Nadezhda Kutepova alerte depuis 15 ans sur les dangers du site de Maïak, dans l'est de la Russie. Cette militante russe des droits de l'homme a créé une ONG, Planète de l'espoir, pour défendre les victimes de la catastrophe de 1957. A l'époque, une terrible explosion s'était produite sur le site nucléaire militaire de Maïak, tenu au secret.Les autorités mettront plus de 16 ans à reconnaitre les faits. Près de 60 ans après l'explosion, il y a encore des conséquences. "Une fille de six ans est morte d'un cancer du foie. Son cancer a été lié au fait que sa grande mère avait travaillé pour le nettoyage de la catastrophe de 1957", assure Nadezhda Kutepova. Il y a deux ans, la militante a été placée sur la liste des agents de l'étranger parce que son association était en partie financée par des ONG d'Europe de l'Ouest.J'ai dû partir précipitamment de Russie avec mes enfants. Les médias russes m’ont accusée d’espionnage. J’aurais pu être accusée de trahison par l’EtatNadezhda KutepovafranceinfoAujourd'hui, Nadezhda préfère prendre rendez-vous avec franceinfo dans un lieu public, même si elle vit plus sereinement en France avec ses enfants.Une pollution encore en cours en EuropePour Nadezhda Kutepova, qui vient d'Ozersk, la ville fermée créée pour les travailleurs de Maïak, il y a peu de doute sur le fait que le site pollue encore l'environnement, et ce jusqu'en Europe de l'Ouest.Tous les territoires situés autour de Maïak auraient dû être évacués avant cette situation, parce que la zone est très contaminée par l'activité quotidienne de MaïakNadezhda KutepovafranceinfoL'immense site de Maïak compte deux réacteurs, des sites de stockage de déchets nucléaires, des usines, notamment une de retraitement de combustible usé. Pour Nadezhda Kutepova, c'est sans doute de là que vient la fuite de ruthénium constatée en Europe en septembre. Le ruthénium est un radioélément qui vient de ce processus de retraitement.Silence et négation du problème par la RussieLa semaine dernière, les services météorologiques russes ont reconnu la présence du ruthénium dans l'air, mais Rosatom, l'agence fédérale de l'énergie atomique, nie le moindre problème. Le sujet est également tabou au sein même de la population d'Ozersk, la ville fermée, où la militante a vécu 43 ans.La société est fermée et très patriotique. Il y a une idéologie spéciale qui consiste à garder le secret dans n'importe quelle situation. On a été élevés pour la production nucléaire, on était patriote de notre usineNadezhda KutepovafranceinfoPlusieurs agences de radioprotection comme l'IRSN en France, mais aussi le ministère de la Sécurité allemand, ont remonté la piste de cette radioacitivité à des doses assez fortes autour de Maïak. Pourtant l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) ne compte pas faire d'inspection sur place. Pour Nadezhda Kutepova, comme pour certains experts du nucléaire d'Europe de l'Ouest, il est toujours aussi difficile de savoir ce qui se passe vraiment sur les sites nucléaires russes plus de 30 ans après la catastrophe de Tchernobyl.