"King Kasai" de Christophe Boltanski en poche chez Folio
King Kasaï, c'est le récit que fait Christophe Boltanski de la nuit qu'il a passée à l'Africa Muséum de Tervuren, dans la proche banlieue de Bruxelles, le musée consacré à l'histoire coloniale de la Belgique.
Le livre est sorti en grand format chez Stock il y a un an dans la collection "Ma nuit au musée". Leila Slimani, Lola Laffont, Yannick Haenel, Aurelien Bellanger, et d'autres encore, se sont eux aussi livrés à cet exercice, dans d'autres musées ou monuments historiques. Christophe Boltanski, écrivain, journaliste, a déjà écrit sur le Congo et ses mines du Nord-Kivu, où l'on extrait ce matériau que l'on trouve partout dans nos téléphones portables ou ordinateurs.
Cette nuit au musée de Tervuren est une sorte de prolongement logique sur les pistes de ce Congo belge, voulu par le roi Léopold. D'abord propriété personnelle du roi, qui n'y avait jamais mis les pieds, mais qui en a tiré toutes les richesses possibles et imaginables. Le tout avec un mépris invraisemblable pour les populations qui y vivaient. L'État belge a ensuite repris le flambeau jusqu'à l'indépendance en 1960.
Ce musée, voulu par Léopold lui-même, était censé encourager les vocations, et honorer cette conquête belge. On y trouve sculptures, objets et animaux empaillés comme cet immense éléphant King Kasaï, tué et installé en 1958, pour L'exposition universelle de Bruxelles. Dehors, dans un recoin, on y trouve également les tombes des indigènes morts, des hommes et des femmes arrachés à leur pays pour être exhibés comme des animaux, lors d'expositions, pratiques très répandues en Europe à l'époque.
Christophe Boltanski regarde avec effarement ce passé colonial belge
Et on y retrouve tous les préjugés et la violence d'une histoire qui a concerné toutes les générations jusqu'en 1960. Une histoire qui croise une famille, celle du chasseur qui a tué l'éléphant empaillé. Grande famille du Brabant flamand anobli au début du XIXᵉ siècle. Christophe Boltanski nous parle aussi du Hergé de Tintin au Congo, ou encore du Joseph Conrad, Au cœur des ténèbres.
Le récit de cette nuit au musée de Tervuren est passionnant et glaçant, vaut pour ses références et pour une description détaillée des lieux et du foutoir colonial qu'il recèle. Avec pour l'auteur, devant chaque découverte, un constat : la violence et l'inhumanité cachée derrière cette histoire mise en scène dans ce musée.
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