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Bastien, 27 ans : "Mélenchon est le seul à faire de la politique"

Bastien et Sam se préparent à voter Mélenchon le 22 avril. Parce que le premier tour n'a rien d'un calcul arithmétique pour eux qui continuent à chercher "un souffle" et balayent les injonctions d'un vote qu'on dit utile.
Article rédigé par franceinfo
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Après une année de formation à Marseille, Bastien a trouvé son premier poste de prof de maths à Champigny-sur-Marne, une "une banlieue coco et pépère " à l'ouest de Paris où il est né. Ses parents y vivent encore, son père y milite toujours à la section locale du PCF, et lui-même y est resté inscrit sur les listes électorales même s'il vit aujourd'hui dans le XIXème arrondissement à Paris.

A Champigny, Bastien vote communiste aux élections locales, tropisme local, "bonne gestion sympa " et héritage famillial obligent. En 2007, en revanche, il avait renoncé à voter pour le PCF :

"Marie-George Buffet  était trop consensuelle , pas assez conflictuelle ".

C'est chez Jean-Luc Mélenchon, transfuge du PS (parti pour lequel il ne lui est jamais venu à l'idée de voter au premier tour) que Bastien retrouve le rapport de forces qu'il cherchait en vain depuis ses 18 ans et des velléités d'engagement vite enfouies après quelques réunions au Jeunesses communistes. De Mélenchon, il aime la dialogue rugueux avec les médias, la rage dans le discours et l'urgence d'un programme qui remet au centre les classes sociales que la social-démocratie avait enterrée : "Mélenchon est le seul à faire de la politique, au fond."

Réalisateur installé à quelques pâtés de maison de chez Bastien, dans le XVIIIème arrondissement, Sam aussi votera Mélenchon. À 33 ans, il a souvent voté blanc ou nul, mais s'est toujours déplacé. Parfois, il a tranché dans l'isoloir. Rien d'incongru dans cette décision de dernière minute : un électeur sur sept fait de même, d'après les sondages de sortie des urnes. Car Sam est certain d'être "de gauche ", mais ne s'y retrouve pas dans l'offre politique. La question elle-même lui arrache une moue :

"On en vient à parler politique comme on parlerait de produits de supermarché, tout cela manque de profondeur."

Alors, Sam comme Bastien cherchent à revitaliser une fibre politique trop peu stimulée. Pour Sam, la politique se vit de plus en plus loin des bureaux de vote : être de gauche est aujourd'hui affaire de réseaux et d'élans individuels qui s'agglomèrent pour doubler les partis par la gauche.

Bastien, lui, aimerait trouver à s'engager, sent confusément qu'un supplément de militance le conforterait. Un grand-père résistant communiste et déporté, une autre branche bolchévique et ashkhénaze et des parents "qui en sont toujours au pouvoir des soviets " lui inspirent en substance qu'il n'est pas normal de se situer nulle part. Mais aucune officine et pas même Attac ne suffit à lui donner envie de se lever tôt le matin pour sortir distribuer des tracts.

Les jours de manif, ce prof qui vient de rejoindre la CGT après des débuts à SUD-Education, fait grève et descend manifester. Mais le souffle s'émousse, faute de rapport de force. Et pourtant, lâche-t-il :

"Il va tout de même falloir faire quelque chose ".

Faire quelque chose, donc ne pas voter utile, glisse celui qui trouve "intellectuellement faible et profondément insultant " qu'on ne cesse de lui opposer le spectre du FN pour le ramener plus au centre.

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