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"Bring Back Our Girls" : un nouveau mode de mobilisation ?

La revendication de l'enlèvement des jeunes lycéennes par Boko Haram tourne en boucle sur YouTube. Celle de Michelle Obama appelant à leur retour chez elles est liké en masse sur Facebook... "Bring Back Our Girls", c'est une nouvelle forme de mobilisation, digitale et mondiale. Mais c'est aussi la réaffirmation d'un principe : Internet permet tout, à la fois le meilleur et le pire. Analyse.
Article rédigé par Frédéric Martel
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
  (©)

C'est une
vidéo de cinq minutes postée hier soir sur le site internet de la Maison
Blanche.
Fait
exceptionnel, c'est Michelle Obama qui s'exprime à la place du Président des
Etats-Unis, dans cette vidéo hebdomadaire. Et Michelle Obama a consacré
l'intégralité de la vidéo aux 223 lycéennes du Nigéria qui ont été enlevées par des
extrémistes
, et qui seraient sur le point d'être mariées de force.

Des jeunes
filles qui veulent aller à l'école, un enlèvement odieux, proféré par une secte
islamiste, la peur d'un djihad mondialisé... On comprend l'ampleur des
réactions face à ce rapt ignoble. Partout dans le monde, des gens manifestent, des
intellectuels pétitionnent, des hommes politiques s'engagent - François Hollande, Hillary
Clinton, David Cameron - et des artistes apparaissent sur des images virales,
avec ce slogan : "Bring Back Our Girls " (Ramenez nos filles).

La cause est
juste et l'ennemi identifié : Abubakar Shekau, de la
secte Boko Haram, est un extrémiste qui, comme les talibans, s'en prend aux
écoles, veut appliquer la charia, détruit les églises et assassine les
chrétiens. Boko Haram qui signifie d'ailleurs textuellement "L'éducation
occidentale est un péché
".

Un nouveau type de mobilisation

C'est un
nouveau type de mobilisation, à la fois global et digital.

a
été retwettée plus de 50.000 fois, et une pétition sur Change.org
a quant à elle déjà recueilli près de 900.000 signatures à ce jour.

Ce qui est
intéressant et fait débat, c'est l'usage d'internet et des réseaux sociaux.
Des chercheurs comme Evgeny Morozov,
ou des journalistes comme Michael Gladwell, ont dénoncé les faiblesses ou les
dangers des mobilisations sur internet. Ils contestent qu'internet serait
"un accélérateur de démocratie ". Les réseaux sociaux, avec leurs
liens trop ténus, leurs petits "j'aime ", ne permettraient que de
petits changements, des "small changes ". A travers le mouvement Bring
Back Our Girls
, nous avons une bonne illustration de ce débat.

Internet : un rôle positif... et négatif

Ici,
internet joue tant un rôle positif que négatif. La vidéo de revendication des
terroristes tourne en boucle sur Youtube pendant que le discours de Michelle
Obama est liké en masse sur Facebook. Internet permet donc tout à la fois le
meilleur et le pire.
La page Facebook "Nous sommes tous Khaled
Said
", celle qui a provoqué la première révolution égyptienne, est du côté
du meilleur. Le blog collectif Nawaat en Tunisie également.

Le pire, ce
sont les terroristes qui usent des réseaux sociaux, les cartels de la drogue au
Mexique qui postent leurs vidéos macabres sur Youtube, et tous ceux qui
utilisent les nouvelles technologies pour des causes injustifiables.

Ni bon ni
mauvais, internet permet donc toutes les formes de mobilisation et, surtout,
les accélère.
On peut lui
reprocher d'offrir des moyens pour participer à ces conversations, mais non pas
nécessairement pour agir. On peut regretter aussi que l'activisme qui était
défini hier par ses causes le soit aujourd'hui par ses outils numériques.

Reste
l'essentiel : ces filles vont-elles rentrer à la maison ?
C'est en fin de compte la seule
chose qui importe de cette opération Bring Back Our Girls .

 

* Pour aller
plus loin :

 

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