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Turquie : après l'échec du putsch, Erdogan reprend la main, les purges commencent dans l'armée et la justice

Les autorités turques s'efforcent samedi de reprendre le contrôle du pays, quelques heures après l'échec du coup d'Etat dans lequel plus de 160 personnes, dont des dizaines de civils ont perdu la vie.

Article rédigé par franceinfo avec AFP et Reuters
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Temps de lecture : 3 min
Le président turc Recep Tayyip Erdogan s'adresse à ses partisans, à Istanbul (Turquie), le 16 juillet 2016. (MURAD SEZER / REUTERS)

Après le coup d'Etat manqué de la nuit du vendredi 15 au samedi 16 juillet, Recep Tayyip Erdogan accuse les instigateurs du coup de force d'avoir essayé de le tuer. Le président turc avertit qu'ils "paieront le prix fort" et que l'armée serait purgée des éléments séditieux. 

La situation est "entièrement sous contrôle", a affirmé le Premier ministre Binali Yildirim, selon lequel le bilan humain d'une nuit d'affrontements à Ankara et Istanbul entre les militaires rebelles, les troupes fidèles au régime et les dizaines de milliers de personnes descendues dans les rues a été particulièrement lourd : 161 morts et 1 440 blessés dans les forces loyalistes et chez les civils, tandis que, d'après le chef de l'armée, 104 insurgés ont été abattus.  

Toutefois, signe que la situation était loin d'être totalement revenue à la normale, les accès à la base d'Incirlik ont été fermés, ont annoncé les Etats-Unis qui ont en conséquence suspendu leurs opérations aériennes contre le groupe Etat islamique, ces installations étant utilisées par la coalition internationale pour lutter contre les jihadistes en Syrie. De plus, les unités militaires américaines en Turquie ont reçu l'ordre de prendre des mesures de protection maximales, tandis que les Français à Istanbul ont été appelés par leur consulat à "rester chez eux".

Plus de 2 000 militaires arrêtés et des magistrats révoqués

Au total, 2 839 militaires ont été arrêtés en liaison avec ce coup d'Etat avorté, du simple soldat à l'officier, notamment ceux qui formaient la "colonne vertébrale" du coup d'Etat, a révélé le chef du gouvernement turc, selon lequel "ces lâches se verront infliger la peine qu'ils méritent". Parmi eux, le commandant de la 3e armée, le général Erdal Ozturk, ainsi que le commandant en chef de la deuxième armée turque, Adem Huduti, l'un des plus hauts gradés du pays.

La Turquie, où l'un des 17 juges de la Cour constitutionnelle a également été arrêté, a en outre demandé à la Grèce l'extradition de huit officiers et sous-officiers ayant fui à bord d'un hélicoptère. Ces huit militaires sont arrivés samedi dans le nord de la Grèce où ils ont demandé l'asile, mais ils n'ont pas pris part à la tentative de coup d'Etat, assure leur avocate, contrairement à ce que dit le gouvernement grec.

La justice n'a pas été épargnée puisque plus de 2.700 magistrats ont été révoqués dès samedi. Cinq d'entre eux appartenaient au Conseil supérieur des juges et des procureurs. 

L'opposant Fethullah Gülen visé

Recep Tayyip Erdogan a mis en cause l'opposant Fethullah Gülen, qu'il accuse de longue date de noyauter les instances judiciaires et militaires pour le renverser. Le prédicateur réfugié aux Etats-Unis a toutefois condamné samedi la tentative de coup d'Etat et s'est dit étranger à cette dernière. "Je réfute catégoriquement ces accusations", a rétorqué cet ex-allié du président Erdogan devenu son ennemi juré et dont le régime affirme qu'il est à la tête d'une "organisation terroriste".

Washington, qui va aider Ankara dans l'enquête sur le putsch déjoué, a toujours refusé de l'expulser et a invité samedi le gouvernement turc à fournir des preuves de son éventuelle implication.

Erdogan appelle ses partisans à descendre dans la rue

Le président Recep Tayyip Erdogan, très critiqué ces dernières années pour ses dérives autoritaires, a exhorté via Twitter ses compatriotes à "continuer à être maîtres des rues (...) car une nouvelle flambée (de violences) est toujours possible". Des milliers de ses partisans se sont à cet égard rassemblés samedi en début de soirée à Istanbul. Ces Turcs, qui se sont retrouvés dans une atmosphère plutôt familiale sur la rive asiatique de la métropole qui reste le fief du président Erdogan. 

Des partisans de Erdogan manifestent à Istanbul (Turquie), le 16 juillet 2016. (ALKIS KONSTANTINIDIS / REUTERS)

"Les Etats-Unis, vous devez extrader cette personne", a lancé le chef de l'Etat devant une foule de milliers de partisans, en référence à Fethullah Gülen. 

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