Témoignages "Boys club", ministères régaliens confiés aux hommes... Quatre ministres se confient sur le sexisme qui perdure en politique

Alors que les femmes sont appelées à faire grève pour la journée des droits des femmes le 8 mars, plusieurs ministres se sont confiées à franceinfo sur leur vision du sexisme au pouvoir.
Article rédigé par franceinfo - Joséphine Ortuno
Radio France
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Séance de questions au gouvernement le 6 février 2024. (XOSE BOUZAS / HANS LUCAS)

Sous Nicolas Sarkozy, au milieu des années 2000, on les surnommait les "Sarko girls". Les ministres femmes dans un gouvernement sont, elles aussi, confrontées au sexisme ordinaire. Plusieurs d'entre elles ont témoigné au micro de franceinfo sur ce phénomène qui perdure toujours en 2024. Nicole Belloubet, aujourd'hui ministre de l'Éducation nationale, se rappelle aussi les années 1990. "Tout le monde se souvient des Jupettes, les ministres femmes d'Alain Juppé, avec la dérision excessive qui a été attachée à leurs rôles et au temps qu'elles ont passé au sein de leurs ministères. Je crois que c'est quelque chose qu'on ne dirait plus aujourd'hui", confie-t-elle.

Un sexisme gommé dans les mots mais pas dans les faits d'après Marlène Schiappa, ministre il y a encore un an. "Il y a des formes de 'boys club'", témoigne-t-elle. "Sous le premier quinquennat d'Emmanuel Macron, j'ai appris par hasard que des hommes ministres se réunissaient pour jouer au foot."

"On était deux ou trois femmes à l'époque à avoir dit : 'On a envie de faire du foot avec vous'. Et comme dans une cour de récré ils nous ont répondu : 'Non c'est que pour les garçons'."

Marlène Schiappa, ancienne ministre

à franceinfo

Pour contrer ce "boys club", Marlène Schiappa avait pris l'habitude de réunir les femmes ministres entre elles. Catherine Vautrin, l'actuelle ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités, a pris la relève. Le 21 février dernier, la nouvelle ministre organisait avant le Conseil des ministres un petit-déjeuner avec les autres femmes du gouvernement. "C'était intéressant qu'entre nous on puisse avoir un petit moment d'échange. On va se le dire, un moment de filles. Ça fait du bien de temps en temps", justifie-t-elle.

Un sexisme encore ambiant

Un moment "de filles" avant un Conseil des ministres où aucune d'entre elles n'occupe un poste régalien. Ce que Nicole Belloubet ne juge pas si grave. "Lors des derniers ministères, celui d'Edouard Philippe, on était deux femmes aux ministères régaliens. Là les choses sont un peu différentes mais je ne sais pas s’il faut en tirer une conclusion définitive." Les ministères sociaux, eux, sont tous confiés à des femmes. La famille par exemple pour Aurore Bergé, actuelle ministre chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes. "Je ne me suis jamais sentie ni légitime parce que j'étais une femme, ni illégitime parce que j'étais une femme. Après, la question c'est comment on trace son propre parcours, parce que l'on a des combats que l'on a envie de porter", pense-t-elle.

Parmi ces combats, la parentalité. La question de la maternité distingue ces quatre femmes de leurs collègues masculins. "Nous articulons la vie de femme, de mère et de ministre", confie Catherine Vautrin, tandis que Nicole Belloubet concède que l'"on n'a plus la même disponibilité de temps pour se consacrer à ceux qui nous sont proches".

"Ce que j'ai ressenti, c'est que j'avais l'impression que quelle que soit ma décision on allait me dire que ce n'était pas la bonne."

Aurore Bergé, ministre de l'Égalité entre les femmes et les hommes

à franceinfo

Ces attaques sont même à double titre pour ces femmes ministres et mères. "Il m'est arrivé une fois d'être arrivée en retard à l'Assemblée nationale, six minutes exactement parce que l'une de mes filles était malade. J'ai été vraiment vilipendée et on a passé 27 minutes à débattre dans l'hémicycle du fait que j'avais six minutes de retard. On n'est pas des concepts, on est des personnes", raconte Marlène Schiappa. Si chacune de ces ministres estime avoir reçu assez de soutien dans sa maternité, toutes témoignent toutefois d'événements similaires. Preuve d'un sexisme encore ambiant. 

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