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Gouvernement d'Elisabeth Borne : Dominique de Villepin fustige le "déficit de pédagogie et d'explication de l'exécutif"

L'ancien Premier ministre appelle le gouvernement et les députés à "aller au plus près des besoins des Français" qui "ont le sentiment de ne pas avoir de quoi régler leurs fins de mois".

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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L'ancien Premier ministre et ancien ministre des Affaires étrangères, Dominique de Villepin, invité de France Inter, vendredi 21 octobre 2022. (CAPTURE D'ÉCRAN / FRANCE INTER)

Dominique de Villepin, ancien Premier ministre et ancien ministre des Affaires étrangères, s'est dit "profondément" inquiet de l'état de la France, vendredi 21 octobre sur France Inter. "Je suis inquiet surtout de voir que la politique, aujourd'hui, est déconnectée de la réalité du pays", juge-t-il.

"Un tapis rouge pour l'extrême droite"

Dominique de Villepin considère que l'Assemblée nationale et le gouvernement doivent "aller au plus près des besoins des Français" qui "ont le sentiment de ne pas avoir de quoi régler leur fin de mois" alors "qu'à côté il y a les plus riches qui sont encore plus riches". "C'est une réalité politique qu'il faut traiter (…) assumer, y compris par l'impôt", affirme l'ancien Premier ministre, convaincu qu'on "ne peut pas accepter de voir ainsi les intérêts du pays diverger entre les élites et le peuple". Selon Dominique de Villepin, l'exécutif doit montrer "qu'il a conscience des fractures et qu'il ne peut pas les laisser sans réponse".

Dans son analyse de l'état actuel du pays, l'ancien Premier ministre regrette qu'il ne soit pas possible "de regarder l'avenir sereinement" et "le monde sans avoir le sentiment d'être agressé". C'est, affirme-t-il, "ce qui explique les réactions sur l'immigration et le nationalisme". "Nous sommes en train de dérouler le tapis rouge pour l'extrême droite à la prochaine présidentielle par exaspération et par impuissance", alerte Dominique de Villepin.

Face à ce constat, l'ancien locataire du Quai d'Orsay en appelle à "l'unité et à l'équilibre du pays" et demande au gouvernement de "dépasser les clivages", "y compris en prenant le risque de l'impopularité". La réforme des retraites ne doit pas, dit-il, être "faite pour ajouter une plume supplémentaire au chapeau des dirigeants", au contraire, "il faut que les Français comprennent en quoi elle sert le pays et en quoi elle permet, dans la durée, de régler un certain nombre de problèmes".

L'ancien Premier ministre fustige par ailleurs le "déficit de pédagogie et d'explication de l'exécutif", sans oublier pour autant "les limites qui ont été celles de [s]a propre action" sous Jacques Chirac. "On a besoin d'une parole qui cicatrise cette société et on a besoin d'une parole longue qui remette la France en position de se réconcilier avec le monde", plaide-t-il.

Le couple franco-allemand "paralysé"

Sur la question du rapport à l'Union européenne, Dominique de Villepin estime qu'il faut "redevenir proposant", "reprendre la tête". Il déplore les divergences actuelles au sein du "couple franco-allemand", qu'il qualifie de "paralysé". Les tensions entre la France et l'Allemagne ont éclaté au grand jour après la décision du gouvernement allemand de reporter à janvier le conseil des ministres des deux pays qui devait se tenir le 26 octobre à Fontainebleau.

"Nous ne pouvons pas nous permettre en ce moment de l'histoire de ne pas avoir une Europe unie et une Europe forte", ajoute Dominique de Villepin qui –face à la guerre en Ukraine– appelle à retrouver "un dialogue fructueux" entre les deux nations, "à faire chacun la moitié du chemin", notamment autour des questions de l'énergie et de la rigueur budgétaire.

"Malheureusement l'Europe que défend Emmanuel Macron, souveraineté européenne, autonomie stratégique, a tendance à s'effriter", déplore l'ancien ministre. Il appelle la France à "redevenir sérieuse" en matière de finances publiques, dénonçant "son laxisme", et à "prendre en compte que la réalité énergétique ne se joue pas seulement sur le plafonnement des prix du gaz et de l'électricité mais sur une stratégie à long terme". "On doit faire preuve de cohérence et de sérieux", conclut-t-il.

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