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En Espagne, les descendants de Franco priés par la justice de quitter leur palais

Le Pazo de Meiras, édifice rempli d'oeuvres d'art, en Galice, était devenu propriété du dictateur en 1941 grâce à un tour de passe passe. En septembre dernier, un tribunal a invalidé la vente et ordonné la restitution du palais à l'État. 

Article rédigé par franceinfo - Mathieu de Taillac
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
  (MIGUEL RIOPA / AFP)

À Sada, au nord-ouest de l'Espagne, le Pazo de Meiras, édifice historique rempli d’oeuvres d’art, va changer de mains et les propriétaires, les anciens comme les nouveaux, ne sont pas n’importe qui. Les descendants du dictateur Francisco Franco doivent en livrer les clés à l’État suite à une décision de justice.

Une bataille entre les Franco et les anti-franquistes

Cette propriété bourgeoise du XIXe siècle, de style romantique, a d'abord appartenu à une écrivaine, Emilia Pardo Bazán. En 1938, un an avant la fin de la guerre civile espagnole, une organisation se monte pour acheter le palais aux héritiers de la femme de lettres et en faire cadeau au général Franco afin que celui-ci en fasse la résidence d'été officielle du chef de l’État. Cela se fait par une souscription populaire qui en réalité avait souvent des allures d’extorsions. Et puis en 1941, un document de vente apparait, ce n’est plus la résidence du chef de l’État, mais la propriété personnelle du dictateur. Un tour de passe passe qui dure quasiment 70 ans. Jusqu’à ce que l’affaire arrive aux tribunaux et que la justice établisse, en septembre dernier, que la vente est une fiction, qu’elle est donc non avenue et que les héritiers de Franco doivent rendre la propriété à l’État.

C’est un sacré retournement de situation, surtout après autant de temps. Les réactions sont passionnées chez les Franco mais aussi chez celles et ceux qui se sont battus contre eux. D’un côté les collectifs antifranquistes, mais aussi des institutions, l’État, qui s’est porté partie civile, la région et la commune.
Pour nous, c’est un jour historique, nous sommes fiers que cela se passe sur notre commune, déclare le maire de Sada, la municipalité du Pazo de Meiras, interviewé par la télévision publique TVE. C’est le couronnement d’un processus qui a supposé beaucoup de travail de la part de beaucoup de monde, de collectifs qui ont tout fait pour que ce jour soit une réalité."

Maintenant, on veut que ce qui fut l’épicentre du franquisme devienne l’épicentre de la récupération de la dignité des victimes de la dictature.

le maire de Sada (Espagne)

à la chaîne TVE

De l’autre côté, Francis Franco, le petit-fils du dictateur, devenu porte-parole de la famille dénonce "une décision politique". "Ils veulent une photo, un rideau de fumée pour cacher toute la gestion de la pandémie sans oublier qu’ils préparent le vote du budget avec le soutien des nationalistes", affirme-t-il dans une interview au site du journal La Razón"Ils", on ne sait pas très bien si c’est la justice ou le gouvernement : le fait est que les Franco ne sont pas contents et ont fait ce qu’ils ont pu pour retarder la décision et même pour retirer tous les biens possibles du palais.

Que va devenir ce Palais ? Le maire laisser entendre qu’il voulait en faire un lieu de mémoire mais avec quelle collection, si les héritiers de Franco vident les lieux ? Le sort de ce lieux historique et hautement symbolique doit encore être discuté par les diverses institutions. La justice a en tous cas pris ses dispositions pour éviter une deuxième spoliation. Des experts ont été mandatés pour dresser un inventaire complet des biens présents dans l’édifice. Plus de 1 000 photos et 80 vidéos ont été réalisées pour répertorier près de 700 objets et une bibliothèque de 13 000 livres. Des oeuvres d’arts, des objets religieux, des statues parfois démontées des églises et des cathédrales pour faire plaisir à Franco et à son épouse... Un patrimoine dont ont profité les Franco pendant près de 70 ans mais qui doit à présent revenir à l’ensemble des Espagnols.

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