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Etats-Unis: Obama veut réformer le système judiciaire avant la fin de son mandat

Le 14 juillet 2015 à Philadelphie, devant 3.000 délégués de la NAACP (la plus importante association de défense des droits civiques des Noirs américains), le président des Etats-Unis a appelé de ses vœux à une réforme par le Congrès des textes régissant le système judiciaire du pays. But : le rendre plus juste tout en assurant la sécurité des Américains.
Article rédigé par Catherine Le Brech
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le président américain Barack Obama prend la parole lors du 106e congrès national de la NAACP à Philadelphie, en Pennsylvanie, le 14 juillet 2015. (AFP PHOTO / SAUL LOEB)

Le choix du lieu est symbolique : c’est dans cette ville qu’il a prononcé en 2008 un discours de campagne (vidéo) sur l’héritage aux Etats-Unis de l’injustice raciale.
 
La veille, Barack Obama avait commué les peines de 46 condamnés «qui n'étaient pas des criminels endurcis», mais qui avaient été pour la plupart condamnés à au moins 20 ans de prison pour trafic de drogue sans violence. «Il a commué plus de peines que les quatre derniers présidents réunis, pour un total de 89», fait remarquer le Journal de Montréal.

Un garde devant un établissement pénitentiaire à Baltimore, dans le Maryland (2002). (AFP PHOTO Luke FRAZZA)
 
Un taux quatre fois plus élevé qu'en Chine
Et pour enfoncer le clou, Barack Obama s'est rendu le 16 juillet à la prison fédérale d’El Reno, dans l'Oklahoma, une première pour un président en exercice. Pour l'occasion, le locataire de la Maison Blanche a été filmé par Vice qui réalise un documentaire pour HBO. Un film qui «met l’accent sur les répercussions de l’approche américaine sur le crime et l’emprisonnement» (sortie prévue à l’automne 2015).
 
«Les Etats-Unis comptent 5% de la population mondiale mais 25% de la population carcérale mondiale!», a martelé, à Philadelphie, le président américain. Il a pointé les excès qui ont conduit en prison pour des délits non violents une forte proportion de jeunes Noirs et d’Hispaniques (30% de la population américaine mais 60% de celle des prisons), parmi des dizaines de milliers de condamnés. Les «Afro-Américains ont plus de chance d'être arrêtés, ils ont plus de chances d'êtres condamnés à des peines supérieures (que les Blancs) pour les mêmes délits», a-t-il dit.

Extrait du discours de Barack Obama au National Association for the Advancement of Colored People (NAAC) le 15 juillet 2015

Et Obama de conclure : «Dans de trop nombreux cas», les condamnations sont «disproportionnées par rapport aux délits». Ainsi, sur les 2,26 millions de détenus (la plus grande population carcérale mondiale), plus de 50% purgent des peines minimales obligatoires (peines plancher liées à la drogue, indépendantes de la décision d'un juge). Lesquelles «ont considérablement augmenté au cours des années 80. Et ont largement contraint les juges dans les affaires de drogue. La répression a pris des connotations raciales: les peines liées au crack, le plus souvent associé aux dealers et aux utilisateurs noirs, étaient 100 fois plus importantes que celles en rapport avec la cocaïne, le plus souvent affiliée aux Blancs», analyse le Guardian.

Le tiers du budget du ministère de la Justice
Et dans une logique comptable, Barack Obama a mis l’accent sur les coûts exorbitants d’une incarcération : les Etats-Unis dépensent par an 80 milliards de dollars pour leur système carcéral et 30.000 dollars par prisonnier, d’après un rapport américain de mai 2015. Des chiffres à mettre en perspective avec le quadruplement de la population dans les prisons aux Etats-Unis depuis 35 ans.

Des chiffres qui pourraient finir de convaincre les républicains et les démocrates réticents à la réforme des peines. Et ce, alors même que des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent dans chaque camp pour appuyer la réforme et promouvoir la prévention et la réinsertion des détenus.

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