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Les élections municipales et le risque de l'abstention

C'est, comme toujours, la grande inconnue du scrutin mais elle va jouer un rôle important : l'abstention. De nombreux électeurs pourraient décider de bouder les urnes, dimanche, à l'occasion des élections municipales. D'autant que les récentes affaires ont contribué à détériorer le climat général et profiteraient donc à l'abstention.
Article rédigé par Baptiste Schweitzer
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
  (Maxppp)

"Les électeurs me le
disent, tous les jours: 'Je ne vais pas aller voter pour des branquignoles' !
Ça va être très difficile !"
A l'image de ce responsable du Parti
socialiste, le gouvernement craint que l'abstention ne soit extrêmement néfaste
à la gauche. Le professeur de sciences politiques, Jean-Yves Dormagen, auteur
(avec Céline Braconnier) de La Démocratie
de l'Abstention
explique d'ailleurs que "depuis 1978 aucune
majorité sortante n'a gagné une élection, à part en 2007, probablement parce
que les électeurs de la majorité qui gouvernent ont tendance à s'abstenir,
parce qu'ils sont déçus. C'est difficile de parler d'une grande inconnue
puisqu'on sait qu'on s'oriente de toutes façon vers une abstention entre 35 et
45%".

En 2008, un nouveau record a été pulvérisé avec le taux de
participation le plus faible depuis 1959 : 66,5% au premier tour et 65,2%
au second. Selon un récent sondage Ipsos seuls 60% des personnes interrogées se déclarent persuadées d'aller voter ce
dimanche et le suivant. "Il y a énormément de gens qui changent de
villes, de régions, de départements. Ces personnes sont mal inscrites,
connaissent très mal la vie politique locale et sont, par exemple, très souvent
des abstentionnistes
précise Jean-Yves Dormagen. Vous avez énormément de
phénomènes qui jouent, le grand vieillissement de la population aussi, les très
âgés ne votent pas. Mais, bien sûr, ce qui nourrit fondamentalement
l'abstention, c'est celle des plus jeunes, les 18-35 ans, qui votent
particulièrement peu, notamment pour les élections locales."

La démobilisation chez les jeunes

Ces jeunes, justement pourraient être vraiment démobilisés
ce dimanche. Sur une vingtaine d'électeurs rencontrés à Paris ces derniers jours, seuls
cinq ont prévu de voter. A 27 ans, Marie l'avoue "je suis toujours
inscrite sur les listes à Châlons-en-Champagne, je n'ai jamais fait le
changement alors que ça fait quatre ans que je vis à Paris. Si c'était plus
simple peut être par internet, ce serait plus facile."
A ses côtés,
Marc fronce les sourcils et puis sourit, les deux amis viennent d'en parler et
lui confie que, même s'il va voter au premier tour, il ne passera surement pas
le rideau de l'isoloir au second. Pour le jeune actif "y'en a marre
des  choix par défaut, si je vote pour quelqu'un, c'est que j'ai envie de
voter pour lui ! Je préfère ne pas voter, au moins après, je peux
râler !"

À 23 ans, Benoît lui n'a jamais "été très vote. Je
n'y ai jamais cru
précise-t-il et si jamais je vais voter, ce sera
blanc !"
En attendant le début de son cours de Yoga Camille,
elle, s'agace, "j'ai 22 ans, mes copines elles ne s'intéressent pas du
tout à tout ça, elles me disent ah non, surtout on n'en parle pas. Elles ne vont
pas voter... moi je ne comprends pas, on a le droit de vote, il faut en
profiter !"

Abstention plus forte dans les grandes villes

Autre critère : la taille de la commune. Plus la ville est
grande et plus l'abstention est forte. En 2008, les abstentionnistes étaient
37,83% dans les communes de plus de 3.500 habitants et jusqu'à 43.11% pour les
villes de plus de 100.000 habitants, même 55,58% à Lille au second tour. 

Une inconnue tout de même, le vote frontiste qui reste
difficile à estimer pour les analystes. Le FN présente 600 listes et pourrait
gagner entre dix et quinze villes. Si le Front National pourrait bénéficier de
l'abstention, c'est la droite qui en pâtirait le plus puisque "le FN
prend l'essentiel de ses électeurs à l'UMP et donc peut-être qu'en
l'affaiblissant, cela pourrait permettre à la gauche de rester majoritaire dans
un certain nombre de villes"
d'après Jean-Yves Dormagen.

A tout cela s'ajoute un climat détérioré par les récentes
affaires. Selon un sondage LH2 pour le Nouvel Observateur, elles profiteraient,
là aussi, à l'abstention. Un Français sur dix se déclare prêt à bouder les
urnes à cause de ces scandales

D'ailleurs, le responsable des élections du parti
socialiste, Christophe Borgel l'assume : "Dans un climat général
qui donne le sentiment aux Français qu'on s'occupe plus de nous que de leurs
problèmes, j'entends les électeurs, y'a un côté "tous les mêmes". En
réalité, ces affaires qui ne sont pas les nôtres tirent la vie politique vers
le bas."
Son homologue de l'UMP, Nadine Morano, à l'inverse juge que "tout
est mis en œuvre par le pouvoir en place pour écœurer les gens d'aller voter.
Et
d'enfoncer le clou : "Moi j'incite les déçus de François Hollande à se
mobiliser comme jamais, pour leur donner une leçon face à ce comportement
inacceptable de montage d'affaires qui n'en sont pas !"

Et, une fois n'est pas coutume, PS et UMP se retrouvent tout
de même sur un point : la météo. Les prévisions annoncent un week-end très
nuageux, toujours plus favorable à la mobilisation que le beau temps... 

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