En Égypte, le gouvernement réclame la restitution d’un portrait de Toutânkhamon mis aux enchères à Londres, ce jeudi
Des archéologues égyptiens estiment que la pièce provient d’un lot volé à Louxor dans les années 1970, mais la maison de vente assure qu'il a été vendu par un collectionneur qui l'avait en sa possession depuis les années 1960.
La mise aux enchères d’un portrait de Toutânkhamon doit s’ouvrir ce 4 juillet à Londres dans la maison Christie’s. Il s’agit d’une statue du dieu Amon sous les traits du jeune pharaon. Une pièce majeure, estimée à près de 4,5 millions d’euros. Mais cette vente provoque la colère des autorités égyptiennes. Car selon des archéologues égyptiens, cette tête de Toutankhamon proviendrait d’un lot volé dans le temple de Karnak, à Louxor, dans les années 1970.
Le ministère égyptien des Affaires étrangères et des Antiquités a regretté que Christie's ait organisé mercredi 3 juillet une première vente de pièces égyptiennes malgré "les demandes égyptiennes légitimes ces dernières semaines", notamment concernant l'obtention des certificats d'acquisition des oeuvres. Le ministère des Antiquités égyptien réclame la restitution de cette pièce vieille de 3 000 ans. Mais Christie's dément et affirme que la propriété de ce portrait est clairement établie. Selon la maison de vente, il aurait été vendu pour la première fois autour de 1973 par un collectionneur qui l’avait en sa possession depuis les années 1960.
"La traçabilité de départ est floue"
Cette traçabilité est toutefois loin d’être suffisante pour les autorités égyptiennes. "La traçabilité de départ est floue, abonde l’égyptologue Christian Leblanc. Mais comment Christie's, par exemple, va aller vérifier ça ? Ils n’en ont pas les moyens, ils n’en ont pas les compétences non plus. Ça veut dire que c’est très dangereux, parce qu’à partir du moment où on met une pièce comme ça en vente sur le marché des antiquités, on encourage d’éventuels spoliateurs ou voleurs d’antiquités".
Hausse du trafic illégal d'antiquités
Si le vol de cette tête de Toutânkhamon n’est pas avéré, le trafic illégal d’antiquités a explosé en Égypte après la révolution de 2011, et le pays est très actif en matière de lutte contre ce trafic. Son patrimoine plusieurs fois millénaire est un atout majeur sur lequel il appuie sa stratégie de relance du tourisme, en berne depuis la révolution.
Près de 1 500 objets volés ont ainsi été rapatriés au cours des cinq dernières années. Et il n'y a pas que les maisons de vente qui ont été épinglées pour leur négligence, il y a aussi des musées, y compris le Metropolitan Museum de New York qui a restitué en février un sarcophage doré vieux de plus de 2 000 ans.
Aujourd’hui, l’Égypte a réussi à endiguer le pillage de ses sites archéologiques. Mais d’autres pays de la région comme la Syrie, l’Irak ou la Libye sont particulièrement touchés. Et sans une vigilance accrue des organismes internationaux et des acteurs du marché des antiquités, leurs patrimoines pourraient aussi se retrouver mis aux enchères dans des salles de vente.
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