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Deuil : plus de difficultés en raison de la perte de rites funéraires collectifs

Et si les cérémonies en l’honneur de la reine Elizabeth étaient l’occasion de rappeler l’importance des rites funéraires pour tous ceux qui sont confrontés au décès d’un proche ? 

Article rédigé par franceinfo - Géraldine Zamansky
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Dans notre société, la perte des rites funéraires serait à l’origine d’une augmentation des deuils dits compliqués, explique Géraldine Zamansky. Avec le problème grandissant des fins de vie à l'hôpital. (Illustration) (PHILLIPPE LISSAC / STONE RF / GETTY IMAGES)

Géraldine Zamansky, journaliste au Magazine de la Santé sur France 5, et chaque weekend sur franceinfo, évoque aujourd'hui les grandes difficultés du deuil pour les familles dans notre société, en particulier depuis que les rituels funéraires et les temps de recueillement autour de nos morts se sont réduits. 

franceinfo : Chaque défunt et chaque famille endeuillée mériteraient presque un hommage royal ?

Géraldine Zamansky : Bien sûr, c’est impossible. Mais il faudrait un plus juste milieu. Pour les citoyens normaux, l’évolution de la société a réduit plusieurs temps traditionnels de rassemblement autour des morts. Et cette perte de rites funéraires collectifs serait à l’origine d’une augmentation des deuils dits compliqués. C’est-à-dire de plus grandes difficultés à survivre à un être cher. Parmi les évolutions problématiques, la part majoritaire des fins de vie à l’hôpital.    

Or, ces circonstances ne facilitent plus la veillée collective du corps au domicile par exemple. Ce rituel, pratiqué par les générations précédentes, permettait de faire ce qui demande ces jours-ci des heures d’attente à certains de nos voisins : voir le corps. Lorsqu’il s’agit d’un proche, cette vision peut être éprouvante mais elle contribuerait à "certifier" la réalité du décès. À concrétiser la rupture. Comme le savent bien ceux qui vivent le drame d’une disparition, et qui parlent d’un deuil impossible…  

Mais une forme de veillée peut encore s’organiser dans des établissements spécialisés ? Et puis les obsèques remplissent aussi cette fonction ?

Vous avez raison, des lieux existent, parfois gratuitement à l’hôpital, juste avant le transport, pour saluer le défunt avant la fermeture du cercueil. Et l’avantage du groupe, composé de personnes plus ou moins affectées, c’est qu’il crée un soutien. L’ensemble peut tout à fait se déployer dans le cadre des obsèques.

Mais là encore, la baisse actuelle des pratiques religieuses complique cette étape. Matériellement, à moins d’avoir une très grande maison, il est difficile de se trouver un lieu presque gratuit comme une église pour se réunir ! Et bien sûr, au-delà des murs où elle se pratique, la foi peut apporter la certitude de retrouvailles à venir par exemple, au lieu d’une absence dépourvue de sens.  

On pense forcément aux proches des personnes décédées du Covid-19 pendant les pics de l’épidémie. Ils ont presque été entièrement privés de rituel ?

Pendant les pires semaines du confinement, les restrictions ont pu empêcher l’accompagnement des derniers instants, parfois même de voir le corps, et de faire une cérémonie. Les souffrances des personnes concernées ont été auscultées par l’étude Covideuil. Ces personnes ont augmenté leur consommation de médicaments anxiolytiques et antidépresseurs. Et près de la moitié demande un soutien psychologique, selon des premiers résultats publiés cet été. Pour les aider, il faudrait peut-être au moins, comme dans d’autres pays, que la France rende un hommage national à ses plus de 150.000 morts du Covid.                                                                  

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