Cinéma : "Corporate", un film de Nicolas Silhol, avec Céline Sallette et Lambert Wilson, au cinéma le 5 avril
Emilie Tesson-Hansen est une jeune et brillante responsable des Ressources Humaines, une "killeuse". Suite à un drame dans son entreprise, une enquête est ouverte. Elle doit faire face à la pression de l’inspectrice du travail, mais aussi à sa hiérarchie qui menace de se retourner contre elle. Emilie est bien décidée à sauver sa peau. Jusqu’où restera-t-elle corporate ?
Extraits d’un entretien avec le réalisateur Nicolas Silhol
Quel est le point de départ de Corporate ?
J’ai toujours été intéressé par les rapports humains en entreprise. Ce n’est pas vraiment un hasard puisque mon père est prof de management en école de commerce et consultant en Ressources Humaines. J’ai passé beaucoup de temps à discuter de ces enjeux avec lui.
Mon premier court-métrage racontait déjà une séance de jeu de rôles dans une entreprise de pompes funèbres. C’était plutôt une comédie qui décrivait l’entreprise comme un théâtre où chacun doit jouer un rôle et mettre de côté ce qu’il ressent en tant qu’individu.
Ensuite, comme beaucoup d’entre nous, j’ai été frappé par la série de suicides chez France Télécom. Je découvrais qu’un certain système de "management par la terreur" pouvait réellement détruire des vies et des individus. Le cynisme du PDG de France Télécom, déclarant qu’il fallait mettre un terme à cette "mode du suicide", m’avait particulièrement choqué. Comme si c’était ceux qui souffrent qui étaient responsables…
Avez-vous enquêté en entreprise pour écrire le scénario ?
Ce sont les questions juridiques et éthiques qui m’intéressaient avant tout, pas le quotidien de l’entreprise. J’ai donc surtout enquêté auprès des inspecteurs du travail. C’est par leur prisme que j’ai découvert tous ces outils de management – la courbe du deuil, la mobilité forcée, l’évaluation comportementale... Comment prouver un lien de causalité entre le suicide d’un salarié et ses conditions de travail ? C’est un enjeu très compliqué auquel ils sont confrontés. Quelles sont les preuves éventuelles ? Comment celles-ci peuvent être effacées ? J’avais aussi envie de rendre justice à cette profession, qui est constamment remise en question et souffre d’une réputation affreuse, alors qu’ils font un travail indispensable et passionnant. J’ai pris beaucoup de plaisir à construire le personnage de Marie Borrel, l’inspectrice. C’est un corps étranger et libre qui débarque dans l’entreprise. Comme un chien dans un jeu de quilles ou plutôt comme un courant d’air qui vient faire claquer les portes. Elle va où elle veut, elle parle comme elle veut, elle fait celle qui ne comprend pas, elle dérange…
Avec Nicolas Fleureau, mon co-scénariste, on pensait souvent à Columbo !
Comment avez-vous conçu le personnage du DRH, incarné par Lambert Wilson ?
Je ne voulais pas en faire une caricature de salaud. C’est plus sa posture qui est choquante, celle du refus de toute responsabilité. Il est en fait celui qui incarne le déni avec le plus de force. Dans le rôle de cette figure d’autorité, j’avais envie d’un acteur très connu, qu’on identifie tout de suite. Lambert a cette élégance, ce charisme, et en même temps il a un grand capital sympathie auprès du public parce qu’il est aussi touchant et sincère. C’est un mélange de sophistication et d’humanité. Et puis sa voix est un instrument de musique.
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