Affaire Tapie: la légitimité du recours à l'arbitrage fait débat
Selon un rapport de la commission des Finances de l'Assemblée nationale publié ce matin en ouverture d'une série d'auditions des députés sur cette affaire, Bernard Tapie conservera "entre 106 et 144 millions d'euros" et coûtera "entre 136 et 154 millions d'euros" à l'Etat. Le tribunal arbitral avait condamné mi-juillet le Consortium de réalisation (CDR), l'organisme public chargé de liquider le passif du Crédit Lyonnais, à verser 285 millions d'euros à Bernard Tapie dans le litige sur la vente d'Adidas opposant l'ancien homme d'affaires à la banque.
Le député (Nouveau Centre) Charles de Courson, auteur du rapport, affirme que le recours à l'arbitrage était "d'une "légalité très douteuse" car une telle procédure n'est pas censée s'appliquer à une personne publique. Pour le député, le CDR aurait dû poursuivre sur la voie judiciaire après l'arrêt de la Cour de cassation d'octobre 2006 qui avait annulé la condamnation du CDR à payer 135 millions d'euros de dommages et intérêts à Bernard Tapie.
"La cassation était partielle et ne mettait pas fin aux procédures", a plaidé le président du CDR, Jean-François Rocchi. Cet arrêt avait "laissé ouvertes un certain nombre de portes sur les responsabilités qui pouvaient nous être imputées", a-t-il ajouté. L'affaire devant être renvoyée devant la Cour d'appel de Paris pour être rejugée, l'Etat courait le risque d'être de nouveau condamné, et qui plus est à "une somme plus importante que la première fois", a-t-il expliqué.
Beaucoup de députés, y compris certains UMP, ont exprimé leur indignation. "Tout est anormal dans ce dossier depuis le début", a jugé François Goulard (UMP). Le président du MoDem François Bayrou s'est dit choqué que l'Etat, qui n'a plus un sou, ait permis à M. Tapie non seulement de rembourser ses dettes mais de s'enrichir "aux frais du contribuable". François Hollande, premier secrétaire du PS, s'est demandé pour sa part si la relation de Bernard Tapie et de Nicolas Sarkozy avait pu "jouer". La gauche accuse en effet Nicolas Sarkozy d'avoir aidé l'ancien ministre de la Ville de François Mitterrand en échange de son soutien à l'élection présidentielle de 2007.
Une audition de Bernard Tapie est programmée mercredi prochain ainsi que celle de Jean Peyrelevade, ancien président du Crédit Lyonnais. Une audition de Mme Lagarde est "vraisemblable", selon le président de la Commission Didier Migaud.
Anne Jocteur Monrozier, avec agences
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