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Annuler la condamnation d'un agresseur sexuel s'il épouse sa victime mineure : le projet de loi qui scandalise la Turquie

Si cette loi est votée, elle pourrait concerner jusqu'à 3 000 personnes. 

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Le Premier ministre turc, Binali Yildirim, à la grande assemblée de Turquie, à Ankara, le 8 novembre 2016.  (OKAN OZER / ANADOLU AGENCY / AFP)

Une pétition appelant les autorités à bloquer l'adoption du texte a déjà recueilli près de 750 000 signatures. Jeudi 17 novembre, le gouvernement turc a soumis au Parlement une proposition de loi qui permet, dans certains cas, d'annuler la condamnation d'une personne pour agression sexuelle sur mineur si l'agresseur épouse sa victime. Une loi qui, si elle est votée, pourrait concerner 3 000 personnes, et qui scandalise les Turcs. 

Face à la controverse provoquée par le texte, le Premier ministre a demandé au Parti de la Justice et du Développement (AKP), au pouvoir en Turquie, qui a soumis le texte, d'avoir des discussions au Parlement avec l'opposition sur le projet de loi.

Le mot-dièse #OnNePeutPasLegitimerLeViol a émergé

Rapidement, l'opposition s'est indignée de voir un tel texte discuté au Parlement. "L'AKP a fait passer un texte qui pardonne ceux qui épousent l'enfant qu'ils ont violé", a réagi sur Twitter un député de l'opposition sociale-démocrate (CHP), Özgür Özel. Des membres de l'opposition de droite nationaliste (MHP), avec laquelle l'AKP a formé une alliance pour réformer la Constitution, ont eux aussi exprimé leur opposition.

Sur Twitter, le mot-dièse #TecavüzMesrulastirilamaz (#OnNePeutPasLegitimerLeViol, en turc) est devenu viral, s'imposant parmi les plus populaires en Turquie dès vendredi. Des célébrités, et même une association dont la vice-présidente est la fille du président Recep Tayyip Erdogan, ont exprimé leur inquiétude à propos de ce texte. 

Samedi, l'ONU a exprimé sa "profonde inquiétude" : "Ces formes abjectes de violence contre des enfants sont des crimes qui devraient être punis en tant que tels, et dans tous les cas, l'intérêt supérieur de l'enfant devrait prévaloir", a déclaré Christophe Boulierac, porte-parole de l'Unicef. Pour lui, cette loi "introduit une sorte d'amnistie pour les coupables d'abus sur des enfants", s'est-il alarmé.

Des agressions sexuelles "sans contrainte" ?

Pour le Premier ministre, Binali Yildirim, cette mesure vise à "lever [une] injustice""Il y en a qui se marient avant d'avoir atteint l'âge légal. Ils ne connaissent pas la loi. Ils ont des enfants, le père va en prison et les enfants restent seuls avec leur mère", a-t-il déclaré. 

Soulignant que "les mariages précoces sont malheureusement une réalité", le ministre de la Justice, Bekir Bozdag, a soutenu que la mesure visait, au contraire, à "protéger les enfants". Il a souligné que la mesure ne s'appliquerait que dans les cas où "l'agression sexuelle [a été commise sans] force, menace ou toute autre forme de contrainte". Une précision qui fait bondir Ruhat Sena Aksener, d'Amnesty International en Turquie. "Le ministre de la Justice a utilisé l'expression 'agression sexuelle sans contrainte'. Il n'y a rien d'autre à ajouter, je pense", a-t-elle déploré.

Gauri van Gulik, directrice adjointe d'Amnesty International Europe, a par ailleurs estimé que le projet de loi risquait d'envoyer un "mauvais message" et qu'il pourrait conduire à "de nouveaux abus". "Il est impossible de garantir qu'il a y en réalité consentement plein et informé de la fille et non seulement de sa famille", a-t-elle précisé.

La mesure permettrait de suspendre la condamnation d'une personne pour agression sexuelle sur mineur commise avant le 11 novembre 2016 si son auteur épouse sa victime. La mesure serait appliquée une seule fois et de manière rétroactive, a précisé vendredi

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