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La révolution par les lettres

La sélection de Lydie Zannini de la librairie du Théâtre à Bourg-en-Bresse et de Gérard Collard, de la Griffe noire, à Saint-Maur.
Article rédigé par franceinfo
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Ecrire la Révolution : 1784-1795. "Lettre à Pauline" de Gaston de Lévis aux éditions de La Louve.

Résumé : Cet ouvrage livre une correspondance d'environ 300 lettres
de Gaston de Lévis, élu en 1812 à l'Académie Française. Elle est exceptionnelle à plus d'un titre. Gaston de
Lévis écrit à son épouse Pauline entre les années 1784 et 1795.
Outre l'oeuvre littéraire tout à fait remarquable que constituent
ces lettres, il s’avère qu’elles sont aussi - et même surtout - une
source historique rare : écrivant de Paris, de Versailles, puis
de toute l'Europe, Gaston de Lévis raconte quasiment au jour
le jour la Révolution française et les années troublées qui ont
suivi. Ainsi, après avoir été député de la noblesse aux États
Généraux en 1789, il s'est retrouvé engagé auprès des armées
coalisées (il était à Valmy, au débarquement de Quiberon...) et
il raconte tout cela avec force détails, sans jamais se départir
d'un humour décapant : la lettre décrivant un duel au pistolet
à la Barry Lyndon, l’humour en plus ("Ils pourraient tirer
toute la journée sans se toucher"), est d'une grande drôlerie.
Il se fait ainsi le fidèle rapporteur des remous historiques qu’il
vit de l’intérieur. Attaché à la famille royale, il est un témoin
avisé et sagace. Il a ses entrées à la Cour et derrière les portes
closes. Ces lettres permettent également d'entrer dans la mentalité
des nobles de l'époque, montrant à quel point tous les
émigrés n'étaient pas issus du même moule. Depuis les quatre
coins d’une Europe qui vibre, Gaston de Lévis écrit l’Histoire,
en n’oubliant jamais le lieu où son coeur est en dépôt, auprès
de "sa" Pauline.

Poussière d'homme de David Lelait chez Anne Carrière

Résumé : "Ce dimanche 3 avril, au soir, tes jours d'homme m'ont filé entre les
doigts. Au presque commencement de ma vie, je t'ai perdu, toi avec qui
je voulais la finir. Nous avions oublié d'être mortels, le temps nous a
rattrapés. La voix blanche et la colère noire, j'ai eu beau t'appeler,
tu étais déjà parti, loin. Ta vie, minuscule tourbillon de quelques
lunes et soleils, cessait là de tournoyer, sur le rivage carrelé, blanc
et glacé, d'un hôpital. Je fais le rêve que l'on nous redonne quelques
heures, une poignée d'heures d'une toute petite nuit, ravies entre le
tomber d'un jour et le lever d'un autre. Ce ne sera qu'un tout petit
moment, le temps de refermer les portes de notre vie ensemble, de nous
serrer une dernière fois l'un contre l'autre avant que nos corps volent
en éclats. Une minuscule escale pour rattraper ce temps échappé,
arraché, et te dire l'après-toi, le sans-toi, la béance à chaque seconde
de mes jours, la douloureuse colère depuis ta vie suspendue, l'amour de
toi qui me cogne au-dedans. Tu t'enfonces dans le sofa sans forme du
salon, je t'y rejoins et me replie au creux de toi. Ton souffle caresse
ma nuque, tes mains me parcourent et m'enserrent. Nous buvons à la coupe
de nos lèvres jointes. Ensemble encore quelques heures, le temps de
quelques mots, jusqu'aux adieux, quand mes lèvres en seront à lâcher les
tiennes pour frôler le vide et embrasser l'absence"
Poussière d'homme
est une parole d'amour, d'homme à homme, dans un océan de pertes et de
chagrins. Nous devrions tous pouvoir, rien qu'un instant, prendre congé
de nos défunts Ce récit est le rêve fou de ces adieux, la mise en mots
de l'insoutenable et éternelle absence, un supplément d'amour lorsqu'on
craint que la douleur nous précipite dans la folie.

Sanctuaire du coeur de Thu Huong Duong aux éditions Sabine Wespieser

Résumé : La fugue de Thanh plonge dans la stupeur ses parents, un couple de
professeurs respectés, ainsi que toute la petite ville proche de Hanoi
où vit cette famille modèle. À seize ans, le jeune homme était promis à
un brillant avenir et n’avait jamais donné le moindre signe de trouble
ni de rébellion.

Quand on le retrouve quatorze ans plus tard – en 1999, le temps du récit
–, il est devenu gigolo, entretenu par une femme d’affaires rencontrée
dans la maison close de Saigon où il exerçait ses talents de prostitué.

Comment – et pourquoi – ce jeune homme sans histoires en est arrivé là,
c’est ce que dévoile ce roman diaboliquement construit.

Thanh a tout le temps, pendant ses longues journées dans la villa de la
côte que seuls rythment des dîners dans des établissements de luxe, de
se remémorer son passé.

Ses jeunes années sont autant de souvenirs lumineux : elles ont été à
jamais marquées par la présence radieuse de Tra My, son amie de
toujours, la petite fille que ses parents avaient recueillie et dont il
était tombé éperdument amoureux.

Sa descente aux enfers après sa fugue vient en sombre contrepoint de
cette enfance heureuse : les scènes époustouflantes de son arrestation
par erreur dans un hôtel de passe, de son emprisonnement avec des droits
communs ou de sa rencontre avec le proxénète qui l’a embauché donnent à
Duong Thu Huong la matière d’un portrait sans appel d’une société
vietnamienne déstabilisée et corrompue que dominent le sexe, le pouvoir
et l’argent.

Quand Thanh ne supporte plus sa vie oisive d’objet sexuel et qu’il
décide de prendre un nouveau départ, il ne peut s’empêcher de buter sur
le traumatisme subi lors de ses seize ans. La scène qui le hante, et
dont son propre père est l’acteur principal, donne la clé de sa dérive
et du roman tout entier.
La question sous-jacente que pose en effet Duong Thu Huong tout au long
de ce livre consacré aux enfants des hommes et des femmes de sa
génération, celle qui s’est battue pour des idéaux et qui ne se
reconnaît pas dans le Vietnam d’aujourd’hui, est déchirante :
qu’avons-nous fait à nos enfants ? quel monde leur laissons-nous ?

Les fourmis n'aiment pas le flamenco d'Auguste Derrière au Castor Astral

Ce livre ne fait pas l'éloge de la culture andalouse. Formidable
concentré d'humour richement illustré, il contient de magnifiques
réclames vouées à promouvoir le Picrate des Caraïbes, les Restos du
Caire ou la Grande Roue Bignole, mais aussi une flopée de maximes,
dictons, proverbes absurdes... et une fabuleuse biographie de l'auteur !
Après le succès (très applaudi) de l'ouvrage "Les moustiques n'aiment
pas les applaudissements" ce deuxième opus est sans aucun doute le
compagnon idéal pour mettre de l'ambiance dans vos soirées pince-fesses.
Il peut aussi être utile pour caler une table basse ou une armoire
normande.

 

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