Cet article date de plus d'onze ans.

L'Amérique et son système de santé précaire

La santé, un thème sensible au pays de l’Oncle Sam. Aux Etats-Unis où 50 millions de personnes n’ont pas d’assurance maladie, les soins pèsent lourd dans les budgets et créent de fortes inégalités.
Article rédigé par Catherine Le Brech
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Les partisans de la loi réformant la santé, voulue par Barack Obama, manifestent devant la Cour suprême américaine, le 28 juin 2012 à Washington. (ALEX WONG / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

«Il y a 47% (d'Américains) qui sont tous pour lui (Obama), qui sont dépendants du gouvernement, qui pensent qu'ils sont des victimes, qui estiment que le gouvernement a la responsabilité de prendre soin d'eux, qui considèrent que leur sont dus une couverture santé, de la nourriture, un logement et tout ce qu'ils veulent». Ces propos ont été tenus par Mitt Romney, candidat républicain, pour tacler son adversaire démocrate, notamment sur le terrain de la santé.

Les républicains ont toujours contesté l’Obamacare, la loi réformant le système de santé américain, qu’ils jugent trop «socialiste». A leurs yeux, celle-ci consacrerait la mainmise du gouvernement sur la santé des individus.

Selon un sondage publié en mars 2012 par la fondation Kaiser Family, 41% des Américains interrogés étaient favorables à la loi contre 40% qui lui étaient hostiles, les indécis faisant le reste.

Un système cher et peu efficace
Il reste que le système de santé américain caracole au 37e rang mondial pour la qualité des soins et au premier en termes de coûts (OCDE). En comparaison, le système français a été classé en 2009 par l’OMS en tête des pays ayant les meilleurs soins généraux de santé.

Si l'Europe a choisi un modèle d'assurance-santé géré par l'Etat, les Etats-Unis possèdent un système reposant essentiellement sur les cotisations privées avec de nombreuses dérives. Ce système conduit à une logique de profit plutôt qu’à une logique de soins.

Vrai enjeu de la campagne électorale, la question de santé continue de diviser avant la présidentielle du 6 novembre 2012. Deux visions d’un système : les républicains estiment qu’ils n’ont pas à payer pour le fils de leur voisin, alors que les démocrates jugent que l’accès aux soins doit être plus équitable.

Quel destin pour la réforme de Barack Obama ?

Euronews, le 28 juin 2012

Se faire soigner aux Etats-Unis coûte très cher
Visite chez un généraliste à 120 euros, chez un dermatologue à 160, chez un radiologue à 1.100 euros la mammographie... les patients américains y réfléchissent à deux fois avant de consulter. D’autant qu’ensuite, ils doivent payer les médicaments, jusqu’à 20 fois plus qu’en Europe.

Le secteur de la santé représente 18% du PIB contre 11% en France. Cela équivalait en 2009 à quelque 7.400 dollars par habitant, selon l'OMS. A titre d’information, les Américains dépensent 300 milliards de dollars par an rien qu’en médicaments, quasiment autant que le reste du monde.

Quand on sait que cinquante millions de personnes de moins de 65 ans, dont 20% d’enfants, n'ont pas d'assurance santé ┬ 16% de la population ┬ ou ne sont insuffisamment couverts aux Etats-Unis, le sujet est au cœur des préoccupations des citoyens américains.

Plusieurs couvertures sociales
L’Etat prend en charge 25% de la population avec des programmes pour les plus de 65 ans, les handicapés et les pauvres (Medicare et Medicaid). 10% des assurés s’assurent à titre individuel, 60% sont couverts par leur employeur.

Des compagnies privées fournissent deux systèmes de remboursement aux salariés, par l’intermédiaire de leur société : les Health Maintenance Organization, les moins onéreuses, mais avec des professionnels de santé affiliés ; et les Preferred Provider Organization, plus coûteuses, mais laissant le libre choix du praticien.

Il existe également des Indemnity Insurances, privées et hors entreprise, qui font payer en fonction de l’évaluation du risque représenté par le client potentiel.

Des compagnies d’assurance toute puissantes
Ce système de cotisations à tiroirs pousse des millions d’Américains à choisir leur travail quand ils le peuvent dans une société plutôt qu’une autre en fonction de l’assurance maladie proposée par l’employeur. Car souscrire une assurance individuelle sans le soutien d’une entreprise ou d’un syndicat est juste un parcours du combattant.

Certains clients sont refusés au motif qu’ils ont été malades enfants. De nombreux témoins font également part de stratégies d’exclusion d’assurés, au moindre problème, même bénin.

Déjà en 2004... se soigner était un problème

Ina, JT13h, 2004

Un problème de santé peut conduire à l’incurie et à la ruine
En 2007, L’American Journal of Medecine indiquait que les ennuis de santé avaient contribué à 62% à des faillites individuelles alors que 77,9% des personnes ruinées étaient assurées. En cause, les énormes franchises imposées avant la prise en charge des coûts (soins ou hospitalisations) ou un remboursement inférieur au coût réel de l'acte médical.

Les praticiens n’échappent pas non plus à la complexité du système. En effet, ils doivent négocier régulièrement leurs tarifs avec les nombreuses caisses privées du pays et se retrouvent à gérer des formulaires en pagaille.

La bureaucratie érigée en système
Après enquête, le site Remapping Debate met l’accent sur le coût de cette paperasserie. Il dénombre 300 employés travaillant dans les services de facturation d'un hôpital du Massachusetts, contre trois à Toronto, au Canada, dans un établissement similaire.

Dans son article, Mike Alberti, un journaliste du site évalue également le coût total de la facturation des tâches administratives liées à l’assurance maladie aux Etats-Unis à plus de 400 milliards de dollars par an. Ce chiffre n’inclut pas les coûts supportés par les employeurs.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.