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Conférence de presse du chef de l'Etat : satisfaction au PS, premières salves de l'opposition

Deux heures et demie d'exposé liminaire, puis un jeu de question-réponse : le chef de l'Etat, François Hollande, tenait mardi soir sa première grande conférence de presse depuis le début de son mandat. La satisfaction a dominé l'essentiel des rangs de la gauche après son intervention, tandis que l'exercice ouvrait une fenêtre de tir de choix pour les premières salves de l'opposition.
Article rédigé par Ludovic Pauchant
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
  (Maxppp)

Discours de rassemblement, pédagogue, serein, courageux,
clair, précis : les socialistes ont salué à l'unanimité la prestation du
premier d'entre eux
. Martine Aubry, l'ex-Première secrétaire du PS, a salué "le
discours de rassemblement et de mobilisation de toutes les forces vives du pays
",
un discours "sans dramatisation" , "lucide"  et "sincère"  pour François Rebsamen, président du groupe PS
au Sénat.  "Le président de la République
a démontré qu'il savait s'adapter sans renier, hiérarchisant son action :
réorientation de l'Europe - désendettement - compétitivité. (...). Il y eut le
ton, la leçon faite à ses détracteurs, puis le fond, une mise en ordre et une
mise en sens, enfin une philosophie : s'ada
pter sans se renier !", s'est satisfait Jean-Christophe Cambadélis, député PS de Paris.

"Il y eut le ton, la leçon faite à ses
détracteurs, puis le fond, une mise en ordre et une mise en sens, enfin une
philosophie : s'ada
pter sans se renier !"

Même son de cloche au Sénat : son président,
Jean-Pierre Bel, estimant que "face aux critiques, souvent caricaturales
dont il fait l'objet
", François Hollande avait "manifesté la
sérénité et le sang-froid d'un président qui entend inscrire son action dans la
durée
". François Hollande, à en croire Harlem Désir, le Premier
secrétaire du Parti, aurait même montré "qu'il entend les attentes des
Français et qu'il y répond
", saluant également "l'engagement
européen réaffirmé par François Hollande
".  Au PRG, même satisfaction : Jean-Michel
Baylet, le président du Parti Radical de Gauche, a ainsi salué la "clarté
et la précision" 
avec laquelle François Hollande s'est adressé à ses
concitoyens
.**

Jean-Marc Ayrault "touché"  mais pas "surpris"

Côté gouvernement, le Premier ministre a considéré à l'issue de la conférence que les Français avaient eu un "rendez-vous de haut
niveau
" avec le Président de la République, et s'est dit
"touch é", mais "pas surpris " par le fait que
François Hollande lui ait renouvelé sa confiance : "ça m'a touché
parce que c'est une lourde responsabilité. Mais je ne suis pas surpris, parce
que nous travaillons ensemble chaque jour, chaque semaine, au service du pays
et il n'y a que cela qui nous préoccupe"
. "

" Sa vision strictement comptable ne rompt
pas avec les discours de droite "

Il faut chercher un peu plus à gauche pour entendre résonner
les premières critiques. Au Parti de Gauche, on évoque des pirouettes
humoristiques malvenues, des priorités déplacées : "Monsieur
Hollande s'obstine dans l'erreur et refuse tout affrontement avec le pouvoir de
la finance. Sa vision strictement comptable ne
rompt pas avec les discours de droite (...). L'utilisation de pirouettes humoristiques pour éviter de répondre au fond montre l'incompréhension de
l'urgence écologique
", déplorait Martine Billard, la co-présidente du
parti. Au Front de Gauche, André Chassaigne, le chef de file des députés du parti
juge de son côté que le président a  "pratiqué la méthode Coué "
durant sa conférence de presse, mais que la politique qu'il a défendue ne
permettra pas de "sortir la France de la crise ".

" Aucune des inquiétudes des Français n'a trouvé de réponse dans la parole présidentielle "

Dans les rangs communistes, on dénonce un discours creux.
Pierre Laurent, le secrétaire national du Parti communiste français (PCF),
a ainsi estimé qu'"aucune des inquiétudes des Français n'a trouvé de
réponse dans la parole présidentielle"
, le président de la République
s'étant, ironisait-il, livré à un exercice "difficile " : "tenter de repeindre une politique de rigueur en politique de justice sociale ".

