Franceinfo en campagne. À la recherche des clés de la déroute socialiste dans le Nord et le Pas-de-Calais
Dans le Nord et le Pas-de-Calais, aucun candidat du Parti socialiste ne s'est qualifié pour le second tour des législatives du 18 juin. Quand futurs ex-élus et électeurs s'expriment, il est question de "Paris" et de volonté de "changement".
Les étiquettes socialistes ont valsé dès le premier tour des législatives du 11 juin dans le Nord et le Pas-de-Calais. Le PS n'a qualifié aucun candidat pour le second round des élections. Essentiellement coincés entre La République en marche et le Front national, les candidats socialistes ont été balayés sur le terrain pourtant labouré par la gauche depuis longtemps.
Le "rêve" déçu des électeurs
Dans la 11e circonscription du Pas-de-Calais où Marine Le Pen pour le Front national reste en lice face à Anne Roquet, de La République en marche (LREM), le député PS, Philippe Kemel, maire de Carvin, a été sèchement sorti du jeu dès le premier tour. Il n'a pas eu la voix de Raymond, retraité après 44 années de travail. Son vote socialiste atavique s'est arrêté à la vue du montant de sa pension.
Comme mon père et mon grand-père, je votais PS. Mais pourquoi en janvier m’ont-ils enlevé 32 euros ? J’en ai eu marre, j’ai dit : 'je ne voterai plus.
Raymond, un habitant de Carvinà franceinfo
Une habitante de Leforest, une ville voisine, évoque, elle, la déception généralisée des gens : "Tous se plaignent. Autant essayer ailleurs, c’est ce qu’on se dit tous." À Lille, un passant qui avait voté Hollande, cible le chômage, tandis qu'un jeune homme parle du besoin de changement. "Les jeunes ont envie de récréer leur société, leur monde", dit-il. Interrogé sur ce changement prôné au PS ces dernières années, il lance : "Ça ne fait pas rêver".
Dans le viseur des perdants : "Paris"
À Douai, la socialiste Agnès Dupuis, battue d'emblée dans la 17e circonscription du Nord, veut se convaincre que les explications de la déroute généralisée dépassent le périmètre régional. L'adjointe d'une des rares municipalités à avoir basculé à gauche en 2014 livre son sentiment, dirigé vers le haut de la pyramide.
On a l’impression que les politiques de Paris sont très mal comprises et très mal perçues localement.
Agnès Dupuis, ex-candidate PS à Douaià franceinfo
À Lille, François Lamy, présenté comme lieutenant de Martine Aubry, se présentait dans le fief de Pierre Mauroy. Dans un tweet, le candidat défait, qui doit, dit-il, chercher du travail, a pointé, au soir de la défaite, la responsabilité de François Hollande et de Manuel Valls. "Ce n’était pas un réflexe de mauvais perdant. Je savais que c’était perdu", dit-il, décrivant "un désastre qui arrive après cinq ans de gauche".
De moins en moins de militantisme
Où est donc passé l’électorat socialiste ? Pierre Mathiot, ancien directeur de Sciences Po à Lille avance l'explication de la crise du PS, en tant que marque politique, dit-il. "Elle n’a été que marginalement compensée par des députés sortants socialistes, qui était relativement appréciés comme députés mais qui ont été balayés non pas sur leur personne, mais sur l’étiquette qu’ils incarnaient." Pierre Mathiot explique aussi que les réunions de sections socialistes ne font plus le plein, des réunions sans débats. Le manque d'engagement se voit aussi parmi les étudiants. "À Sciences Po Lille, peu d’étudiants, trois ou quatre, ont fait campagne pour le PS" dit-il.
Le PS à la recherche de nouveaux combats
Devant le siège du PS du Nord, Martine Filleul, la première secrétaire fédérale, ne veut pas confondre l'instant et la durée. Le changement s’impose, dit-elle, en regardant devant, avec une nouvelle problématique. "Aujourd’hui, que veut-on pour les Français et pour quels Français ?", lance-t-elle, comme un nouveau slogan. "On ne part pas de rien", déclare la patronne du PS dans le Nord. Privé d’élus et de militants, le parti devra toutefois gérer des soucis financiers. Le siège du PS à Lille pourrait être partiellement ou totalement vendu.
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