"Hésiter sur son vote procure un certain confort"
D'abord, Nathalie, ou plutôt , m'a contactée sur Twitter. Elle n'a rien d'une geek, et venait d'arriver sur le réseau social "pour essayer ". Pour se frotter aux journalistes, aussi, même si ces derniers se sont un peu fait prier pour lui répondre. Un peu moins de deux mois avant le premier tour, cette Parisienne de 40 ans a pourtant tenu quotidiennement son "journal " sous forme d'un blog.
Pas à pas, elle a cherché à raconter ce qui l'animait à mesure que défilait la campagne électorale. Car Nathalie avait décidé pour cette présidentielle de se laisser cheminer tranquillement. De s'autoriser à se laisser imprégner des programmes au point d'envisager "toutes les options ". Procédant par élimination, elle a aussitôt évacué "les extrêmes ", "trop sectaires ", mais "la porte était ouverte" d'Eva Joly "peut-être plus à gauche que Mélenchon " à Nicolas Sarkozy.
Notre première rencontre remonte au samedi 14 avril, une semaine précisément avant le premier tour. Ce jour-là, elle avait exclu Jean-Luc Mélenchon et sans doute Nicolas Sarkozy. Du premier, elle disait par exemple qu'il était "intéressant mais un peu aberrant économiquement "... et que "on verrait " pour les législatives. De François Bayrou, qui l'intéresse grandement pour "son bon sens ", elle dira aussi que le centre, "moins partisan ", lui semble plus constructif, car à même de voter "sur le fond d'une mesure ". Dans un monde idéal, elle militerait pour la proportionnelle, mais la jeune femme se méfie de l'arrivée du Front national à l'Assemblée nationale.
"Sans le Net, rien n'aurait été possible"
Au fil des semaines, Nathalie a consacré plus de deux heures par jour à cet exercice d'écriture sous-tendu par un authentique travail de recherches. Sans le Net, rien de tout cela n'aurait été possible, elle en est certaine. Elle a (re)visionné des dizaines d'heures de meeting en streaming, débusqué le décryptage de chaque point de programme. Car la blogueuse, toute à son indécision, a dépiauté propositions et postures "en faisant comme si chaque candidat était susceptible d'arriver à l'Elysée ".
Nathalie, qui assume parfaitement avoir "à peu près tout voté des écologistes jusqu'au RPR " dans sa vie, n'avait jamais consacré autant de temps à une élection. Jamais tant choisi non plus "en son âme et conscience mais surtout en conscience ". Un travail fastidieux mais "stimulant intellectuellement " qui l'a prise au dépourvu lorsqu'elle qui pensait être sévère avec les médias a mesuré "le peu de réflexion que chacun a devant sa télévision ou devant sa radio ".
"Les indécis réflechissent"
Après près de huit semaines d'exercice qui a pu virer à l'astreinte, elle n'est pas certaine de remettre ça pour une autre élection mais a découvert avec plaisir que la presse et même les analystes politiques se montraient finalement plutôt respectueux envers les indécis. Qu'ils leur faisaient de la place, à l'instar de l'universitaire Vincent Tiberj qui expliquait dans L'Express le 16 avril que "l'hésitation montre que les électeurs réfléchissent ".
Corollaire d'une décision qui ne coulait pas de source, Nathalie n'a pas exhulté dimanche 22 avril, lorsqu'est arrivé en tête celui vers qui son choix s'est finalement porté. Hollande, son "choix raisonnable", est arrivé en tête mais ce dont m'a parlé Nathalie, 48 heures après la soirée électorale, c'est du "confort" et de la "liberté" qu'elle aura finalement goûté à se laisser hésiter :
"Ca m'a fait du bien de me dire non, je n'ai pas d'a priori, je peux écouter quelqu'un. Ca permet de remettre en cause tous ces vieux schémas familliaux, de se libérer de tout ce qui a emprise sur nous. Ca libère pas mal de choses."
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