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Cinéma week-end. William Benedetto : " La période avec le virus va durer, laissez nous exercer nos métiers"

William Benedetto, directeur de "L'Alhambra, cinéma d'art et d'essai installé dans les quartiers nord de Marseille, ne reste pas inactif malgré la crise sanitaire. 

Article rédigé par franceinfo, Thierry Fiorile
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
William Benedetto, directeur du cinéma "L'Alhambra" à Marseille (Yohanne Lamoulère@tendancefloue)

La salle du cinéma de L'Alhambra à Marseille, actuellement fermée en raison de la crise sanitaire, a aussi une mission éducative et culturelle ,et accueille en temps normal 7 000 élèves de la maternelle au lycée. Faute de pouvoir les accueillir, L’Alhambra va vers eux. 

franceinfo : Comment maintenez-vous le lien avec cette partie de votre public ?  

William Benedetto : On ne peut le faire chez nous, donc on a inversé la proposition et c’est nous qui nous baladons, nous allons dans les établissements pour faire vivre quelque chose qui ressemble à la séance de cinéma, même si le vécu de la salle n’est pas le même.

On a construit un dispositif qui s’appelle la mission Gagarine, du nom du film qui porte ce nom, c’est l’un des films qui sont sur les étagères des distributeurs en attente de pouvoir vivre, trouver leur public. C’est un premier long métrage de Fanny Liatard et Jérémy Trouilh qui fait partie de la sélection de Cannes 2020, que nous aimons beaucoup, et que nous voulons accompagner du mieux possible, quand on pourra le faire ici dans la salle.

Pour préparer son arrivée en, salles, nous allons dans des établissements, essentiellement des collèges et des lycées, mais aussi dans d‘autres lieux, de la prison des Baumettes à Coco Velten, qui est un lieu d’innovation sociale à Marseille.

La salle du cinéma d'art et d'essai L'Alhambra de Marseille.  (OFFICE TOURISME MARSEILLE)

On arrive avec une clé USB sur laquelle il y’a deux courts-métrages, qui ont été réalisés par les réalisateurs de Gagarine. Avec ces deux courts de 15 minutes chacun, on propose une projection de 30 minutes, précédée et suivie d’un moment de parole. On présente, on explique et après, on accueille les retours des spectateurs, et même si parfois les conditions de projection ne sont pas terribles, on assume, on accepte, ça fait partie du pari.

Le plus important, c’est de faire exister un moment de cinéma. Ça représente une centaine de séances, 1 500 spectateurs, ça crée des moments d’émotion avec des personnes qui nous disent qu’elles retrouvent un petit peu cette émotion particulière qu’on ressent quand on va au cinéma, qui n’est pas la maison, le salon, ni la chambre, ni l’écran du portable, de l’ordinateur ou la télévision.

C’est une belle aventure, on est très contents de la mener encore pendant un mois mais surtout avec l’espoir qu’on va passer à la phase deux de la mission, l’ouverture de la salle, montrer le film et accueillir les réalisateurs.

On essaie d’inventer des actions pour ne pas sombrer, ne pas avoir l’impression d’être complétement inutiles. On s’habitue à tout, mais il y a un moment où vient une interrogation sur le pourquoi du comment…

William Benedetto, directeur du cinéma L'Alhambra à Marseille

La crise sanitaire et les cinémas en France. Toutes les salles sont fermées. Illustration (MAGALI COHEN / HANS LUCAS / AFP)

On sent de la tristesse, mais aussi de la colère, vous pensez qu’on devrait au moins pour les scolaires vous autoriser à rouvrir ?  

J’ai envie de dire oui, j’aimerais redémarrer ce travail avec les scolaires, c’est très important à tout point de vue, mais c’est contradictoire. Si on ne rouvre que pour les scolaires, ça interroge le statu de ce type d’équipement, je ne veux pas me cantonner à ne faire que ça. S’il faut commencer par ça, si c’est une façon de mettre le pied dans la porte, oui, mais pour moi l’objectif principal c’est que le lieu puisse être ouvert à toutes et à tous.

On entend parler de passeport sanitaire dans la phase qui va suivre, l’idée de devoir faire un contrôle à l’entrée c’est impossible, ce n’est pas dans notre façon de fonctionner, dans notre ADN. Donc, oui, si redémarrer avec les scolaires c’est une façon de réamorcer la pompe, mais avec l’objectif le plus vite possible de retrouver un rapport au public. Il est vraiment important de redémarrer pour nous, le public, les distributeurs, les producteurs.

Oui il y’a une forme de colère, mais je n’ai pas envie d’être dans un affrontement, j’ai plus envie de faire valoir des arguments pour faire pencher la balance. Nous sommes dans une période où on est avec ce virus, elle va durer, s’il vous plait, essayez de faire en sorte que nous, les salles de cinéma, mais aussi les lieux de spectacles, les musées, les bars, les restaurants, on puisse à minima exercer nos métiers, et faire en sorte que la vie sociale soit le moins dure possible pour l’ensemble des habitants de ce pays.  

L'Alhambra

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