Du polar, des nouvelles mais en noir !
3 minutes 33 seconde s d'Esi Edugyan – Ed. Liana Levi. Un chef-d'œuvre, fabuleux ! Un disque de 3 minutes 33 secondes, c'est tout ce qu'il reste de ce temps-là. De ce Paris occupé où trois jazzmen planqués pour échapper aux nazis tentaient malgré tout d'enregistrer un morceau. Sid, Chip, et Hiero, deux Noirs de Baltimore et un métis allemand, unis le temps d'un enregistrement frondeur, au nez et à la barbe de l'ennemi. Avant, c'est à Berlin qu'ils jouaient, quand l'Amérique marquait le tempo des folles nuits européennes. Avant que Goebbels n'interdise cette "musique nègre" et qu'eux trouvent refuge en France et rencontrent le grand Armstrong. Mais parfois, il ne faut guère plus de trois minutes pour qu'un destin bascule. Un regard enjôleur, une ligne de basse qui dérape, des papiers qui n'arrivent pas. Alors il reste les souvenirs, ces moments hors du temps qui font le sel de la vie.
La trilogie de Lewis de Peter May - Ed. Babel Noir. L'une des plus belle trilogie de ces dix dernières annnées. Le vrai coupable, c'est le passé.
Marqué par la perte récente de son fils unique, l'inspecteur Fin Macleod, déjà chargé d'élucider un assassinat commis à Edimbourg, est envoyé sur Lewis, son île natale, où il n'est pas retourné depuis dix-huit ans. Un cadavre exécuté selon le même modus operandi que celui d'Edimbourg vient d'y être découvert. Sur cette île tempétueuse du nord de l'Ecosse, couverte de landes, où l'on se chauffe à la tourbe, pratique encore le sabbat chrétien et parle la langue gaélique, Fin est confronté à son enfance. La victime n'est autre qu'Ange, ennemi tyrannique de sa jeunesse.
Dark nights - Nouvelles nocturnes de Denis Jeambar – Ed. Calmann-Lévy. Attention, c'est époustouflant, classique, épuré, plus jamais vous n'ouvrirez la porte à un inconnu. Absolument génial !
"Quelque chose qui devait s'appeler la jeunesse s'était brisé en lui et il ne parvenait pas à recoller les morceaux de cette porcelaine intime". Denis Jeambar revient à la fiction avec ce recueil de 29 "nouvelles nocturnes" (nuit réelle ou figurée), dont l'atmosphère tantôt désenchantée, tantôt glaçante, flirtant parfois avec le fantastique, ne cesse de nous surprendre. La quête d'éternité et la certitude qu'elle n'existe pas, la recherche d'absolu, la fuite du temps, la duplicité, la cruauté comme la bonté, la nostalgie du temps des possibles, le délabrement de l'âme ou du corps sont au coeur de ces Dark Nights qui saisissent le lecteur et qui, par un étrange effet miroir, le conduisent à l'introspection. Dark Nights convoque des personnages dont le regard sur le monde change, se déforme, et qui ont une chose en commun : quelque chose en eux, d'une manière ou d'une autre, s'est brisé. Une diva, un boxeur à gueule d'ange, un clown blanc, un homme qui choisit de devenir un tueur au sang froid, un collectionneur malchanceux, un commissaire assassin, un voyeur littéraire, un écrivain anachronique, une belle cubaine, etc. Autant de destins qui se dévoilent en quelques pages, ou plus. Le recueil d'un idéaliste désenchanté, d'un jeune homme devenu mûr, traversé par une fêlure qui affleure à chaque page. Pour autant, ces Darks Nights ne sont pas tristes, juste douces-amères, parfois jusqu'au grincement, au craquement, à la détonation.
Le maître des illusions de Donna Tartt, coffret 2 volumes chez Pocket. Fuyant la station-service paternelle, bourse en poche, Richard doit son entrée à l'université de Hampden, dans le Vermont, à son opportunisme bien plus qu'à son talent. Prêt à tout pour arriver haut, et vite, le voilà introduit dans la classe du professeur Julian, vouée à l'étude des Anciens, grecs et latins. La petite communauté vit en vase clos, avec deux mots d'ordre : discipline et secret. Très vite, Richard devine sous le vernis des apparences une tache indélébile, du rouge le plus sombre. Tout ici n'est que vice, secret, trahison, manipulation....
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