Gare du Nord, voie 19, comme unedizaine de fois au cours de la journée, le TER Picardie est à quai et attendses voyageurs. Un train régional vert et gris. Aucune casse apparente.L'intérieur est spacieux avec des fauteuils bleus impeccables. C'est à se demander si on ne s'estpas trompé de voie. Heureusement l'annonce dans les haut-parleurs confirme,nous sommes bien dans le Paris Beauvais" qui fera étape àmi-chemin à Méru.C'est bien ce train qu'on qualifiaitil y a encore trois ans de ligne de non droit, le plus vandaliséde toute la zone Paris Nord. C'était un train où les signauxd'alarmes activés de manière intempestives créaient des retards record enpermanence. "C'était chaque jourdes insultes, des violences, toutes sortes d'incivilités. Certains de mecollègues n'osaient même plus contrôler certains passagers. C'était devenuinvivable" , se souvient Patrice Caussinus, contrôleur et déléguéSud-rail.Une agression qui a tout changéEt puis, il y a eu un point de non retour, un incident très grave : deux contrôleurs sesont fait agressés à Méru. L'un a reçu un extincteur en plein visage. Le seconda été défiguré, violemment frappé à coup de barre de fer un soir sur le quai.L'homme a mis des semaines à s'en remettre. L'agresseur a été jugé et condamnéà de la prison ferme. Cet épisode a traumatisé la profession. Les contrôleurssur cette ligne ont alors décidé d'exercer leur droit de retrait, pendantplusieurs jours. La SNCF et la région ont alorsréagi. Les voyageurs d'aujourd'hui quin'ont pas connu cette époque n'imaginentpas qu'une telle situation ait pu exister. "Je ne savais pas. Moi je le prends cinq fois par semaine, même parfois leweek-end avec mes petits-enfants. Je n'ai jamais vu aucune incivilité. Il n'y aaucun souci" , s'étonne Monique, retraitée habitant Méru.Des moyens importants débloquésIl faut dire que ces trois dernièresannées, de très importants moyens ont été investis pour faire revenir lasécurité. D'abord en gare de Méru, la SNCF ainstallé 16 caméras de vidéosurveillance et créé un poste de gardienmaître-chien. Dans les rames, le nombre decontrôleurs a été quasiment doublé. Aucun train de la ligne ne circule sans laprésence d'au moins quatre agents de la police ferroviaire en uniforme.Enfin,il y a aussi les médiateurs que l'on repère à leurs gilets rouges. Il s'agit de jeunes issus des quartierssensibles de Méru et de Beauvais dont la mission est d'apaiser les débuts deconflits. Ils servent de relais entre les contrôleurs et les usagers en cas delitiges.Il y a eu un avant et un après 2009.Les habitués de la ligne sont unanimes. "Avant j'interdisais à ma mère de prendre ce train. J'avais trop peur pour elle. Je ne voulaispas qu'elle se fasse arracher son sac, ou pire qu'elle croise une bande" ,se souvient Mohammed 26 ans. "Aujourd'hui,il n'y a pas photo, ajoute-t-il, avectous les personnels à bord, elle prend le train contente, en toutesérénité" .Paris-Beauvais, un train comme les autresLe contrôleur Patrice Caussinussalue ce travail effectué sur cette ligne Paris-Méru-Beauvais. Selon lui, celadevrait être un modèle de ce qu'il faut faire pour retrouver la tranquillitésur toutes les lignes sensibles partout en France. "Ce qui n'était pas attendu, c'est qu'en voulant lutter contre laviolence, on a aussi lutté contre la fraude. Les gens sur cette ligne se sontmis à payer leurs billets de train ; cela a fait rentrer de l'argent. Etcela permet même de financer les renforts de personnel et de sécurité. Unautofinancement finalement" , se félicite le cheminot.Dans le passé, selon lui, uncontrôleur muté sur la ligne Paris Beauvais n'avait qu'un objectif entête : en partir le plus vite possible. Aujourd'hui ils restent en postesur ces trains bien plus longtemps. Le Paris-Beauvais est devenu un train commeles autres. D'autres lignes sensibles jalouseraient même les moyens dont ilbénéficie.