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Le trouble jeu de Patrick Buisson, ancien conseiller de Sarkozy, en cinq histoires

Dans "Le Mauvais Génie", les journalistes du "Monde" Ariane Chemin et Vanessa Schneider se penchent sur le parcours de cet influent homme de l'ombre. Les bonnes feuilles livrent quelques surprises.

Article rédigé par franceinfo
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Patrick Buisson, alors directeur de la chaîne Histoire et conseiller de Nicolas Sarkozy, le 15 octobre 2012, à Paris. (MIGUEL MEDINA / AFP)

"Le Mauvais Génie." Comprendre, celui de Nicolas Sarkozy. Un livre attendu revient sur l'itinéraire de Patrick Buisson, l'influent conseiller de l'Elysée à l'époque sarkozyste. Un homme de l'ombre finalement tombé en disgrâce pour avoir enregistré l'ancien président de la République, à son insu, avec un dictaphone, de 2007 à 2012.

Ecrit par deux journalistes du Monde, Ariane Chemin et Vanessa Schneider, ce livre jette une lumière crue sur le personnage. En attendant la parution en librairie, jeudi 19 mars, les bonnes feuilles sont déjà publiées dans L'Obs et Le Monde, mardi. Francetv info revient sur les principales révélations.

1Sarkozy surnommé "Naboléon" ou le "zinzin"

Patrick Buisson met ses talents au service de Nicolas Sarkozy en février 2007, racontent les deux journalistes. Le premier n'est pas avare de surnoms : "le Nain", "le Petit", "talonnettes" ou "tête creuse". Au téléphone, il n'hésite pas à rudoyer le président de la République. Alors qu'il a raccroché une première fois, le combiné sonne à nouveau. Il tend l'appareil à des témoins et soupire : "Il ne peut rien faire sans moi, Naboléon".

Comme le rappelle Le Lab, un autre échange musclé a été rapporté dans le livre C'était pas le plan, écrit par Philippe Cohen et Laureline Dupont. Alors que Nicolas Sarkozy l'appelle, Patrick Buisson s'emporte : "Tu me fais chier, je suis en train de déjeuner !' Vlan !" Ambiance.

2Une fort jolie rémunération pour des sondages

Les deux journalistes du Monde expliquent aussi dans le détail - ce qui avait été révélé dans le livre Bigmagouilles - comment Patrick Buisson et sa société Publifact obtiennent alors des contrats avec l'UMP, après le rapport de la Cour des comptes sur les sondages de l'Élysée.

Il sera rémunéré par l'UMP "10 000 euros par mois, le montant que lui versait l'Élysée pour ses activités de conseil", relèvent les deux auteures. Un montant qui passe à "31 993 euros par mois" quand Jean-François Copé devient président de l'UMP. Devant un proche, il "blague : 'c'est rigolo, non, de piquer de l'argent à un juif' ?".

3Le cadeau télévisuel de Bouygues

Nicolas Sarkozy raconte à Martin Bouygues que son conseiller est tenté par la télévision, après son départ de LCI en 2007. Il vise en particulier la chaîne Histoire, diffusée par câble et satellite. "S'il n'y a que ça pour lui faire plaisir", lâche l'homme d'affaires. Le conseiller devient ainsi directeur de la chaîne, filiale de TF1, et n'a pas grand mal à obtenir des subventions. Entre 2008 et 2009, la chaîne est dotée de 270 000 euros par le ministère de la Culture et de la Communication, ce qui suscite rapidement des interrogations, notamment dans le journal Le Monde.

A cette époque, l'influence de Patrick Buisson est telle qu'Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux Anciens Combattants, organise une cérémonie aux Invalides pour la sortie de deux albums sur la guerre d'Algérie, signés par le conseiller élyséen.

4Buisson pousse Sarkozy à revoir les accords d'Evian

"Qui peut imaginer que, en 2012, Nicolas Sarkozy a failli proposer de dénoncer les accords d'Evian qui ont mis fin à la guerre d'Algérie ? (...) C'est l'idée qui a germé à quelques semaines du premier tour, dans le cerveau du conseiller", écrivent encore Ariane Chemin et Vanessa Schneider.

Patrick Buisson, ancien journaliste de Minute et de Valeurs actuelles, suggère à Nicolas Sarkozy de revenir sur le titre de séjour spécifique que peuvent obtenir les Algériens. Ce dernier semble d'abord "déconcerté", mais "le candidat finit par se laisser convaincre" et indique qu'il en parlera sur France 2 le 26 avril 2012. Mais Nicolas Sarkozy n'évoque pas le sujet. "Je ne l'ai pas senti", dit-il à son équipe en sortant. Ce "nabot" n'a "aucun courage", peste alors Patrick Buisson.

5Buisson conseiller de Mélenchon

Les deux hommes se rencontrent en 1993. Patrick Buisson participe à la rédaction d'une biographie de Philippe de Villiers et recherche des auteurs "hérétiques (...) pour clore l'ouvrage". Jean-Luc Mélenchon est l'un d'eux. Son texte séduit le premier : "Ce n’est ni un brasseur de vulgate, ni un adepte de la langue de bois." Ils se rencontrent. Par la suite, le socialiste prend souvent conseil auprès du droitier homme de l'ombre. Ce dernier l'encourage à quitter le PS en 2008 et à cogner fort sur François Hollande, davantage encore que sur Nicolas Sarkozy, lors de la présidentielle de 2012.

Ces éléments éclairent la présence de Jean-Luc Mélenchon lors de la cérémonie de remise de Légion d'honneur à Patrick Buisson, en 2007. Le fondateur du Front de gauche était d'ailleurs revenu sur l'épisode, en février, dans l'émission Le Divan : "La Légion d'honneur de M. Buisson par M. Sarkozy, c'est quand même un spectacle, et en plus gratuit ! (...) Je ne vais pas rester barricadé avec ma secte."

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