L'UMP véhémente

On ne s'attendait pas à un concert de louanges dans les rangs de l'opposition, qui a tenu son rôle avec plus ou moins de véhémence après l'intervention du chef de l'Etat. " Cette conférence de presse, je la résumerais d'un mot : quelle déception ! ", tonnait au Cannet Jean-François Copé, candidat à la présidence de l'UMP. Son rival François Fillon a, lui, dénoncé "un président qui enfonce un peu plus sa tête dans le sable ".

"C'était un exercice d'autojustification, avec au fond, un président qui n'était là que pour justifier son action.  Hollande a été dans le mensonge et dans le reniement des promesses qui ont été faites. On n'attend pas d'un président de la République qu'il se livre à un exercice de communication" , soupirait mardi soir Laurent Wauquiez au micro de France Info, à propos notamment du thème de la TVA.

Rien qui ne tranche avec la position de la députée et ancien ministre Nathalie Kosciusko-Morizet, pour qui François Hollande aurait "refusé à reconnaître ses reniements" , se positionnant "en observateur même pas avec un regard de vérité" , ou celle de Christian Jacob, qui estime avoir entendu  "un président de la République commentateur, absolument pas ni acteur, ni décideur, or c'est là précisément qu'on l'attendait ."  

"Je crois qu'il y aura beaucoup de déception après cette conférence de presse. Six mois après son arrivée à l'Elysée on était en droit d'attendre une orientation, un cap précis...." , présageait le président du groupe UMP à l'Assemblée nationale.

" Avec Hollande, le changement, c'est fini " 

Au Front national, à l'extrême droite, Marine Le Pen a entendu, elle, résumer l'intervention de François Hollande en une phrase "François Hollande, le changement c'est fini, avec François Hollande, le sarkozysme c'est reparti ", jugeant par ailleurs que "le président de la République a repris à son compte la doxa ultralibérale de toute la caste UMPS " , confirmant son "abdication devant les puissances d'argent" , "l'abandon de l'éminente mission de redressement confiée par les Français pour enfiler les habits de petit gouverneur de la province France aux ordres de l'étranger, des technocrates et des banques ".  

Borloo "estomaqué"

Au
centre, Jean-Louis Borloo s'est déclaré "estomaqué" que François
Hollande ait annoncé durant sa conférence de presse que "le chômage va
encore augmenter pendant un an
". Le président de l'UDI  a vu dans l'intervention une "opération
de séduction pour la presse"
, "un exercice plutôt habile sur
la forme pour tenter de justifier six mois d'hésitations et de reniements
" :
"Il a lu que la presse disait qu'il n'avait pas le costume, il a voulu montrer
qu'il avait le costume
", a-t-il ironisé. "Ce qui m'a le plus
frappé,
explique l'ancien ministre,  c'est
qu'un président de la République, qui depuis six mois voit le chômage
augmenter, dit aux Français : 'Je vous annonce que ça va encore augmenter
pendant un an'. Je vous avoue que j'en suis estomaqué"
.

Ailleurs, le président de la République aurait été "plutôt
séduisant sur la forme"
, à en croire François Zocchetto, le
président du groupe UDI-UC (centriste) au Sénat, qui ne manque cependant pas,
au passage, de souligner qu'à son sens, François Hollande n'avait "pas
indiqué de cap aux Français. Bien au contraire, François Hollande justifie par
avance la hausse du chômage, au risque de désespérer encore plus nos concitoyens.
Il accepte sans complexe ses renoncements, par exemple sur la TVA ou sur le
droit de vote des étrangers".

La CFTC "partage " l'analyse du
président, FO tempête

Les syndicats, eux, sont mitigés. La CFTC dit partager l'analyse
de François Hollande sur la négociation patronat/syndicats sur l'emploi, souhaitant
son succès négocié par des "partenaires sociaux libres, responsables et
respectés dans leurs diversités"
, plutôt que "la voie
purement et directement législative"
. Accueil moins tempéré ailleurs,
notamment chez Force ouvrière. L'appel présidentiel à un "compromis
historique"
 a fait bondir Jean-Claude Mailly, le numéro un de FO, qui
a dénoncé une pression malvenue, alors même, selon lui, que ce qui était "historique" ,
c'était la "crise" , que le gouvernement devait "prendre
ses responsabilités"
.

Elie Cohen, économiste et chercheur au CNRS, estime lui sur l'ensemble du discours, qu'il y a un "changement
caractéristique de cap
" : "François Hollande rêve à haute voix
d'un compromis socio-démocrate à la française, dans une logique de coopération
et non d'affrontement : c'est un grande rupture !"
, s'enthousiasmait-il
au micro de Catherine Pottier sur France Info.

 

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