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En Inde, la religion au cœur des régionales dans l’Uttar Pradesh, l'État le plus peuplé de pays

La politique menée depuis cinq ans dans l'Uttar Pradesh par un moine proche du président Modi favorise clairement les Hindous qui représentent 80% de la population. Mais au vu des mauvais résultats économiques, l’islamophobie ne fait plus autant recette.

Article rédigé par franceinfo - Sébastien Farcis, édité par Ariane Schwab
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Le ministre en chef de l'Uttar Pradesh (Inde), Yogi Adityanath en campagne électorale, le 1 février 2022. (MONEY SHARMA / AFP)

L’État le plus peuplé d’Inde, l’Uttar Pradesh, entame jeudi 10 février un mois d’élections régionales. Cet État qui compte 230 millions d’habitants, est dirigé depuis cinq ans par le moine hindouiste Yogi Adityanath. Cet allié du Premier ministre Narendra Modi a régné d’une main de fer, sévère contre les mafias de la région, mais aussi contre ses critiques et les médias. 

Connu pour son islamophobie assumée, Yogi Adityanath a également promu l’héritage hindou et marginalisé les musulmans. En effet, depuis cinq ans, le parti nationaliste hindou BJP ("parti indien du peuple") mène en Uttar Pradesh une politique hindouiste.

Une carte représentant l'Uttar Pradesh, l'État le plus peuplé de pays. (SNAZZY MAPS / RADIO FRANCE)

D’un côté, les autorités lancent la construction de grands temples hindous, de l’autre, elles répriment la minorité musulmane, cette dernière représentant 20% de la population régionale. Les musulmans sont présentés comme un danger pour les hindous. Ils tueraient les vaches, sacrées dans l’hindouisme, comploteraient avec le Pakistan ou forceraient les femmes hindoues à se convertir à l’islam par le mariage. Des messages qui divisent profondément la société.  

L’Uttar Pradesh est ainsi le laboratoire du nationalisme hindou le plus radical. Pendant la campagne, Yogi Adityanath n’a pas hésité à comparer l’enjeu de cette élection à un combat entre la majorité hindoue et la minorité musulmane. Des musulmans qu’il décrit ainsi : "Ces 20% sont contre nous, contre la construction des grands temples hindous, contre le développement et ils soutiennent les mafias et les terroristes. C’est ainsi que ce sont ces 20%."   

Une politique qui commence à s’essouffler  

Le Covid-19 a plongé l’Inde dans l’une des crises économiques les plus fortes du monde. Le PIB national a baissé de 8% en 2020. Et l’Uttar Pradesh est particulièrement frappé. C’est la deuxième région la plus pauvre en termes de revenus par habitant : une personne gagne en moyenne 65 euros par mois, soit le niveau du Sénégal. Or en termes constants, ce revenu a baissé en trois ans, un recul plus fort que dans les autres régions indiennes.

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Les plus modestes sont donc en colère contre le gouvernement.   

"Je gagne 500 roupies par jour, soit 6 euros, soit la même chose qu’il y a deux ans mais les prix, eux, ont doublé."

Arjun Kumar Bharti, un chauffeur de bus privé 

à franceinfo

"Quand ma femme a accouché, j’ai dû m’endetter pour aller dans un hôpital privé, car celui public ne pouvait pas la traiter, poursuit Arjun Kumar Bharti. Alors le grand temple de Ram, à quoi il va me servir ? Si au moins ils avaient construit des hôpitaux ou des écoles ! J’ai voté pour le BJP la dernière fois. Mais je ne le referai pas !"  Le BJP risque donc de perdre de nombreuses voix, mais il reste le parti le plus riche et le mieux organisé du pays, et comme il avance face à une opposition divisée, il a encore de grandes chances de remporter ces élections en Uttar Pradesh. Selon les sondages d'opinion, le BJP devrait conserver la majorité à l'assemblée de l'Uttar Pradesh, qui compte 403 membres, ce qu'aucun parti n'a fait depuis 1985, et même améliorer son score. 

Le scrutin comporte sept tours. Plus de 22 millions d'électeurs sont appelés à voter au premier tour, jeudi, pour 58 sièges à l'assemblée de l'État. Le dépouillement aura lieu le 10 mars au terme du processus.

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