Cinéma week-end. Merveilleux "Loving", inquiétant "Dans la forêt".
Jeff Nichols croise la grande histoire et une très belle histoire d'amour, Gilles Marchand filme le fantastique à hauteur d'enfant.
Et si le scandale aujourd'hui c'était la pudeur ? Il y a, autour de la sortie de Loving une sorte d'incompréhension, comme si Jeff Nichols était pris en flagrant délit d'académisme, alors que son plus grand mérite dans ce film est de revisiter puissamment le classicisme. Quand récemment Nate Parker montrait sans retenue toute l'horreur de l'esclavage aux Etats-Unis dans Naissance d'une nation, Jeff Nichols évoque un épisode de la ségrégation dans les années 50 sans jamais filmer la violence physique.
Il suffisait de témoigner de deux gens qui s'aiment
Jeff Nichols
Son sujet c'est l'amour, celui qui unit Mildred et Richard Loving, ça ne s'invente pas. Couple mixte qui, n'ayant pas le droit de se marier en Virginie, le fait dans l'Etat voisin et se voit persécuté à son retour. Convaincus de porter leur légitime combat jusqu'à la cour suprême où ils obtiendront gain de cause, ils ne sont pas militants. Jeff Nichols filme la violence symbolique, la douleur rentrée et ne tombe ni dans le mélo ni le romantisme politique, car il a tout simplement voulu être fidèle à ces deux personnages.
Question de style encore avec Dans la forêt de Gilles Marchand qui mélange les genres. Son film se situe entre le fantastique et la chronique contemporaine des rapports père-fils. Jérémy Elkaïm incarne un père divorcé qui reçoit pour les vacances en Suède où il vit, ses deux garçons. Il les emmène dans une inquiétante maison, dans la forêt.
Enfant on a tous eu un peu peur d'un adulte, voire de ses propres parents
Gilles Marchand
On a déjà évoqué l'incroyable performance de Thimothé Vom Dorp, même pas 10 ans, c'est dans son regard que Gilles Marchand filme la folie de ce père à moitié ogre, ça donne le frisson, même aux grands et pas seulement parce qu'un fantôme rode dans ces grands espaces sombres. Le réalisateur réveille nos peurs enfantines et laisse beaucoup de place au mystère.
Question de style et de fantômes aussi dans Fukushima mon amour de l'allemande Doris Dörrie, film en noir et blanc, ou la très improbable rencontre entre une clown et une ancienne geisha. L'une vient d'Allemagne pour divertir les victimes de la catastrophe, mais ses valises débordent de pathos, l'autre se moque des radiations et veut retourner dans sa maison. Le passé de la japonaise est beaucoup plus intéressant que le présent de cette touriste humanitaire.
Enfin avec David Lynch, the art life c'est le style et les fantômes de l'un des plus mystérieux réalisateurs qu'on découvre en l'écoutant raconter ses jeunes années américaines, arts plastiques, musique, cinéma, le maître Lynch se dévoile, son obsession : la liberté artistique, ce qui explique son absence au cinéma depuis 11 ans.
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