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Requins : des scientifiques entre le marteau et l'enclume

Depuis 2011, une équipe de l'Institut de Recherche pour le Développement a été chargée d'étudier le comportement des requins tigres et bouledogues de la Réunion. Ces espèces sont systématiquement mises en cause dans les attaques de surfeurs. Ce n'est pas évident pour ces scientifiques d'étudier ces animaux dans la sérénité. Beaucoup attendent des résultats rapides pour faire baisser le risque d'accidents.
Article rédigé par franceinfo
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Dans les bureaux de l'Université de Saint-Denis, Marc Soria, coordinateur de l'étude CHARC pour l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD), est penché sur son ordinateur. Après avoir placé des émetteurs dans 80 requins-tigres et bouledogues, il va tous les trois mois récupérer au fond de l'eau les résultats des balises d'écoute. Elles lui disent quel requin est passé par ici, combien de fois.

"Nous voyons que les requins viennent près de Saint-Gilles avec une certaine rythmicité. Pendant des périodes de transition hiver-printemps, été-automne ", explique le scientifique. Mais il tempère tout de suite pour dire que ce n'est qu'une piste et qu'il faudra sans doute dix ans avant d'avoir plus de réponses.

Un programme coûteux

Le programme CHARC coûte 800.000 euros et prévoit jusqu'en 2015 d'étudier le comportement de ces requins. Il doit répondre à deux questions : pourquoi attaquent-ils en particulier sur Saint-Gilles, et comment mieux gérer le risque pour les activités humaines ?

"L'urbanisation et la pollution, la réserve marine, l'interdiction de la pêche commerciale au requin ; face à toutes les théories sur pourquoi les requins attaquent, l'État a commandé une expertise scientifique pour objectiviser un peu les choses ", affirme Nicolas Lebiannic, directeur du CROSS de la Réunion.

Pourtant aujourd'hui à la moindre erreur, les scientifiques sont taxés d'être pro-requins, notamment par le maire de Saint-Leu, Thierry Robert. Si l'on pêchait le requin, les scientifiques perdraient l'objet de leur étude, selon ce dernier.

Les scientifiques veulent du temps

Pascale Chabanet, de l'IRD, aimerait bien retrouver un peu de sérénité : "Les échelles de temps ne sont pas les même entre les scientifiques et les élus et associations qui veulent des réponses rapides ", explique-t-elle. Elle s'inquiète aussi du haro sur la réserve marine qu'elle étudie depuis sa mise en place en 2006. Une réserve où les activités de pêche et de chasse sous-marine ont été grandement limitées. "Certes, on revoit des mérous mais le pari de reconstitution du corail n'est pas encore gagné ", affirme la chercheuse.

En revanche, l'urbanisation a apporté plus d'eau douce, souillée par les pollutions humaines. Des pollutions auxquelles le requin bouledogue s'est très bien adapté. Mieux que les espèces présentes avant à la Réunion et qui posaient moins de problème aux surfeurs.

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