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C'est dans ma tête. Avoir droit à des vacances

L'été arrive et les vacances sont rarement possibles quand on vit dans la pauvreté. Le Secours Populaire vient de lancer sa campagne de séjours pour la saison estivale. L'occasion pour la psychanalyste Claude Halmos de préciser combien ces vacances sont importantes pour ceux qui en sont généralement privés. 

Article rédigé par franceinfo, Claude Halmos
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
La campagne "Vacances d'été 2019" du Secours Populaire vient de commencer. L'accès à de "vraies" vacances pour des personnes qui en sont le plus souvent privées. (SECOURS POPULAIRE)

Le Secours Populaire a organisé, du 30 avril au 5 mai, à Narbonne, un séjour de vacances pour 500 personnes qui en sont, en général, privées ; et l’on ne peut qu’approuver une telle initiative. La psychanalyste Claude Halmos nous explique en quoi cela peut aider, sur le plan psychologique, les adultes et les enfants qui en bénéficient.    

Claude Halmos : Les vacances sont nécessaires à l’équilibre psychologique, parce qu’elles permettent de rompre, pour un moment, avec les exigences du quotidien. Et que nous avons tous besoin que notre tête puisse, comme notre corps, fonctionner de temps en temps, sans contraintes, à son propre rythme. Mais elles sont peut-être plus importantes encore, pour les personnes qui vivent dans la pauvreté.        

franceinfo : Pour quelles raisons les vacances sont-elles peut-être plus importantes encore pour les personnes qui vivent dans la pauvreté ?        

Claude Halmos : Parce que leur quotidien est, sur le plan psychologique, plus éprouvant encore que celui des personnes qui ont une vie décente. Et on ne le dit pas assez, parce que l’on parle rarement des problèmes psychologiques générés par la pauvreté. Comme si le psychisme était un luxe auquel, elles, les personnes pauvres, ne pourraient pas prétendre. La pauvreté génère des angoisses spécifiques, et permanentes. Elles sont liées au fait de ne jamais savoir comment on va nourrir sa famille, habiller ses enfants, ou payer son loyer ; ou au logement, souvent trop exigu pour que l’on puisse préserver son intimité.

La pauvreté génère des problèmes, au niveau de l’image que l’on a de soi (parce que la personne pauvre vit dans un sentiment d’impuissance - qui est dévalorisant - et finit même souvent par se penser coupable de ne pas s’en sortir mieux). Et elle génère une tendance au repli sur soi, et à l’isolement, parce que l’on se sent différent des autres et exclu, aussi bien de la vie normale, que de la société. Et cette situation pèse particulièrement sur les enfants, qui doivent, parce qu’ils les partagent, se construire dans ces angoisses.                

Que peuvent apporter, par rapport à ces difficultés, des séjours de vacances comme celui dont nous parlons ?            

Ils sont un peu ce que sont les antalgiques, pour un malade. Ils ne guérissent pas sa maladie, mais ils apaisent certaines de ses douleurs. La vie matérielle des familles, par exemple, est assurée, pendant ces séjours, par les organisateurs : l’espace est suffisant, et les placards ne sont pas vides. Elles peuvent donc souffler un peu, et reprendre des forces. Et, en même temps, sortir de leur isolement, rencontrer d’autres gens, parler, tisser des liens, et redécouvrir ce qu’est une vie sociale.

En fait ces séjours sont, pour ceux qui y participent, une fenêtre qui s’ouvre sur la vie normale. Ils leur donnent la possibilité de faire des découvertes, et de vivre, pour une fois, comme les autres (ce qui est particulièrement important pour les enfants).  Mais aussi, de se découvrir, eux-mêmes, autres, et capables par exemple de faire des choses dont ils ne se sentaient pas capables. Ces séjours peuvent donc constituer, pour eux, la première étape d’un véritable processus de reconstruction psychique.          

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