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UMP : face à l’offensive Sarkozy, à chacun sa tactique

Tous les ténors de l'opposition n'ont pas applaudi des deux mains le retour de l'ancien président. Francetv info décrypte l'option choisie par chacun. 

Article rédigé par Salomé Legrand
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
Nicolas Sarkozy (D) et Jean-François Copé derrière lui, le 8 juillet 2013, devant le siège de l'UMP à Paris.  (MARTIN BUREAU / AFP)

Un retour qui ne dit pas son nom, mais qui ne trompe personne. La décision de Nicolas Sarkozy, lundi 8 juillet, de mettre fin à son retrait de la vie politique n’a pas été accueillie également à l’UMP, où la présidentielle de 2017 est déjà dans toutes les têtes. L’ancien président a d’ailleurs mis les pieds dans le plat : "Il y a quelque chose d'indécent à parler du rendez-vous de la présidentielle alors que les Français souffrent." Tous les candidats potentiels se sont tout de même sentis obligés de choisir un positionnement stratégique. Premier à dégainer, François Fillon, qui doit tenir une réunion publique, jeudi 11 juillet, à La Grande-Motte (Hérault).  Décryptage.

Pour François Fillon : la fronde

C’est le plus remonté. L’ancien Premier ministre, ouvertement critique sur le quinquennat Sarkozy, a particulièrement été ciblé par l’ancien président, lundi, lors du bureau politique exceptionnel sur la situation financière apocalyptique du parti : "Ça me fait plaisir de te voir ici, François. Il faut toujours être fier de ce qu'on a fait ensemble." "Les gaz de schiste, l'Europe... tout cela est très bien, même si ce n'est pas très nouveau", a commenté dans la foulée François Fillon, regrettant que Nicolas Sarkozy n’ait fait qu’effleurer l’essentiel lors de son intervention, à savoir "les finances du parti"

Dès le lendemain, il a envoyé ses proches au front, qui ont distillé charges et confidences dans les médias. Il était "furibard", confie l’un d’entre eux, selon un journaliste de France 2"Il a vraiment compris que Sarkozy voulait revenir et qu’il faudra compter avec lui", décrypte l’un de ses amis, qui confie que François Fillon a détecté "un discours de candidat". Et son entourage de promettre un propos "très offensif", " très libre" lors d’un de ses rares déplacements, à La Grande-Motte, jeudi. "François Fillon est un bulldozer, François Fillon se prépare et se prépare bien", affirme son bras droit Jérôme Chartier, à RTL. Mercredi 10, il a même défini l'organigramme de son micro-parti Force républicaine, dont des "responsables régionaux", que publie un blog du Monde

Mais il n’omet pas non plus son autre adversaire. Le député de Paris compte bien maintenir la pression sur Jean-François Copé en mettant son nez dans les finances du parti, dont il soupçonne qu'elles soient réparties plus avantageusement du côté Copé des effectifs.

Objectif : représenter l’alternative à la droite Buisson, celle influencée par le très droitier conseiller de l’ombre du président-candidat en 2012.

Pour Jean-François Copé : le sarkozysme distant

Debout juste derrière l’ancien président, à son entrée comme à sa sortie du siège de l’UMP. Jean-François Copé n’a raté aucune occasion de figurer sur les images de ferveur entourant la réapparition du chouchou des militants, lundi 8 juillet, à l'occasion de la réunion exceptionnelle du bureau politique du parti. Après tout, c’est lui qui a réussi à créer une dynamique à l’UMP en lançant une souscription populaire, immédiatement après l’annonce de l’invalidation des comptes de la campagne présidentielle de 2012 par le Conseil constitutionnel. Opération dont il ne cesse de vanter le succès. Plus de 2 millions d’euros revendiqués au dernier comptage, pour sauver la formation de la banqueroute.

