Dans l'univers des espions avec "L'entretien d'embauche au KGB" d'Iegor Gran

Iegor Gran, fils de l'écrivain dissident soviétique Andreï Siniavski arrive en France en 1974, à l'âge de 10 ans. Il a écrit une vingtaine de romans et d'essais. "L'entretien d'embauche au KGB", paru chez Bayard, est inspiré d'un manuel authentique de 120 pages, sorti d'une école du KGB.
Article rédigé par Gilbert Chevalier
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Le nouveau récit de Iegor Gran, une traduction intégrale d'un manuel authentique théorique du KGB sur "l'art subtil du management d'un réseau d'espions en Occident". (BAYARD RECITS EDITIONS)

Avec ce récit, une nouvelle fois, Iegor Gran semble obsédé par l'appareil sécuritaire russe. Il faut dire que son père, Andreï Siniavski, écrivain dissident des années 60, et sa femme, femme de lettres également, Maria Rozanova, ont été pourchassées par le KGB. Andreï Siniavski avait été arrêté en 1965 et condamné à sept ans de goulag. Iegor Gran a raconté cet épisode de la vie de ses parents dans un roman, Les services compétents publiés chez POL en janvier 2020. Et on va dire que la plaie a été ravivée par la guerre et l'agression russe en Ukraine.

Au cours de ces recherches pour ce roman, Les services compétents,Iegor Gran avait mis la main sur un document étonnant, document soviétique daté de 1969. Son but : enseigner aux jeunes du KGB l'art du recrutement des agents de renseignement étrangers. Et Iegor Gran nous propose la lecture de ce manuel qu'il a lui même traduit. Document écrit, imagine-t-il par un obscur officier du KGB. Le manuel est fascinant, sans aucun humour, dans une langue administrative teintée d'idéologie.

C'est un mélange de conseils pratiques, d'astuces de surveillance, filatures et autres chantages. Mais on y parle aussi de projet social et de politique. Iegor Gran lui rajoute des éléments de contextualisation avec des commentaires plutôt acides. Et en évoquant ce passé soviétique, il nous parle aussi de la Russie d'aujourd'hui, et en premier lieu de Poutine, puisque le président russe a été un agent du KGB puis du FSB. Les services secrets russes qui ont succédé au KGB, les dirigeants d'aujourd'hui ont eu droit à cette formation d'esprit. La Russie de Poutine est donc aujourd'hui la digne héritière de ce passé, de ses pratiques, selon Iegor Gran.

Depuis la guerre en Ukraine, Iegor Gran est rattrapé par son passé et celui de ses parents

Juste après l'agression, Gran avait écrit Z comme zombie, édité chez POL. C'est un pamphlet. Il s'intéresse à ce Z grossièrement peint en blanc, sur les chars russes. Et l'écrivain français s'en prend à cette société russe qui soutient le président d'un pays qui s'entête depuis un siècle à vivre dans une fiction parallèle, écrit-il.

Et puis, plus récemment, il a également sorti Voyage clandestin avec deux femmes bavardes. L'auteur a suivi quotidiennement les deux comptes Twitter de deux femmes russes ordinaires, l'une apparemment hostile à la guerre, et l'autre plus favorable, sans raisons profondes. C'est une autre absurdité du monde russe d’aujourd’hui, que révèle Iegor Gran.

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