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"Les arbres, l'exode et la France libre" : voter corrézien même de loin

Ils votent extrême-gauche ou libéral mais trouvent des mots très proches pour évoquer l'influence de leur origine corrézienne sur leur identité citoyenne. Rencontre avec des électeurs qui se vivent corréziens de loin.
Article rédigé par franceinfo
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Jean-Louis est formel, presque rigolard qu'on pose la question : "Evidemment, qu'on en part, de Brive. C'est le jeu. Pourquoi rester? " Aujourd'hui âgé de 36 ans, il a quitté la Corrèze à 18 ans : Paris et Limoges pour les études, puis Toulouse où il vit aujourd'hui.

Au final, Jean-Louis a passé la moitié de sa vie loin de son terreau famillial, et pourtant, aujourd'hui, c'est toujours là où il a grandi à quelques kilomètres de Brive, qu'il vote. Rester inscrit à 200 kilomètres de là où il a fait sa vie s'impose à lui avec la même évidence que l'éloignement à l'âge adulte : en Corrèze, la vie politique a "encore du sens ", par exemple parce qu'il s'agit d'hommes, à la différence des grandes villes.

Ni FN ni abstention

Sophie, la soeur de Jean-Louis, est incrite, elle, sur les listes électorales à Paris il y a dix ans, de retour des Etats-Unis où elle avait fait ses débuts dans la finance. Même si le bureau de vote de Sophie se trouve à deux pas de chez elle, elle se sent toujours très corrézienne une fois dans l'isoloir. Rien à voir avec une prime quelconque à ceux qu'on appelle les "candidats de la ruralité " ("Les gens ne sont pas si naïfs ").

 

Si la Corrèze imprègne encore le regard civique de cette jeune chef d'entreprise, c'est davantage pour le refus du FN ("Evidemment pas être une option : la ligne démarcation entre la France libre et occupée était à deux pas, ça exclue forcément l'extrême-droite ") ou par sens moral. Etre une femme et être originaire de Corrèze se conjuguent en effet chez Sophie pour faire de l'acte civique "un geste fondamental ".

 

Un certain sens de l'ouverture

Fille d'un père élu local divers droite, elle a plutôt été fidèle à la droite jusqu'à présent, mais s'est résolue il y a seulement quelques jours à voter Sarkozy au premier tour.

Longtemps, toutefois, elle avait laissé "toutes les options ouvertes ", à l'exception de bulletins extrême-gauche et extrême-droite.

Elle qui parle de nombreuses amitiés "très engagées à gauche " situe du côté de Brive les racines de son ouverture. Elle fustige ce qu'elle appelle "le microcosme parisien", "tellement partisan ". Pour expliquer comment le bain corrézien peut avoir façonné son besoin de dialogue avec "les idées d'en face", Sophie utilise des mots qui font écho à ceux qu'emploie Eric pour parler des clivages politiques.

 

Ce francilien de 46 ans ne vote pourtant pas comme Sophie. Syndicaliste, il ne dira pas à qui iront ses faveurs en mai mais se classe explicitement à gauche. Mais ancre lui aussi son sens de l'amitié "y compris avec des gens de droite " quelque part entre Brive et Tulle, où il a grandi. Une terre qui a aussi fondé son sens de l'engagement, il en est certain. Jean-Louis, lui, ne sait pas encore pour qui il se décidera. Mais une chose est sûre : "la nature, le sens du respect, la relation aux gens, la droiture " forgeront son choix. Des mots qui ont pour tous les trois davantage de sens que l'étiquette "terroir" qui fleure trop le marketing.

 

Aucun des trois n'est certain de revenir un jour s'établir en Corrèze mais tous continuent à se dire "corrézien " de loin.

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