Mais l’actuel président du parti d’opposition n’a pour autant pas oublié de prendre ses distances. Il "n'est pas complètement ravi de la journée de lundi", témoigne un élu copéiste dans Le FigaroSelon le quotidien, Jean-François Copé a même répliqué directement à Nicolas Sarkozy lors du petit déjeuner du parti : "Je ne laisserai jamais dire que la droite est conservatrice." Et d’asséner, au micro d’Europe 1 : "Je ne suis pas son porte-parole, vous l'imaginez bien." Avant, tout de même, de reprendre presque mot à mot la défense de Sarkozy quant aux arrières-pensées présidentielles : "Aujourd'hui, personne n'imagine qu'on est en 2017. Ce serait d'ailleurs indécent quand on voit la situation dramatique que vivent des millions de Français."

Objectif : tenir le parti et assurer lors des élections municipales et européennes à venir. 

Pour Alain Juppé : l'éloignement

Après avoir tenté en vain de jouer les casques bleus lors de la guerre de succession à la tête du parti, le maire de Bordeaux a décidé de prendre du recul. "Il est en plongée jusqu'aux municipales, et se fait discret sur la scène nationale. Rare dans les médias comme dans son propre parti", souligne Le Nouvel ObsJuppé n'assiste pas au petit déjeuner des poids lourds du parti et se rend rarement au bureau politique, rajoute l'hebdomadaire. 

Il faut dire qu'il a une longueur d'avance sur ses rivaux. Fin juin, un sondage dévoilait que 54% des sympathisants UMP considèrent qu'il "ferait un bon président de la République", loin devant Fillon (31%) et Copé (8%). Ils le trouvent plus "sympathique", plus "proche des gens", plus "rassurant", plus "rassembleur". Du coup, Alain Juppé se permet de saluer ces caractéristiques chez Nicolas Sarkozy. Interviewé par BFMTV à la sortie de l'intervention de Sarkozy à l'UMP, il livre : "Il avait beaucoup de hauteur de vue, c'était un discours de très haute tenue." Et de glisser : "Nous avons besoin de sa présence pour bien mobiliser toutes nos forces."

Objectif : rester en marge pour pouvoir jouer la carte du recours, ou du moins, du faiseur de roi.

Pour les "quadra" : la technique de l’autruche

C’est le silence radio pour la plupart d’entre eux. Wauquiez, Bertrand, Pécresse, Le Maire, NKM ont fait place nette dans leurs agendas pour être présents au bureau extraordinaire. Mais ils évitent tout commentaire. Xavier Bertrand attend que cela passe. Celui qui a d’ores et déjà annoncé sa candidature, "quoi qu'il arrive", à la primaire présidentielle en 2016 "ferme le rideau, ne fait plus de média d’ici ses vacances en Corse et reprendra les interviews en septembre", explique son entourage à francetv info.

Même plan pour Laurent Wauquiez. Le député de Haute-Loire n’a rien tweeté depuis ses félicitations à la fierté locale de sa circonscription, la joueuse de tennis Marion Bartoli, pour ses exploits à Wimbledon. Il doit s’éclipser jusque mi-août, après un ultime déplacement à Douarnenez (Finistère). Pas un billet de blog non plus chez Bruno Le Maire. Et pendant que Nathalie Kosciusko-Morizet n’a d’yeux que pour sa campagne à Paris, Valérie Pécresse s’est contentée de commenter l’urgence de la situation financière à laquelle le parti doit faire face. 

Objectif : ne pas se griller trop vite.

Pour les jeunes pousses : la sarkolâtrie

Grands organisateurs de la Fête de la violette et animateurs du courant La Droite forte, Guillaume Peltier et Geoffroy Didier ne lésinent pas sur les compliments envers l'ancien chef de l'Etat, et ce malgré la sanction des "sages". "Il est notre leader naturel, mais ce sont les Français qui lui demanderont de revenir", a déclaré le premier au Parisien"Nicolas Sarkozy est notre seul guide", a expliqué le second dans Le Point. Boostés par des militants omnubilés par l'ex-président, ils préparent son retour. 

Objectif : grandir encore un peu dans son sillage. 

En attendant son vrai come back, "le président de cœur des militants de l’UMP"comme l’appelle Nadine Morano, a au moins réussi à agiter l'UMP. Ainsi qu'à repousser encore un peu le droit d’inventaire sur son quinquennat, que ses adversaires finiront inévitablement par ressortir. 

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