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Assemblée nationale : "Le compromis politique est vécu comme une compromission en France", estime le politologue Pascal Perrineau

Le professeur émérite des universités à Sciences Po pense que l'émergence d'un gouvernement de coalition est difficile, compte tenu de la nature des institutions françaises. 

Article rédigé par franceinfo
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Le politologue Pascal Perrineau, invité du 8h30 de franceinfo dimanche 5 décembre 2021. (FRANCEINFO / RADIOFRANCE)

"Le compromis est vécu comme une compromission", estime dimanche 26 juin le politologue Pascal Perrineau et professeur émérite des universités à Sciences Po, alors qu'Emmanuel Macron a chargé Elisabeth Borne de sonder les groupes parlementaires afin de former un "gouvernement d'action" début juillet.

Est-ce que vous croyez à ce gouvernement de coalition en France ?

La tâche est difficile parce que nous ne sommes pas dans un régime vraiment parlementaire. Nous sommes dans un régime mixte, à la fois présidentiel et parlementaire. La France a aussi cette particularité d'avoir les deux principaux groupes d'opposition (LFI et RN, ndlr) dans les mains de partis qui sont des partis qui n'ont que très peu ou même pas du tout de culture de gouvernement et qui pratiquent l'opposition radicale au gouvernement. Il n'est, pour eux, pas question de transiger sur quoi que ce soit. Le compromis est vécu comme une compromission et donc il faudra faire avec le reste des partis politiques.

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Pour l'instant, les Républicains ont dit qu'ils n'étaient pas disponibles. Par conséquent, il faut être très attentif à la création éventuelle de groupes entre, d'un côté, le Parti socialiste, les Verts et la Macronie ou de groupes divers droite, de l'autre côté. En ce moment, il y a des négociations pour que des groupes de ce type naissent afin éventuellement de jouer l'ouverture de la "majorité macronienne".

Est-ce que la stratégie d'Emmanuel Macron n'est pas, finalement, d'affaiblir l'opposition en créant des divisions en interne, quitte à créer effectivement de nouveaux groupes ?

C'est certainement la stratégie du président. Mais il y a toujours eu des petits groupes qui représentent le centre gauche ou le centre droit. C'est peut être avec ces groupes que le chef de l'Etat arrivera à "bricoler" une majorité absolue. Ce sera du bricolage car par opposition aux démocraties parlementaires, que ce soit au Danemark, en Allemagne, en Italie ou en Espagne, il y a un compromis qui est entièrement construit sur de longues négociations. Là, il ne s'agit pas de longues négociations. Emmanuel Macron a fixé une feuille de route très brève à Elisabeth Borne, il faut que tout soit bouclé début juillet. Et pour l'instant, c'est plutôt des contacts individuels plutôt qu'une négociation où différents groupes se mettent autour de la table pour essayer de construire un contrat de gouvernement pérenne comme ça avait le cas en Allemagne.

Ça va donc être compliqué pour le chef de l'Etat de faire passer ses réformes. Peut-on imaginer des accords au cas par cas, selon les textes ?

Tout à fait. On voit bien comment, au fond, sur l'économique et le social, la droite pourrait, sur tel ou tel projet, se rapprocher de la majorité. En revanche, sur le social et le sociétal, ça se passerait plutôt du côté de la gauche. Des hommes politiques importants comme Yannick Jadot chez les Verts ou certains socialistes disent d'ailleurs qu'ils feront un pas vers la majorité sur tel ou tel projet de loi, si ça leur semble aller dans leur sens. En revanche, du côté de La France insoumise, la radicalité de l'opposition est extrêmement différente. Et pour l'instant, la posture radicale paye mais ça ne durera pas très longtemps parce qu'au bout d'un moment, l'opinion, et même l'opinion de gauche, se lassera d'une position qui sera perçue comme une position de blocage du type "je ne veux rien savoir".

Ces compromis entre d'un côté la majorité et de l'autre la gauche ou la droite, n'est-ce finalement pas une bonne chose pour le pays ?

On découvre peu à peu ce qu'est le parlementarisme. Beaucoup de Français appelaient de leurs vœux un contrepoids parlementaire à ce qu'ils considéraient comme étant un pouvoir excessif de la présidence. Maintenant, on y est.

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