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Les chrétiens d'Egypte et la peur des kidnappings

A la fin du mois, l'Egypte votera pour connaître son futur président. Le maréchal Sissi est le favori. Il aura un défi majeur : faire revenir la sécurité dans le pays, secoué par des violences à répétition. Notamment des agressions qui visent la minorité chrétienne.
Article rédigé par Vanessa Descouraux
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
  (Asmaa Waguih Reuters)

Direction Minya, une ville située en moyenne Egypte, à 300 km au sud du Caire : une région
où le vide sécuritaire fait émerger un phénomène très inquiétant : des
chrétiens sont victimes d'enlèvement, des kidnappings de plus en plus fréquemment.
Dans cette ville, les associations font part d'une cinquantaine de cas ces six
derniers mois. Ce qui veut dire qu'il y a en a beaucoup plus car une seule loi
prévaut là bas, celle du silence.

Copte donc fortuné, un préjugé a la peau dure

La moyenne Egypte est un territoire assez particulier, jamais
vraiment apaisé. C'est une terre d'islamistes qui cohabitent avec une
importante minorité chrétienne et elle est régulièrement prise pour cible
depuis l'évacuation du sit-in des pro-Morsi. Là bas, le stéréotype du copte
forcément fortuné a la peau très dure.

Un exemple, celui de Hani Sidhom qui est
pharmacien, donc supposément à l'aise
financièrement, c'est pour ça qu'il est enlevé à la sortie de son travail.
48 heures de torture, les yeux bandés la plupart du temps. Ses geôliers
n'ont consenti à lui donner que de l'urine pour se réhydrater. 48 heures de cauchemar que raconte ce père de famille. Cet homme a été menacé de mort par ses ravisseurs qui sont allés jusqu'à le mettre dans une tombe.

Simulacre d'exécution

Après ce simulacre d'exécution, La famille de Hani a payé
30.000 euros de rançon pour le revoir le plus vite possible. Ces ravisseurs sont des bandits, avant tout motivés par l'argent. Et cela, depuis des années. Sauf que depuis les événements politiques de cet été, il y a dorénavant
une motivation religieuse. C'est ce qu'explique Peter Hany, très investi dans
la communauté copte, il répertorie les cas d'enlèvements dans la région :

" Les Frères musulmans n'ont plus d'argent. Les rançons leur servent pour organiser leurs manifestations"explique Peter.

La communauté copte vit donc avec cette menace qui plane au
dessus d'elle. Désormais, les ravisseurs ciblent aussi les familles pauvres et
également, comble de la terreur, les enfants. Dans le village de Towa,
minuscule endroit en périphérie de Minya, cinq personnes ont été enlevées dont un
petit d'un an et demi libéré contre une rançon de 500 euros, le maximum que ses
parents pouvaient donner.

Les autorités peuvent endiguer ce phénomène

Toujours dans ce village de Towa, autre exemple : la famille de Kirolos, un
jeune homme de 21 ans disparu depuis 52 jours alors que sa famille modeste s'est
saignée pour rassembler les 12.000 euros réclamés par les ravisseurs. L'argent
a été déposé raconte Adel son père, mais malgré cela son fils reste
introuvable :

" C'est un commerce très facile pour de l'argent n'importe quelle somme".

Les autorités peuvent endiguer le phénomène, d'après les associations qui réclament
des procédures plus souples pour traquer ces preneurs d'otages. Notamment pour
géolocaliser les portables. Cela prend deux ou trois jours en temps normal mais
c'est trop long dans ces cas là.

Résultat, ces gangs continuent de sévir dans la région,
explique Isaak Ibrahim, chercheur pour une ONG sur ces questions qui explique même que le nombre de rapt a augmenté ces derniers temps.

A Mynia, jusqu'à
présent, il n'y a jamais eu de condamnations, ni même de procès dans ces
affaires d'enlèvements.

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