Bonus-malus sur le recours aux CDD : "Si on attend que toutes les branches se mettent à négocier une par une, on n'est pas rendu"
Emmanuel Macron devra mettre "la pression sur les partenaires sociaux" s'il veut pénaliser les entreprises qui ont trop recours aux CDD, estime l'économiste Bertrand Martinot.
Les partenaires sociaux tiennent vendredi 9 novembre leur première séance de négociation pour réformer l'assurance chômage, alors qu'Emmanuel Macron a annoncé un système de bonus-malus pour inciter les entreprises à avoir moins recours aux CDD. "Si le système est mis en place de manière progressive, ample et intelligente, ça peut avoir un effet sur les comportements", a commenté, sur franceinfo Bertrand Martinot, économiste spécialiste du chômage, des politiques de l’emploi et du dialogue social."Il faut que ce soit un vrai bonus-malus", a-t-il ajouté.
franceinfo : Favoriser les entreprises qui ont moins recours aux contrats courts et pénaliser celles qui en abusent, est-ce une bonne idée?
Bertrand Martinot : Il faut que ce soit un vrai bonus-malus. Si c'est fait de manière honnête, il y aura autant d'entreprises pénalisées que d'entreprises qui vont y gagner. En France, il y a le tiers des CDD qui sont en fait des réembauches des entreprises. Il y a beaucoup d'entreprises, parfois en collusion avec les salariés, qui reportent une partie de leurs coûts en ressources humaines sur l'assurance-chômage. Si le système est mis en place de manière progressive, ample et intelligente, ça peut avoir un effet sur les comportements, raccourcir les durées au chômage et faire faire des économies à l'assurance-chômage.
Ce projet divise les partenaires sociaux. Peut-on imaginer qu'ils finissent par se mettre d'accord?
L'idée, au départ, des partenaires sociaux, c'est une négociation branche par branche. Le problème, c'est qu'il y a 400 branches actives en France, et seulement deux accords de branche comptabilisés aujourd'hui sur ce sujet, ceux de la métallurgie et des services à la personne. Si on attend que toutes les branches se mettent à négocier une par une, sur la bonne utilisation des contrats courts, on n'est pas rendu. D'où l'intérêt que le gouvernement mette un peu la pression sur les partenaires sociaux.
Quel est le principal problème à cibler par cette mesure?
Le problème essentiel de l'assurance-chômage, à la fois en terme de retour à l'emploi et en terme de coût pour les finances publiques, c'est la permittence, c'est-à-dire le fait qu'il y a beaucoup de chômeurs qui ne sont en fait pas des chômeurs de longue durée mais qui sont des chômeurs qui enchaînent pendant des années des épisodes de chômage courts et des épisodes de contrats courts. C'est là-dessus qu'on peut agir par le bonus-malus du côté des cotisations. Mais aussi, et là ce sont les syndicats qui ne sont pas d'accord, par une révision des règles d'alternance entre les périodes de chômage et les périodes de travail, qui en France sont particulièrement généreuses.
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