Eurotunnel : 20 ans qui ont tout changé
Le tunnel sous la Manche a longtemps été un serpent de mer. Un projet imaginé il y a plus de deux siècles qui a mis du temps à voir le jour. Un ouvrage monumental grâce à la volonté politique et à la détermination de quelques hommes. Philippe Cozette est l'un d'entre eux.
Un cylindre que l'on aperçoit depuis une falaise à Sangatte... Ce vestige de la première tentative de Tunnel sous la Manche date du 19e siècle. Enfant, Philippe Cozette s'était promené là, son père lui avait tout expliqué. C'était son premier contact avec ce projet fou. En 1973, il suit avec attention de nouveaux travaux lancés de chaque côté de la Manche. Là encore, c'est un échec.
Arrive 1981 et un nouveau président, François Mitterrand, qui au détour d'un discours sur les trains à grande vitesse glisse cette phrase : "Je souhaite que soient reprises les études préliminaires pour la liaison à grande vitesse vers le Nord de la France et la Belgique puis dans l'avenir, nous ne rêvons pas, vers l'Angleterre, si le projet franco-britannique de tunnel sous la Manche est adopté, ce que je souhaite ".
Cette fois, Philippe Cozette y croit. Il se fait embaucher comme conducteur d'engins pour les travaux d'approche puis il devient tunnelier. L'un de ceux qui se trouvent au plus près de Brigitte, la gigantesque foreuse qui perce sous la Manche en direction de l'Angleterre.
Champagne et drapeaux sous terre
En novembre 1990, la jonction avec les ouvriers anglais approche, la direction veut un ouvrier du cru pour finir le travail. Celui qui, le premier, serrera la main de son homologue britannique. C'est Philippe Cozette qui est choisi : "Je me souviens de mon directeur qui me dit : 'ça va te changer la vie'. Je n'imaginais pas à quel point. J'ai eu les jambes coupées pour le reste de la journée. Je me demandais ce qui m'arrivait. Il fallait que quelqu'un le fasse, bon ben j'y vais ."
Ambiance beaucoup plus guindée, trois ans et demi plus tard. Le 6 mai 1994, les deux premiers Eurostar se rejoignent en gare de Coquelles, l'entrée française du tunnel. L'un arrive de Lille avec François Mitterrand à son bord. Dans l'autre, la reine d'Angleterre. C'est la cérémonie officielle d'inauguration .Elizabeth II fait son discours en français : "*C''est la première fois dans l'Histoire que les chefs d'Etat de France et de Grande-Bretagne se rencontrent sans avoir dû prendre le bateau ni l'avion.* " "Les gens de l'extérieur ne réalisent pas à quel point l'œuvre est grandiose" Cinquante kilomètres sous la Manche et des trains qui filent à 160 km à l'heure. Plus de 10 millions de passagers l'ont emprunté en 2013. Vingt ans après son inauguration, le tunnel fait partie du paysage. Trop même pour Philippe Cozette. Après avoir participé à sa construction, il a travaillé pour Eurotunnel jusqu'en 2006. Il voudrait maintenant un musée pour raconter l'incroyable chantier, la prouesse technique. "*Les gens de l'extérieur ne réalisent pas ce qui a été fait sous terre et sous la mer. Ils ne réalisent pas à quel point l'œuvre est grandiose. Quand je passe à côté, je ne peux pas m'empêcher de regarder en direction du portail. C'est plus fort que moi. C'est instinctif. Jusqu'à la fin de mes jours, à chaque fois que je passerai sur le pont, je regarderai en direction du tunnel.* " Désormais retraité, Philippe Cozette sait qu'il a vécu une fabuleuse épopée. Il se dit littéralement "*imprégné de l'histoire du tunnel.* "
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