"Les aveux de Cahuzac jettent un profond discrédit sur la parole publique"
Pour Brice Teinturier, directeur général délégué d'Ipsos, les aveux de l'ex-ministre du Budget risquent d'affaiblir la classe politique dans son ensemble.
Les réactions consternées affluent après la mise en examen de Jérôme Cahuzac pour "blanchiment de fraude fiscale". Pour Brice Teinturier, directeur général délégué d'Ipsos, les aveux de l'ex-ministre du Budget, limogé du gouvernement le 19 mars, et qui a reconnu, mardi 2 avril, détenir un compte bancaire à l'étranger, risquent d'affaiblir la classe politique dans son ensemble.
Francetv info : Les aveux de Jérôme Cahuzac peuvent-ils décrédibiliser François Hollande, qui l'avait jusqu'à présent soutenu ?
Brice Teinturier : Je ne suis pas sûr que cela fragilise François Hollande et le gouvernement. Le chef de l'Etat a mis fin à ses fonctions trois heures après l'ouverture d'une information judiciaire. On ne voit pas bien ce qu'on pourrait lui reprocher, sauf à considérer qu'il aurait dû agir plus tôt sur la base de seules informations de presse. C'est une annonce qui dépasse de loin François Hollande, et qui va toucher l'ensemble de la classe politique de manière très importante.
Comment pourrait réagir l'opinion ?
Cela va jeter un profond discrédit sur la parole publique. L'affaire Cahuzac risque de susciter un dégoût profond au sein de l'opinion, car on est dans le registre de l'inacceptable. Qu'un homme politique ait un compte à l'étranger est déjà quelque chose d'inacceptable. Que cet homme ait accepté un poste de ministre du Budget au regard de ce passé est inacceptable. Qu'il ait menti avec aplomb devant les Français et la représentation nationale l'est encore davantage.
De tels aveux ne peuvent qu'alimenter et amplifier une perception déjà fortement ancrée dans l'opinion. Selon une enquête que nous avons publiée en janvier, 62% des Français pensent que "la plupart des hommes et des femmes politiques sont corrompus".
Le FN pourrait-il tirer profit de la situation ?
Si vous m'aviez posé la question il y a deux semaines, après la mise en examen de Nicolas Sarkozy et l'ouverture d'une information judiciaire dans l'affaire Cahuzac, je vous aurais répondu qu'il ne faut pas aller trop vite en besogne car, dans les deux cas, les suspicions n'étaient pas démontrées.
Mais là, il s'agit de faits avérés, reconnus par le principal intéressé. Nous sommes dans la situation paroxystique d'un ministre du Budget qui a fauté en même temps qu'il mettait en œuvre une politique réclamant des efforts aux Français. Cela ne peut qu'entretenir la défiance de la population et faire le jeu du Front national, mais aussi du Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon, deux partis qui tiennent régulièrement des discours contre les élites politiques.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.