Fermeture de comptes par Facebook : "Une action symbolique pour donner des gages quant à une relative gestion de ses utilisateurs"
Nicolas Arpagian, expert en sécurité numérique et auteur de "La cybersécurité" a réagi sur franceinfo à la fermeture par Facebook de 32 comptes qui tentaient de manipuler les élections de mi-mandat aux États-Unis.
Facebook a fermé, mardi 31 juillet, 32 pages et profils utilisés de manière coordonnée pour manipuler les élections de mi-mandat aux États-Unis prévues en novembre. La Russie est pointée du doigt, comme pour la présidentielle qui avait conduit Donald Trump au pouvoir.
Selon Nicolas Arpagian, expert en sécurité numérique et auteur de La cybersécurité aux éditions PUF, Que sais-je ? "c'est une action symbolique de Facebook qui souhaite donner des gages quant à une relative gestion de ses utilisateurs".
franceinfo : Comment expliquer cette action de Facebook ?
Nicolas Arpagian : Facebook souhaite donner des gages quant à une relative gestion de ses utilisateurs. Ils avaient dit à la suite de l'audition de Mark Zuckerberg qu'ils seraient vigilants. Cette fermeture se fait de manière très comptée, ce sont 32 pages sur presque deux milliards d'utilisateurs à l'échelle planétaire.
C'est une réponse extrêmement symbolique, d'ailleurs au même moment Twitter a eu la même démarche et a fermé un million de comptes estimés frauduleux ou usurpés. Twitter est passé à la vitesse supérieure. Dans les deux cas, il n'y a pas de procédure judiciaire, ce sont les plateformes elles-mêmes qui procèdent à cette analyse, à cet arbitrage. Ce sont elles qui mettent le curseur sur ce qui est accessible, ce qui peut être publié, les comptes qui peuvent être suspendus voire, le cas échéant, fermés. Ça se fait à l'échelle planétaire.
Quelle menace représentaient ces comptes ?
Il s'agit de comptes relais, qui vont permettre d'entrer en contact avec un grand nombre d'internautes. Ce sont des personnalités inventées de toutes pièces pour incarner ces comptes. L'important, c'est surtout l'information qui va être véhiculée, et de faire en sorte que, par un titre accrocheur, par des illustrations, vous soyez attirés, vous relayiez et que vous puissiez démultiplier la présence de l'information à vos amis et connaissances, selon cette règle du "qui se ressemble s'assemble".
Dès l'instant où vous êtes au contact d'une information mensongère, vous allez vous-même servir de relais et d'amplificateur : c'est le caractère viral des réseaux sociaux, qui est particulièrement efficace. Ce sont les utilisateurs eux-mêmes qui participent à la multi-diffusion des informations. Cependant, ceux qui sont à la manœuvre derrière ces 32 pages pourront rouvrir d'autres comptes, reconstituer le front en quelque sorte.
En France, il y a une loi sur les "fake news" en préparation. Va-t-on voir ce genre de propositions se multiplier à travers les pays ?
L'arbitre final restera toujours la plateforme. Bien souvent, elle ne va pas invoquer un texte de loi mais le respect ou la contradiction avec ses conditions générales d'utilisation. Elles rédigent et appliquent le droit. On peut avoir des interrogations sur : fallait-il bien fermer ce compte ou pourquoi tel autre persiste-t-il alors qu'il semble mener des actions malveillantes ? Les États se retrouvent à la remorque de ces plateformes, ils sont un peu en retard pour essayer d'établir des législations.
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