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Ecotaxe : l'Etat devra payer le prestataire pour rien

Après avoir décidé de suspendre l'écotaxe, le gouvernement prend le risque d'un coûteux contentieux avec l'entreprise Ecomouv', chargée de sa mise en place. Elle affirme avoir déjà investi 650 millions d'euros, notamment pour installer 180 portiques au dessus des routes. Elle devait percevoir une partie de la recette de la taxe. L'Etat devrait donc la payer quand même à partir du 1er janvier. Par ailleurs, ce report remet en cause les financements d'infrastructures de transports qui devaient bénéficier de l'écotaxe.
Article rédigé par Grégoire Lecalot
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Franceinfo (Franceinfo)

L'écotaxe suspendue, une chose est sûr, elle ne rapportera rien à l'Etat, à partir du 1er janvier. Mais elle va tout de même coûter cher. Car l'Etat est lié à la société Ecomouv' par un contrat, signé en octobre 2011 par les ministres de l'époque, Nathalie Koscuisko-Morizet pour l'Ecologie, Valérie Pécresse pour le Budget et François Baroin pour l'Economie. Dénoncer ce contrat équivaudrait à devoir payer 800 millions d'euros de pénalités. Pas question d'en arriver là, jurent les ministres en place.

50 millions d'euros par trimestre pour rien

La solution retenue pour le moment est donc de faire "comme si", du moins en partie. Ecomouv' ayant investi 650 millions d'euros dans la mise en place de cette taxe - installation de 180 portiques, création d'outils informatiques, recrutement de salariés - l'entreprise sera donc bel et bien payée pour le service qu'elle n'effectuera pas. Elle touchera 50 millions d'euros par trimestre. Elle en aurait perçu 70 si l'écotaxe était entrée en vigueur. Mais ils auraient été pris dans la poche des transporteurs routiers. Les 50 millions le seront dans celle du contribuable.

A cette somme risque de s'ajouter un manque à gagner, chiffré autour du milliard d'euros. L'écotaxe devait en effet abonder une agence chargée d'orchestrer la construction des grandes infrastructures de transports, l'AFITF, pour Agence de financement des infrastructures de transport de France. Dès lors, quid de ce finacement ? Le gouvernement vient de donner son feu vert à certains projets, comme le TGV du grand Sud-Ouest. Le contribuable va-t-il, là encore, être appelé à la rescousse ?

Marges de manoeuvre réduites

Les réponses à ces questions sont d'autant moins claires que l'avenir même de l'écotaxe est dans les limbes. Officiellement, il n'est question que d'une suspension de quelques mois pour trouver de nouveaux aménagements. Sauf que les marges du gouvernement sont très étroites. L'écotaxe a déjà été aménagée : ristourne de 50% à la Bretagne, de 30% aux régions Aquitaine et Midi-Pyrénées. Les seules pistes évoquées portent sur une éventuelle exemption pour le transport de carcasses et de bétail ou de matières agricoles sur des trajets de moins de 50 kilomètres. Autant dire que l'Etat arrive avec des propositions plutôt minces. Et encore sont-elles incertaines car elles risquent de se faire retoquer pour distorsion de concurrence ou inconstitutionnalité. Contrairement à l'espoir du ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, la suspension de l'écotaxe risque de ne pas "débloquer la situation ".

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