur demander vraiment, parce qu'ils n'oseront pas vous déranger...

Baptiste, 21 ans, stagiaire en Ehpad cet été

Une nonagénaire de l'Ehpad du centre hospitalier du Cateau, dans le Nord, le 7 mai 2020. (MAXPPP)

En France, 7500 établissements accueillent
600 000 personnes âgées dépendantes

Le nombre de clusters a encore augmenté et la hausse de nouveaux cas se poursuit chez les plus de 75 ans. L’Aude, la Nièvre, le Bas-Rhin, la Meurthe-et-Moselle, l’Ile-de-France et Paris. Environ 14 établissements ont pris des mesures de confinement total ou en chambre, après des suspicions ou des cas avérés. Des dizaines d’autres Ehpad ont exceptionnellement ouverts leurs portes, ont renforcé leurs restrictions.

Au confinement, il faut ajouter les séquelles psychiques, émotionnelles, et physiques qui se traduisent par le syndrome du glissement : Le syndrome de glissement ou abandon, ou mort psychogène, est l'acte d'abandonner la vie à la suite d'un événement traumatique, alors qu'il n'y a aucune cause organique. Il touche les personnes âgées, malades, traumatisée ou handicapées. Ce n'est pas du suicide, ni de la dépression. Des liens sociaux inexistants, des équipes médicales en sous-effectifs, tout cela se traduit par une solitude devenue quotidienne pour les personnes âgées.

Qui décide des visites dans les établissements : les familles, les pensionnaires ou la direction ?

Le protocole mis en place par le ministère de la Santé donne une réponse claire : "La demande de visite émane du résident, et dans le cas où le résident ne peut pas l’exprimer formellement en première intention, son avis est sollicité quant à l’éventualité d’une visite".

Mais la décision, elle, est prise par la direction. Tout dépend donc de la situation sanitaire de la résidence, et si les risques sont trop grands, attendez-vous à ce que les visites soient interdites pour le moment, ou encadrées encore plus strictement. À noter que "les résidents pour qui le confinement a un fort impact sur la santé physique et mentale" sont priorisés dans la mise en place de ces visites.

Comment se déroulent les visites ?

Les proches des résidents se voient fixer une durée de la visite inférieure à une heure, et la visite se passe à l'extérieur de l’établissement, à l'intérieur dans un espace aménagé, ou en chambre, lorsque le déplacement du résident est impossible.

Le protocole a légèrement évolué, autorisant les visites "à plus de deux" lorsqu'elles sont faites en extérieur, à seulement deux personnes en chambre. Les mineurs sont également de nouveau autorisés lors de ces visites. À noter que les gestes barrières et les mesures de distanciation physique doivent être scrupuleusement respectés. Le visiteur doit également se laver les mains une fois arrivé, sa température doit être contrôlée par l'établissement et il doit déclarer sur l'honneur "qu’il n’a pas pris dans les 12h un traitement antipyrétique (paracétamol, aspirine, etc.)".

Le proche en visite doit également remplir sur place un auto-questionnaire, et enfiler un masque, soit apporté par celui-ci, soit fourni par l'établissement. Tout échange d'objets ou d'aliments est strictement interdit, et toutes les surfaces touchées pendant la visite sont strictement désinfectées. Des mesures indispensables pour veiller à la sécurité de tous.          

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