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C'est dans ma tête. Dénoncés publiquement

Les accusations médiatiques de viol, portées contre des hommes politiques ont fait récemment polémique. Claude Halmos se penche sur les conséquences d'un tel phénomène.

Article rédigé par franceinfo, Claude Halmos
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Le hashtag MeeToo, créé en octobre 2017, par une actrice à Hollywood a lancé un mouvement mondial de dénonciation du harcèlement et des agressions sexuels. (GETTY IMAGES)

Les accusations médiatiques de viol, portées contre des hommes politiques ont fait récemment polémique. Il faut différencier deux choses : le fait que des femmes harcelées ou violées portent plainte. Et la publicité, anormale et dangereuse qui, avant même toute intervention de la justice, peut être donnée à leurs accusations.

Pourquoi cette publicité est-elle dangereuse ? 

Elle est dangereuse d’abord pour le combat des femmes, qu’elle risque de décrédibiliser. Et, à cet égard, il faut se rappeler comment les dérapages de certains enfants lors du procès d’Outreau, continuent à être utilisés par ceux qui refusent de croire les enfants.

Cette publicité est dangereuse aussi parce que la justice rendue sur la place publique est toujours dangereuse : des femmes -ou des hommes- violés peuvent mourir, d’être condamnés au silence. Mais être déclaré (e) publiquement coupable, alors qu’on ne l’est pas, peut tuer tout aussi sûrement.

Pourquoi est-ce surtout un danger pour les victimes ?

Et puis cette publicité est dangereuse surtout pour les victimes elles-mêmes. Elle est dangereuse pour leur reconstruction. Pour au moins deux raisons. Le viol est une situation dans laquelle la victime s’est retrouvée, seule et impuissante, face à un prédateur tout puissant. C’est un cauchemar. Et, pour qu’elle en sorte, l’intervention de la justice est essentielle. Parce qu’elle lui apporte la preuve que le monde n’est pas, comme dans ce cauchemar, une jungle régie par la loi du plus fort.

Or, quand le "déballage médiatique" précède ou remplace la justice, la victime est à nouveau dans un monde sans lois. Les rôles sont inversés : c’est elle, cette fois, qui tient l’agresseur présumé à sa merci. Et cela peut la soulager à court terme. Mais, à long terme, c’est destructeur. Parce que le monde reste dangereux.

Quel est l'autre danger de ce déballage ? 

C'est également destructeur parce que la reconstruction des victimes implique aussi qu’elles sortent de la culpabilité. C’est à dire cessent de se sentir responsables de ce qui leur est arrivé. Et cela suppose qu’elles construisent en elles une colère, par rapport à ce qu’elles ont subi. Et qu’elles la ressentent comme suffisamment légitime, pour demander réparation à la justice. Or, appeler les victimes à dénoncer publiquement leurs agresseurs, ce n’est pas les appeler à la colère. C’est les inciter à la haine. Et c’est très dangereux. Parce que la haine- et la jouissance que l’on peut y trouver- sont des voies sans issue dont il est toujours très difficile de sortir.            

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