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Le conflit des intermittents du spectacle en cinq questions

Malgré la nomination d'un médiateur par le gouvernement, la grève a été reconduite jusqu'à mardi 10 juin et menace de nombreux festivals cet été.

Article rédigé par Carole Bélingard
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6min
Les intermittents du spectacle protestent à Lille contre l'accord concernant les nouvelles règles de l'assurance-chômage le 22 mars 2014. (  MAXPPP)

A Montpellier (Hérault), les festivaliers du Printemps des comédiens vont à nouveau être privés de spectacles, lundi 9 juin. Les intermittents ont décidé de poursuivre leur mouvement de grève jusqu'à mardi malgré la nomination par le gouvernement du député PS Jean-Patrick Gille, comme médiateur. Francetv info revient  en cinq questions sur ce conflit qui agite le milieu du spectacle.

1 Quelles sont les spécificités de leur régime ?

Acteurs, régisseurs, musiciens, techniciens, les intermittents du spectacle travaillent justement par intermittence, le temps d'une pièce de théâtre, d'une émission de télévision, d'une série de concerts... Du fait de ce statut précaire, les intermittents bénéficient d'une indemnisation chômage spécifique, relevant des annexes 8 et 10 de la convention d'assurance-chômage de l'Unédic, rappelle Ouest-France. 

Pour obtenir leurs allocations, les intermittents doivent totaliser 507 heures d'emploi sur dix mois pour les techniciens, et dix mois et demi pour les artistes. Un salarié soumis au régime général bénéficie, lui, d'allocations chômage à partir de 610 heures de travail sur 28 mois, note Le JDD. Mais pour compenser leur précarité, les indemnités sont plus généreuses pour les intermittents, explique Bruno Coquet, spécialiste de l’assurance-chômage, cité par Challenges.

En 2012, 112 00 intermittents étaient indemnisés, soit 3,5% des allocataires de l'Unédic, relève Le JDD. Par ailleurs, les intermittents représentent les deux tiers des salariés du spectacle.

2 Pourquoi le gouvernement veut une réforme ?

La situation du régime des intermittents pèse sur les comptes de l'Unédic. La Cour ces comptes estime dans un rapport, datant du 26 novembre 2013, que le déficit du régime des intermittents du spectacle atteint 1 milliard d'euros par an, soit le quart du déficit annuel de l'assurance-chômage. Un chiffre corrigé par Jean-Patrick Gille, auteur d'un rapport parlementaire sur le sujet en 2013. Le député PS, et actuel médiateur dans ce conflit, affirme que le surcoût du régime chômage des intermittents s'élève en réalité à 320 millions d'euros, rapporte Le Figaro.

Les abus du système sont également en ligne de mire. Challenges pointe l'audiovisuel et les "permittents", qui sont en fait employés de manière permanente notamment sur des émissions reconduites d'une année à l'autre. Dans les colonnes de Ouest France, un producteur indépendant s'interroge également sur l'attribution du statut d'intermittent à des activités parfois éloignées de la création :  "Est-ce normal qu'un technicien, qui va filmer une conférence d'entreprise ou un match de foot, bénéficie de ce régime ?"

En 2003, le gouvernement alors de droite avait mené une première réforme du statut d'intermittent occasionnant une série d'annulations de festivals de l'été. Avant cet accord de 2003, les intermittents devaient réaliser leurs 507 heures sur une année pour bénéficier des indemnités, explique Le Monde (article payant).

3 Que prévoit ce nouveau régime ?

Le nouvel accord sur l'assurance-chômage, établi le 22 mars entre le patronat, la CFDT, FO et la CGC, durcit le régime des intermittents. Néanmoins, il s'agit d'une première étape avant l'adoption définitive du texte par le gouvernement.

L'accord prévoit un plafonnement des indemnités à 5 475 euros bruts par mois. Un "différé" d'indemnisation est également mis en place. En clair, les intermittents devront attendre avant de toucher leurs indemnités. Enfin, les cotisations sur les salaires devraient progresser. De 10,8%, elles passeraient à 12,8% : 8% pour les employeurs et 4,8% pour les salariés.

4 Pourquoi les intermittents ne sont pas d'accord ?

Si le ministre du Travail, François Rebsamen, a assuré que "les trois-quarts des artistes ne seront pas concernés", rapporte Le Figaro, le "différé" d'indemnisation  concernerait, lui, 48% des intermittents qui devrait supporter un délai de carence pouvant aller jusqu'à 14 jours avant d'être payés.

Dans une tribune publiée dans Libérationles intermittents jugent  que "les mesures prévues viendraient aggraver le système en vigueur depuis 2003, dont les règles ont déjà prouvé leur injustice et leur inefficacité" et que "les salariés les plus précaires et les structures les plus fragiles seraient particulièrement affectés".

Enfin, dans une pétition contre la réforme des intermittents, les signataires estiment être "en droit d'espérer"  d'être entendus par la gauche, relaie Culturebox. "Ou sinon, c'est qu'il n'y a plus de gauche, c'est-à-dire plus d'espoir", poursuit le texte.

5 Quelles sont les alternatives proposées ?

Jean-Patrick Gille, propose de "faire contribuer davantage les intermittents les mieux insérés sur le marché du travail", rapporte Challenges. Une position partagée par la CGT spectacle, affirme l'hebdomadaire. Il s'agirait de déplafonner l'assiette des cotisations, aujourd'hui fixée à 688 euros par jour, afin que les plus gros revenus cotisent plus pour être moins indemnisés.

La Cour des comptes préconise un taux de cotisation variable pour les employeurs. Ainsi, "plus ils auraient recours à des contrats d’intermittence, plus leur taux de cotisation serait élevé", détaille Challenges.

Philippe Louis, président de la CFTC, suggère, lui, de faire payer les salariés du public. "La culture ne concerne pas que les salariés du privé. Ceux du public bénéficient sans contribuer. On pourrait donc imaginer une ligne de cotisation à l’assurance-chômage sur leurs fiches de paie", déclare-t-il à Challenges.

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