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Une plongée vertigineuse au coeur de la galaxie

Au sommet du Cerro Paranal, dans le désert chilien, les astronomes européens viennent de réaliser une image infrarouge exceptionnelle du cœur de notre galaxie, la Voie lactée.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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C'est un véritable exploit technique que vient de réaliser l'équipe internationale de R.K. Saito, D. Minniti, B. Dias, J. Alonso Garcia, B. Barbuy et leurs collaborateurs, avec le télescopeVista (Visible and Infrared Survey Telescope for Astronomy ) installé à l'observatoire de Cerro Paranal, au Chili.

L'une des plus grandes images du ciel jamais réalisées par les astronomes

Cette image, présentée ici en très très basse définition, compte en réalité neuf milliards de pixels ! Produit de plus de 1.000 heures de temps de pose avec le nouveau télescope infrarouge de 4,1 m de diamètre de l'ESO (Observatoire européen austral), l'image montre la région centrale de notre galaxie, la Voie lactée, vue dans le rayonnement infrarouge.

L'équipe de Vista a pour la première fois à une échelle aussi grande, réalisé le portrait du cœur de la Galaxie, de son bulbe, essentiellement peuplé de vieilles étoiles.

Les prouesses du téléscope Vista

Le télescope Vista a justement été conçu pour réaliser des images à très grand champ : sa caméra infrarouge compte 67 millions de pixels, et offre un champ d'environ 1 degré. La mosaïque d'images constituant cette photographie du centre galactique embrasse un champ de 315 degrés-carrés, soit près de 1 % de la surface du ciel entier.

L'image en fausses couleurs a été prise à travers trois filtres, à 1,25 micron, 1,65 micron et 2,15 microns, alors que l'œil humain est sensible entre 0,4 et 0,7 micron. A ces longueurs d'onde, le gaz et la poussière interstellaires du disque spiral, qui masquent le centre galactique à notre vue, sont relativement transparents : au centre de l'image apparaît le noyau galactique, où se cache un trou noir géant.

Personne ne sait encore combien d'étoiles compte cette image, mais 170 millions d'entre elles ont déjà été identifiées et classifiées. Pourtant des centaines de millions d'autres sont trop faibles pour être scientifiquement étudiées. Et, pour donner une idée de la démesure de la Voie lactée, 170 millions d'étoiles, cela représente environ 0,1 % de sa population totale !

Une référence astrométrique

Cette population stellaire, essentiellement masquée par les nuées interstellaires du disque galactique, était jusqu'ici méconnue.
Cette photographie géante restera à jamais une référence astrométrique : elle montre la région centrale de la Galaxie telle qu'elle existe aujourd'hui, disons en 2010.

Dans les années, les décennies, les siècles à venir, toutes ces étoiles vont bouger, emportées par la rotation galactique autour du trou noir géant central. Dans les décennies qui viennent, les futures études de la Voie lactée se référeront, forcément, à cette image "primordiale ", qui va devenir de plus en plus précieuse au fil du temps qui passe. La prochaine étape, pour une compréhension globale de la dynamique galactique et ces mystères – origine de la structure spirale, nature de la matière noire qui auréole la Voie lactée  - interviendra avec le lancement de**** la mission spatiale Gaïa en 2013 ou 2014.

Ce satellite européen, qui, si tout se passe bien, mesurera précisément les caractéristiques – distance, mouvement propre, éclat réel, etc - d'un milliard d'étoiles de la galaxie, nous offrira la toute première vision en 3 D de la Voie lactée.

Une longue tradition astronomique

Depuis qu'ils observent le ciel avec des instruments optiques, c'est-à-dire depuis Galilée en 1609, les astronomes sont confrontés à sa démesure. Les grands catalogues stellaires du passé étaient dressés, à la plume d'oie, en pleins et déliés, l'œil à l'oculaire, étoile par étoile, dans la pénombre des coupoles des observatoires de Paris, Nice, Potsdam, Greenwich, Pittsburgh, Vienne, Washington... L'Uranometria de John Bayer, en 1603, comptait un peu plus de mille étoiles, le catalogue stellaire de Joseph-Jérôme Lefrançois de Lalande, 47.390, le Bonner Durchmusterung de Friedrich Wilhem Argelander, 324.188.

Avec l'avènement de la photographie, les compteurs se sont emballés. Au début du XXe siècle, l'entreprise, inachevée, de la Carte du ciel, permit, en quelques dizaines d'années, d'enregistrer quelques millions d'étoiles, et la célèbre Sky Survey, menée dans les deux hémisphères entre 1950 et 1990, a permis la publication du catalogue USNO-B1.0, qui compte très exactement un milliard quarante-deux millions six cent dix-huit mille deux cent soixante et un astres, essentiellement des galaxies, d'ailleurs. Demain, Gaia, puis le télescope LSST (Large Synoptic Survey Telescope), permettront de passer la barre surréaliste des dix milliards d'objets célestes. 

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