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Ça nous marque. "La Vache qui rit" a 100 ans

Olivier de Lagarde reçoit Béatrice de Noray, directrice générale de BEL France qui fabrique "La Vache qui rit". 

Article rédigé par franceinfo, Olivier de Lagarde
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Logo de la Vache qui rit. (Illustration) (PHILIPPE ROY / AFP)

La Vache qui rit, c'est un fromage, qui n'est peut être pas un sommet de gastronomie, mais qui, en 100 ans d'existence, aura marqué des générations de Français, et pas seulement, puisqu'il est vendu dans 120 pays.

franceinfo : Béatrice de Noray, vous êtes la directrice générale de BEL France, qui fabrique la célèbre Vache qui rit. Cette crème de gruyère, comme on disait autrefois, l'une des premières marques de fromage industriel au monde, dont on consomme 121 portions chaque seconde. Et si la vache qui rit a 100 ans, ça veut dire qu'elle est née en 1921. Son concepteur, c'est Léon Bel. Qui est- il ? 

Béatrice de Noray : La famille Bel, c'est une famille jurassienne installée à Lons-le-Saunier. En fait, Léon Bel, qui a repris l'entreprise familiale, sort de la Première Guerre mondiale comme il avait l'usage de le dire, "les poches vides et les caves pleines", et les caves pleines de fromages maturés qui n'ont pas trouvé preneur. Et il a la bonne idée au bon moment, à savoir utiliser cette recette de fromage fondu qui vient de Suisse pour transformer ses fromages, qui sont dans ses caves, et pouvoir ainsi les stocker, puis les transporter plus facilement, non seulement dans son environnement, puis à travers la France, puis à travers le monde. 

Ce nom de Vache qui rit ? D'où vient-il ? 

Pendant la Première Guerre mondiale, Léon Bel était dans le régiment du train, et les trains avaient des logos, des dessins. A l'époque, on ne parlait pas de logo. Et quand il y avait des wagons avec de la viande dedans, il y avait des vaches dessinées dessus, par ironie pour les Valkyries allemandes, et donc c'est inspiré de cette vache qu'il voyait sur les régiments du train qu'il a demandé à Benjamin Rabier de lui dessiner cette vache hilare qui rit rouge, avec ses cornes.

Une vache pour se moquer des Allemands quand même ?

Une vache, en référence à ce qu'il avait vécu effectivement pendant la guerre. 

C'est quand même un génie du marketing. Parce que cette vache qui rit, ça fonctionne encore ?

100 ans après, La Vache qui rit, c'est à la fois le même produit, mais qui a su évoluer au fil du temps. Je pense qu'effectivement, ce qui caractérisait Léon Bel, c'était trois choses. C'était un sens de l'innovation. On parlait de cette crème de gruyère qui, après, se transforme en portions triangulaires et qui permet encore mieux de voyager, de doser, d'avoir la juste consommation, et puis d'être accessible à tous. Donc, ce sens de l'innovation, cette capacité aussi à faire de la réclame. À l'époque, on ne parle pas de marketing, mais il a été un des inventeurs du marketing et cette réclame qu'on voit à travers les époques. 

Les affiches d'époque restent d'une étonnante modernité...

Aujourd'hui on revoit beaucoup d'artistes contemporains qui réinventent La vache qui rit. Et puis le dernier point du succès, c'est vraiment cette capacité à voyager à travers le monde, à exporter. Quand vous arrivez à l'aéroport d'Hanoï, généralement un guide vietnamien, la première chose qu'il vous montrera avec fierté, c'est l'usine Vache qui rit que nous avons là-bas. 

Oui, c'est incroyable, La Vache qui rit a conquis le monde. Pourquoi ? Parce qu'elle a un goût, finalement un peu passe-partout ?

Elle a un goût unique, qui est très reconnaissable qui est ce savoureux mélange de fromage, de lait et de beurre pour la texture, elle peut être utilisée de plein de façons différentes. Alors, on a la tartine du petit déjeuner, la tartine du goûter, en fin de repas. Et puis aussi, toutes les recettes à base de Vache qui rit : qui n'a pas déjà goûté une soupe de courgettes à La Vache qui rit. Et on l'a vu notamment dans la période 2020, de l'importance de la cuisine à la maison avec différents ingrédients. 

Parce que vous avez beaucoup vendu de Vache qui rit pendant cette année un peu particulière ?

On a eu un peu deux phénomènes. On a eu un phénomène, effectivement, du retour de la cuisine à la maison, avec une versatilité de notre produit qui permet d'utiliser de plusieurs façons, notamment pour les familles. Alors, on est une marque achetée aux 2/3 par des adultes, consommée aux 2/3 par des adultes. Mais La Vache qui rit, en 2020, c'est la marque qui a recruté le plus d'enfants. Après, c'est un peu plus mitigé parce qu'on est aussi présent au restaurant, dans les écoles, dans les maisons de retraite. Et là, évidemment, c'est plus contrasté au niveau des résultats. 

Vous avez 15 usines dans le monde. La Vache qui rit a le même goût partout ? 

Pas du tout. Alors il y a une base commune, évidemment, la recette du fromage fondu. Mais on a 110 recettes et plus de 2 500 déclinaisons. Et en fait, suivant les pays, et des besoins de consommation, des besoins nutritionnels, par exemple, après guerre, le produit avait plus de matière grasse, on avait besoin de re-nourrir la population.

On a des pays où on rajoute effectivement plus de nutriments, en raison des déficiences alimentaires. Et quand on est par exemple dans les maisons de retraite, on rajoute du calcium pour enrichir le produit. Donc, on a toujours des petites variations au niveau de la recette. Et puis aussi, on commence à élargir notre gamme avec un mix à l'étranger entre de la protéine laitière et de la protéine végétale pour avoir une alimentation plus diversifiée.

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