Indonésie : l'intelligence artificielle s'invite dans la campagne présidentielle

Les Indonésiens sont appelés au vote pour l'élection présidentielle, ce 14 février. Dans le pays, les partis se servent beaucoup de l'intelligence artificielle, quitte à utiliser l'image de présidents décédés.
Article rédigé par Yann Rousseau
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3 min
Le favori de l'élection présidentielle indonésienne, Prabowo Subianto, n'est pas avare de l'intelligence artificielle. (YASUYOSHI CHIBA / AFP)

Si on ramène l'image en France, c'est comme si le général de Gaulle adressait un message de soutien à des candidats sur TikTok. En effet, l'ancien président indonésien, Suharto, décédé il y a 15 ans a été convoqué par l'intelligence artificielle. Il a régné d’une main de fer pendant 3 décennies sur le pays. Il a multiplié les violations des droits de l’homme jusqu’à son départ en 1998, mais pour une partie des Indonésiens, il est resté assez populaire.

C'est pour cette raison qu'un parti politique a utilisé l’intelligence artificielle générative pour le ressusciter le temps de la campagne à travers un deepfake. Des programmeurs ont repris des images d’archives du dictateur, ils ont synthétisé sa voix avec des vieux discours et ils ont fabriqué une vidéo où il appelle à voter pour les candidats de leur formation demain.

La vidéo a été vue par des millions de personnes sur les réseaux sociaux, notamment par les jeunes, puisque l'Indonésie compte près de 280 millions d'habitants et que la moitié des électeurs ont moins de 40 ans.

Une utilisation de l'IA sans limites

Pour l'instant, la loi indonésienne n'a pas rattrapé l'intelligence artificielle, donc l'usage de ces technologies n'est pas vraiment régulé et tous les partis s'en servent. Il n'y a d'ailleurs pas que les fausses vidéos. En effet, plusieurs candidats utilisent aussi des plateformes d'échange de messages animées par l'intelligence artificielle.

Sur les réseaux sociaux, il est possible de poser des questions précises aux équipes de campagne sur un point de leur programme comme l'économie, l'éducation ou la politique étrangère. Mais c'est une machine animée par ChatGPT qui répond. Souvent, elle formule une réponse adaptée à ce que l'on a envie d'entendre, après avoir analysé des milliers d'autres échanges.

Les candidats mettent aussi plus en scène leurs avatars, là aussi créés par l'intelligence artificielle. Par exemple, le grand favori de l'élection, l'actuel ministre de la Défense, Prabowo Subianto, se présente en ligne comme un jeune homme un peu rondouillet, très rassurant, qui adore danser. Dans la vraie vie, c'est un ancien général de 72 ans, soupçonné de multiples violations des droits de l'Homme.

Cependant, l'intelligence artificielle ne fait pas tout. En effet, la popularité de Prabowo ne s'est pas construite qu'en ligne. Il a aussi bénéficié du soutien du président sortant Jokowi. Mais l'intelligence artificielle semble désormais un outil incontournable, notamment pour emporter le vote des jeunes qui se socialisent sur TikTok ou Instagram.

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