Présidentielle : comment les syndicats se positionnent avant le premier tour
Une fois n'est pas coutume, la direction de la CGT a décidé de communiquer ce vendredi sa position avant même le premier tour de l'élection présidentielle. Parmi les organisations syndicales, elle n'est pas la seule.
La CGT doit ce vendredi 24 mars communiquer sa position sur le Front national avant l'élection présidentielle : c'est ce qu'a décidé sa direction cette semaine. Franceinfo a joint les autres principales organisations syndicales et, une fois n'est pas coutume, la plupart prennent position officiellement, avant même le premier tour de l'élection. En 2012, souvenons-nous, le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibaut appellait à battre Nicolas Sarkozy. Dix ans plus tôt, en 2002, les syndicats avaient enjoint les électeurs à faire barrage au Front national. Deux prises de positions intervenues entre les deux tours de l'élection présidentielle.
La FSU écrira à l'ensemble des fonctionnaires
Cette année, en 2017, les syndicats se positionnent en amont. Parce qu'il y a cette percée fulgurante du Front national dans les intentions de vote : toutes donnent Marine Le Pen au second tour. Alors, les syndicats sortent du bois plus tôt que d'habitude. Ainsi, dès ce lundi 20 mars, la CFDT envoyait un argumentaire anti FN à ses adhérents. La FSU, principal syndicat de la fonction publique, a décidé, elle, d'aller encore plus loin et devrait écrire à l'ensemble des cinq millions et demi de fonctionnaires de France.
La secrétaire générale du syndicat, Bernardette Groison, dit prendre ses responsabilités : "Il faut aller voir sur le terrain les collègues et voir pourquoi ils seraient prêts à voter pour ce parti, et argumenter, débattre avec eux.", explique-t-elle. "C'est un vrai travail de fond, poursuit Bernadette Groison, qui passe par la mise en avant des questions sociales et économiques, nous en sommes convaincus." La FSU ne donnera pas de consignes de vote. "Ce n'est pas son rôle, tempère la secrétaire générale. Par contre, la FSU a toujours été claire sur un appel, en tout cas, à faire barrage au Front national."
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Devant la montée du Front national chez leurs adhérents, la réaction des organisations syndicales n'est pas la même. Par exemple, au sein de Force ouvrière, syndicat décentralisé, c'est à la section locale de trancher. La CFDT, elle, a décidé d'exclure ses adhérents qui militeraient au Front national. Même sanction à la CGT même si la prise de position a minima qui sera visiblement publiée ce vendredi traduit bien un malaise de la centrale.
Malaise à la CGT
La CGT sent bien qu'une partie de ses militants est attirée par les idéees frontistes. Dans le même temps, ces sympathisants s'affichent de moins en moins, même à titre personnel, aux cotés du candidat choisi, à reculons disent-ils, par le Parti communiste... Aussi Jean-Luc Mélenchon ne peut plus compter cette année sur le soutien de bastions puissants de la CGT, les services publics, l'énergie... Au centre de la rancœur qui a mené au divorce, la question du nucléaire. La CGT demande des alternatives, et ne croit pas à une sortie rapide. "La sortie du nucléaire prendra quarante à cinquante ans puisqu'il faut des alternatives...", défend Thierry Chevalier, responsable en Ile-de-France de la CGT.
La stratégie du FN a changé
Ce rejet de l'extrême droite de la part des syndicats ne date pas d'hier, selon le directeur de l'institut supérieur du travail Bernard Vivier. Ce qui a changé en 25 ans en revanche, c'est, selon lui, la stratégie du FN vis à vis des organisations syndicales. "Dès la montée en puissance du FN dans l'électorat en France et notamment dans le monde ouvrier, dans le monde des salariés, au milieu des années 1990, toutes les organisations syndicales ont vu le danger et se sont structurées. Lorsque le Front national, à la même époque, a voulu créer des syndicats, les organisations syndicales ont fait barrage.", explique-t-il. "Puis, poursuit-il, au début des années 2000, le FN a entendu ne plus faire d'entrisme, laissant les organisations syndicales dans le discours d'opposition, en s'adressant par delà les appareils syndicaux à l'électorat."
Restreindre le champ d'action des syndicats à l'entreprise ?
Depuis 2012, la position des candidats vis-à-vis des syndicats a, elle aussi, changé. Il y a cinq ans, Nicolas Sarkozy était le seul à vouloir enjamber les organisations qualifiées de corps intermédiaires. Aujourd'hui, ils sont plusieurs futurs présidents potentiels à vouloir réduire le rôle des syndicats. C'est le cas de François Fillon et d'Emmanuel Macron. À cet égard, le leader de Force ouvrière, Jean-Claude Mailly, prévient : "On voit très bien que dans certains programmes, il y a par exemple une volonté de passer par ordonnances et donc de squizzer les discussions et la concertation. Ou de nationaliser ou étatiser l'assurance chômage, c'est la même chose, sans tenir compte du fait que l'ensemble des syndicats et du patronnat n'est pas d'accord avec cette mesure." Ou renvoyer les syndicats à un rôle limité à l'entreprise, sans qu'ils s'occupent des questions nationales : "Je sais par expérience que si cela se fait, il faut craindre un effet boomerang.", prédit l'homme.
Le secrétaire général de Force ouvrière anticipe déjà en quelque sorte une forte mobilisation cet été si tel ou tel candidat entre à l'Élysée. Par précaution, Jean-Claude Mailly a même demandé aux responsables de son syndicat de prendre des vacances remboursables... juste au cas où.
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