Elle a 90 ans, les cheveux défaits. Elle signe ses livres depuis des heures. Nous sommes au Salon de la Photo. Sabine Weiss, dont l'image de ce cheval cabré restera collé à sa carrière, a plein d'enfants en elles. Toutes ces petites filles, attrapées dans son appareil photo, sont un peu elle. La petite Suisse partie à la conquête de Paris. La fille d'un chimiste qui lui apprendra à bricoler son materiel. La petite débrouillarde, espiègle, peu domptable, mariée à un artiste."Ils ont trouvé une fluidité entre eux", me dit leur fille, présente au Salon de la Photo.Quelle chance! Car bien souvent, deux artistes en cage, s'il n'y a pas de fluidité et d'égalité, à un moment ça casse. Sabine Weiss a en elle la même simplicité que ses images. Elle: "Vous voulez juste une signature, ou quelques mots?".Moi: "heuuu...j'aime la photo passionnément, un petit texte s'il vous plait...".Je sors mon I pHone, un peu honteuse..."Je peux?".Elle: "Mais oui aucune problème..je me fiche que ce soit un portable, c'est bien aussi".Chez elle, aucun snobisme, pas de caste. De la fluidité. Dans un livre d'entretien, elle le dit: "j'aime que mes photographies soient très lisibles, mais qu'elles disent le sentiment de la personne". Je me lance: "J'ai envie de vous revoir"."Avec grand plaisir"."Et là vous partez en voyage? vous allez ou?""Là, je rêve de mon lit, trop de signatures..."Espiègle Sabine.