Trois médecins du travail mis en cause par des employeurs
Cette affaire pose des questions sur le rôle du médecin du travail. A quoi sert-il ? Peut-il être vraiment indépendant ?
En tout cas, voici l'histoire. Le médecin du travail de la centrale nucléaire de Chinon est mis en cause par un employeur, Orys, un sous-traitant d'EDF. Il a été convoqué devant le Conseil de l'Ordre des médecins, le 7 mai dernier, à la demande de cet employeur, pour "répondre de ses actes". Le médecin a refusé de s'y rendre.
En décembre 2011, le Docteur Huez reçoit en urgence un salarié. L'homme est très dépressif. Et le médecin fait le lien entre son état et ses conditions de travail. Il écrit dans son certificat médical que c'est son travail, la façon dont on lui fait faire son travail, qui l'a rendu malade. "L'enchaînement de pratiques de "maltraitances de son entreprise en l'éloignant par rétorsion de son domicile, en lui imposant une fonction pour laquelle il n'a pas de compétences professionnelles et un non-emploi de ses compétences de chargé de travaux, ne peut qu'aggraver de façon délétère les conséquences de sa pathologie psychopathologique post-traumatique ", écrit le médecin. Et le problème c'est que, muni de son certificat médical, le salarié a saisi le conseil des prud'hommes et réclame des dommages et intérêts.
Deux autres médecins du travail sont dans ce cas : convoqués devant le Conseil de l'Ordre à la demande d'employeurs pour avoir établi des certificats médicaux qui faisaient le lien entre les conditions de travail et l'état de santé des salariés. Du coup une pétition circule : plus de 5000 signatures recueillies en une semaine, ce qui est énorme dans le petit milieu de la santé au travail.
Le docteur Huez, celui qui est mis en cause dans la centrale de Chinon, y voit une "offensive des employeurs " pour que les médecins ferment les yeux sur des conditions de travail qui se durcissent. Il estime que, en lui demandant de s'expliquer, "le Conseil de l'Ordre (l')amène à transgresser le secret médical ".
François Desriaux, directeur de la rédaction du magazine spécialisé Santé et travail, estime pour sa part que "certains employeurs essaient de punir des médecins du travail ou de les dissuader d'écrire des certificats qui risquent d'être produits en justice ".
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